Splendid's
Jean Genet a écrit cette pièce entre 1948 et 1949, trois ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Aujourd'hui, Cristèle Alves Meira la met en scène quelques mois après le Printemps Arabe. Dans ce contexte géopolitique particulier, la pièce est transposée dans un présent multiethnique : dans ce huis-clos, les huit gangsters, quatre arabes, quatre occidentaux, sont cloîtrés, kalachnikov au cou, dans un hôtel où grésille la voix d'une présentatrice radio. Ainsi la pièce de Genet, qui n'avait jamais été jouée du vivant de l'auteur, résonne aux oreilles du spectateur: et si tout cela se passait sous nos yeux ?
Cette sensation de promiscuité temporelle est renforcée par une absence de distance spatiale : ici, pas d'opposition spectateurs/acteurs, tout se joue dans la salle, faisant ici de l'Athénée le hall de l'hôtel. La lumière ne s'éteint jamais, une estrade recouvre la moitié des sièges, et lors de l'ouverture des portes aux spectateurs, les acteurs sont déjà en place, les acteurs sont déjà en place, évoluent constamment,passent d'un balcon à l'autre,sans que cela ne perturbe jamais la visibilité de la pièce. Il faut dire que l'Athénée, ça n'est pas Garnier. Dommage cependant que la musique, quasi omniprésente vienne détourner l'attention du spectateur et alléger l'impression d'oppression.
Oui, la mise en scène est une réussite. Le jeu des acteurs l'est tout autant. Lahcen Razzougui en chef de bande désabusé et détroné, Hammou Graïa en orateur imposant, Cédric Appietto en mafieux sournois, et Pascal Tagnati dans un solo évoquant la folie, dérangeante et juste.
Et ce jeu d'acteur permet de prendre conscience que le texte et les thèmes chers à Genet sont finalement bien intemporels.
Lothéâtre