Il s'agit du concept de transfert et c'est l'une des premières études à explorer si les adeptes de jeux vidéo vont aller jusqu'à intégrer des éléments du jeu dans leur vie réelle. L'étude, publiée dans une nouvelle revue, Cyber Behaviour, Psychology and Learning, que la plupart des joueurs expérimentent ce transfert jusqu'à effectuer des gestes, dans la vie, comme ils le feraient en jouant un match en vidéo.
Ils font le geste de cliquer sur un bouton alors que la manette n'est pas dans leur main ou préparent leurs valises soigneusement comme ils rangent des blocs de Tetris…Les comportements rapportés dans cette étude sont extrêmement variables et s'ils portent forcément à réflexion, d'autres études devront confirmer le lien en l'exposition aux jeux vidéo et l'ensemble de ces comportements.
Cette étude qualitative menée par des chercheurs des universités de Nottingham et de Stockholm a analysé des entretiens face-face menés avec 42 joueurs assidus de jeux vidéo, âgés de 15 à 21 ans, non seulement pour explorer les effets du jeu sur le joueur pendant et après ses sessions de jeu mais voir dans quelle mesure des éléments intégrés dans les jeux vidéo ressurgissent dans la vie réelle. Les joueurs fréquents, recrutés à partir forums de jeux en ligne, ont été définis comme jouant au moins 10 heures par semaine et ayant une expérience de différents types de jeux vidéo.
Les phénomènes de transfert ont été classés en volontaires et involontaires. Certains joueurs rapportent l'intervention d'expériences de jeu vidéo dans leur vie quotidienne à un niveau subconscient. Les expériences les plus fréquemment citées sont,
· Exprimer le souhait de résoudre des problèmes de la vie réelle en utilisant des éléments de jeu ou comme le personnage le ferait,
· éprouver des sensations involontaires de faire les choses comme on le ferait dans un jeu (comme de tenter d'utiliser une fonction d'annulation pour « inverser » un accident),
· éprouver des distorsions visuelles,
· associer des stimuli visuels avec des fonctionnalités de jeux (ressemblance de gens dans la rue ou de situations réelles à des personnages ou situations de jeux),
· effectuer certaines actions comme dans un match vidéo.
En outre, certains des joueurs ont déclaré qu'ils rêvaient de jeux vidéo, presque tous les participants ont recours à des schémas de jeux vidéo pour résoudre des problèmes de la vie réelle, certains ont des réflexes involontaires tels que cliquer sur un bouton ou visualisent leurs pensées sous forme de menu de jeu. Certains bougent ou dansent comme les personnages vidéo puis se ressaisissent. D'autres utilisent des passages de jeux vidéo pour plaisanter, discuter…
Enfin les chercheurs ont trouvé de nombreux exemples de transfert liés à la violence, l'agressivité, les comportements à risque et les pensées criminelles. Jusqu'à, par exemple, mimer des personnages de jeu pour singer un enseignant irritant. De nombreux participants ont tout de même précisé qu'ils ne feraient jamais cela dans la vraie vie, mais avait bien imaginé le scénario.
Les auteurs concluent à un véritable engagement émotionnel mais à une vulnérabilité et une sensibilité différentes selon les joueurs et…les jeux. C'est un domaine où le recul et les données manquent pour pouvoir obtenir des preuves scientifiques de l'impact des jeux sur la pensée. Mais ces premières études qualitatives offrent déjà un premier aperçu sur ces phénomènes de transfert.
Source: Cyber Behaviour, Psychology and Learning Volume 1, Issue 3, p15-33. 2011 Game Transfer Phenomena in Video Game Playing: A Qualitative Interview Study.