Le Conseil des Etats vient de se rebiffer. Hier, par 29 voix contre 7, il n'a pas accepté les explications du
Conseil fédéral relatives au nouvel accord de double imposition avec les Etats-Unis et l'a renvoyé devant la Commission
préparatoire ici. La
discussion sur les ajustements de cette convention a été reportée à la fin de l'année quand des éclaircissements satisfaisants auront été apportés à la Commission.
Notamment les sénateurs ont tiqué sur le fait que, comme le rapporte l'ATS, l'Agence télégraphique suisse ici :
"Les Etats-Unis ne seront pas obligés
de fournir des données personnelles ou des numéros bancaires. Il leur suffira d'invoquer un comportement fautif induit par un établissement financier."
Ils n'ont pas été rassurés par le fait que " la pêche aux renseignements ("fishing expedition") restera exclue", ni par le
fait que "les autorités fiscales américaines devront justifier les raisons pour lesquelles elles ont besoin des renseignements demandés et livrer une description détaillée du comportement
mis en cause."
Dans l'éditorial de L'AGEFI de ce jour,
intitulé Le secret bancaire helvéto-décentré ici,
Pierre Bessard souligne que ce report "et l'adoption d'une motion visant à ce que la Suisse puisse "lutter à armes égales" dans le domaine de la
confidentialité bancaire suggèrent un certain aplomb face au trend dominant d'accorder des concessions d'abord, et de discuter ensuite".
Cependant, face aux autorités américaines, Pierre Bessard n'attend pas de "geste héroïque du Conseil fédéral au nom du respect de la sphère privée", mais il
rappelle fort opportunément que "le secret bancaire est destiné à protéger le citoyen contre les excès de son gouvernement également" :
"La question d'avoir quelque chose à cacher ou non est hors de propos : la sphère privée n'est pas un alibi, mais le moyen tout à fait honorable et indispensable de
délimiter son individualité par rapport à l'espace public. Cela vaut pour sa fortune ou ses revenus légitimement acquis."
Il ne faut donc pas "voir dans la croisade fiscale actuelle une guerre commerciale", mais une guerre menée "contre les
ressortissants des pays respectifs".
Dans le cas particulier des Etats-Unis, dont les ressortissants sont
assujettis fiscalement quel que soit leur lieu de résidence, le Foreign Account Tax Compliance Act n'est pas dirigé contre les banques mais contre les nombreux citoyens
américains expatriés qui ne font pas de déclaration.
Il n'est pas surprenant dans ces conditions que, rien qu'en Suisse, 2'000 personnes veuillent renoncer à leur citoyenneté américaine.
Pierre Bessard conclut :
"Face à ce qu'il faut bien appeler
l'esclavage fiscal, le secret bancaire prend des allures d'institution humanitaire. C'est à ce titre qu'il aurait dû être défendu."
C'est un droit de l'homme qui trouve, hélas, peu de défenseurs ...
Francis Richard