Comme j’ai eu l’occasion de le présenter dans un précédent article (ici), je considère que la recherche d’information dans une organisation est une question de dispositif, et j’ai appelé le pilote de ce dispositif « info-manager ». À présent je souhaite réfléchir un peu plus sur l’activité et les méthodes de l’info-manager avec la notion d’ « approche dispositif ».
En management de la qualité on parle d’ « approche processus » défini par la norme ISO 9001 et qui consiste à concevoir les grandes fonctions d’une organisation selon des groupements d’activité ayant un « input » et un « output ». Cette vision « entrée-sortie » est typiquement une vision d’ingénieur, très facile à modéliser (et donc à contrôler) mais très éloigné du fonctionnement réel de la circulation de l’information dans une organisation.
Je parle bien sûr de l’information au sens « info » et non au sens « data », c’est-à-dire de l’information « humaine » (non numérique). Cette information-là ne peut pas être traitée selon une vision input-output car elle est pour ainsi dire de la matière « morte » tant qu’elle n’a pas été échangée. Ce qui compte, ce n'est pas comment une information entre ou sort mais comment elle est transformée, utilisée, rendue signifiante, etc. À la limite, le dispositif de management de l'information n'a pas besoin d'entrée-sortie et peut fonctionner de manière autonome car il produit lui-même ses éléments essentiels. Car ce n'est jamais un extérieur qui alimente delui-mêmece dispositif, c'est le dispositif qui révèle l'importance et la signifiance de cet extérieur.
Loin de cette représentation d'ingénieur « input-output » – nécessaire à la modélisation et à la construction de modèles cognitifs simple pour l’appréhension de certaines réalités – l'approche dispositif a plutôt à voir avec le maillage et les ensembles ou réseaux interactifs.
Ainsi, alors que dans une approche processus, la complexité est à rejeter au profit de modèles simples et contrôlables, dans une approche dispositif, la complexité est une chance qu'il faut alimenter. Un dispositif ne doit pas chercher à gommer les aspérités chaotiques par une analyse, mais saisir l'émergence créative d'un ensemble interactif.
Concrètement, pour l'info-manager, cela se traduit par une gestion du chaos consistant à gérer la circulation de l'information de sorte qu'elle fasse écho à des préoccupations stratégique de l'organisation. En gros, que l'information arrive aux bonnes personnes pour initier des réflexions et des actions permettant à l'organisation d'assurer sa pérennité. En cela, l'info-manager est un éclaireur, il oriente une organisation dans des directions pour être plus efficace. Pour prendre une analogie psychobiologique, il fait la connexion entre les différents neurones de l'organisation, permettant à celle-ci de disposer de mécanismes psycho-sensori-moteurs tels que la perception (veille), la mémoire (base de donnée) ou la motricité (actions stratégiques).
Il reste bien sûr à préciser les modalités de mise en œuvre d'une telle approche dispositif, mais il me semble dès à présent clair qu'elles n'auront rien à voir avec celles issues d'une approche processus.