Invité surprise à Gaza

Par Borokoff

A propos de Le cochon de Gaza de Sylvain Estibal 3.5 out of 5 stars

Sasson Gabay

A Gaza, Jafaar mène une vie misérable de pêcheur. Interdit de pêcher à plus de quatre kilomètres des côtes, il ne ramène chaque jour que de minces sardines et des semelles pourries. Un jour, après une tempête, il découvre dans ses filets… un cochon !

Le cochon de Gaza est une comédie plutôt réjouissante, un film qui surprend en évitant pas mal de clichés et d’écueils. Pourtant, avec cette histoire de cochon « sacrilège » qu’un Gazaoui introduit dans une communauté musulmane de Gaza et qui va semer la zizanie, le film de Sylvain Estibal avait tous les ingrédients pour se tirer une balle dans le pied, « casse-gueule » par excellence.

Mais la première réussite de Le cochon de Gaza tient à la qualité de son scénario. L’arrivée du porc « impur » provoque paradoxalement le rapprochement entre les communautés juive et musulmane de Gaza. Jaffar, qui cherche à revendre le cochon,  rencontre une jeune Russe juive (Myriam Tekaïa) qui, s’intéressant de près à la semence des cochons et prétextant revendre leur viande à des Russes de l’étranger, propose bientôt de le rémunérer.

Myriam Tekaïa, Sasson Gabay

Dans Le cochon de Gaza, on ne voyage pas au pays des Bisounours. C’est certes une fable, un contre très imagé à la limite de l’absurde, mais Estibal ne verse pas pour autant dans la naïveté ni la démagogie. Lorsque Jaffar découvrira à quoi servent véritablement les cochons, il se sentira coupable et un traître en son pays, jetant sur sa confiance et ses liens d’amitié avec la jeune Russe un voile d’ambiguïté que le scénario n’exploitera pas. A Gaza, les drames sont bien réels, que n’occultent pas le réalisateur, comme la mort d’un adolescent musulman tué par l’armée israélienne.

Filmé du point de vue d’un pêcheur un peu innocent et tête en l’air, Le cochon de Gaza tente de ne pas prendre parti dans le conflit ancestral qui oppose les deux plus grandes communautés religieuses de Gaza. L’autre réussite du film, Le cochon de Gaza la doit à la performance de son acteur principal, Sasson Gabay (La visite de la fanfare), de tous les plans et qui confirme son potentiel comique dans ce rôle d’un pêcheur un peu crédule et qui se retrouve embarqué dans une aventure qui le dépasse rapidement. Jafaar est un idiot. Après avoir été arrêté par les services secrets palestiniens, il prétexte que le cochon devait lui servir à préparer un attentat suicide. Ni une, ni deux, les mêmes services secrets l’obligent à prouver sa bonne foi en le transformant lui et son cochon en kamikazes et en bombes humaines, l’obligeant à fuir.

Il y a de la poésie et de l’imaginaire dans ce film qui assume dès le départ son invraisemblance (comment peut-on pêcher un cochon vivant dans la mer ?). Malgré une intrigue qui se dilue un peu vers la fin (la chute est un peu décevante), Le cochon de Gaza est un rêve de paix, l’espoir d’une réconciliation possible entre Juifs et Musulmans de Gaza. Ses idées et cette morale généreuses, on ne peut les lui enlever. Elles constituent tout le mérite du film et son principal intérêt…

www.youtube.com/watch?v=hpAvfABt0j4

Film français de Sylvain Estibal avec Sasson Gabay, Myriam Tekaïa. (1 h 39.)

Scénario : 3.5 out of 5 stars

Mise en scène : 3.5 out of 5 stars

Acteurs : 4 out of 5 stars

Dialogues : 3.5 out of 5 stars

Compositions : 3.5 out of 5 stars