Le bilan d’une société à reprendre n’est pas complètement exhaustif de la réalité économique de cette entreprise. Aussi son analyse doit forcément être accompagnée d’une recherche des réajustements qui vont impacter la valorisation de la société, à la hausse ou à la baisse. Bien sur, l’acquéreur bénéficie d’une part de l’obligation de renseignement du vendeur, et obtiendra généralement une garantie de passif, mais, entre professionnels la première est d’application limitée, et aucune des deux ne couvrira l’acquéreur contre sa propre négligence.
Essayons de dresser une liste des éléments hors bilan susceptibles d’affecter à la baisse la valeur d’une entreprise, tout en précisant que comme le bilan, cette liste ne peut pas non plus être exhaustive. L’intérêt de notre propos ne peut être que d’orienter le lecteur dans les bonnes pistes de réflexion, et c’est dans ce but qu’il me parait intéressant de classer ces éléments hors bilan selon trois critères : Ceux qui tiennent à la vie de l’entreprise indépendamment de la cession, ceux qui répondent à l’opération de cession, et ceux qui seront principalement consécutifs au projet de l’acquéreur.
La recherche et la valorisation de ces engagements devra être abordée par l’acquéreur avec naturel, sans arrière pensée de suspicion ni gène.
Les éléments hors bilan tenant à la vie de l’entreprise et susceptible d’en affaiblir la valeur :
Les risques de redressement par les organismes fiscaux et sociaux. Il n’est pas nécessaire de détailler, le sujet est le premier à être couvert par la garantie de passif, c’est le premier à venir à l’esprit des parties à la reprise, le cédant est le premier à arborer ses notifications de contrôles pour faire baisser la garantie. Mais le cout direct du redressement, réglé par définition par le cédant n’est pas la seule conséquence d’un redressement : avez-vous pensé aux couts futurs des retraitements du fait des injonctions posées par ces administrations au cours d’un récent contrôle ? ( par exemple une soumission inattendue à la TVA ou à un taux supérieur, dans le cadre de conditions négociées de vente avec une importante durée restant à courir avant la renégociation).
Les engagements de départ à la retraite. Près des deux tiers des groupes comptabilisent ces engagements sous forme de provision. Les 37% restants sont réticents à cette pratique pour son impact négatif sur les capitaux propres. Et on connaît le poids important des départs en retraite à venir.
Les contrats résiliés, ou en cours de rupture, qui génèreront des indemnités à l’échéance, comme les contrats d’agents d’affaires. Il conviendra également de jeter un œil aux contrats d’approvisionnement avec engagement de volume, ainsi qu’à ceux avec des RFA ou remises arrières.
Les obligations de mise aux normes de l’outil de production. Dans notre contexte normatif, il faut surtout faire attention aux textes récents, non encore en application, mais que « nul n’est censé ignorer », et dont le respect pourra s’avérer couteux (attention notamment aux process employant des solvants, aux rejets dans l’atmosphère, …)
Les travaux de recyclage-dépollution futurs de l’emprise foncière. Vous connaissez l’expression « pollueur-payeur », et bien lors d’une reprise, le repreneur va se substituer au pollueur (et la pollution des sols n’est pas que le fait des industries chimiques, certaines activités d’apparence anodines peuvent entrainer des coûts de dépollution importants.)
Les garanties accordées non couvertes par des assurances, par absence, inapropriation ou rupture de garantie.
Les constructions devront amener l’acquéreur à se poser la question du maintien après la cession de la légalité de la construction, des autorisations nécessaires à l’exploitation (CDEC,…), et même peut être du droit à reconstruire en cas de sinistre (plan PRI, dépassement de COS ou du PLD).
Les litiges en cours de formation ou non encore judiciairement avérés ne font pas forcément l’objet d’une provision pour litiges.
Au cours de la reprise les parties vont se mettre d’accord sur des décisions qui vont avoir des effets secondaires la valeur de l’entreprise :
Voilà pourquoi, il convient d’étudier de plus près les propositions du cédant quant aux éléments hors bilan qui feront grimper la valeur de l’entreprise.
Convenir entre parties d’une plus value latente sur des éléments d’actif doit s’accompagner d’un retraitement pour tenir compte de l’impôt de plus value latent, parce que le jour venu, l’acquéreur devra payer l’impôt relatif à la plus value du cédant. La réévaluation de l’immobilier loué à l’exploitation doit aussi entrainer au compte de résultat un retraitement sur le loyer.
La signature d’un bail neuf va fréquemment augmenter l’engagement du locataire en termes de durée.
Le retraitement des crédits baux et des locations financières visant à les inscrire (entre les parties) à l’actif doit aussi amener l’acquéreur à regarder l’évolution correspondante des ratios d’endettement. C’est même fréquemment ce qui aura conduit le cédant à recourir à ces solutions de financement.
Certains engagements hors bilan seront principalement révélés dans le cadre de la réalisation du projet de l’acquéreur :
Les contrats réputés « intuitu personae », c’est-à-dire qui risquent d’être résiliés en cas de cession doivent être identifiés et traités par les parties, on pourra y trouver des prêts, un pacte d’actionnaires, divers contrats conclus dans le cadre d’un groupe, la plupart des contrats de franchise, ou de distribution exclusive comportent une clause d’agrément du cessionnaire. Certains contrats intuitu personae comportent des conditions de sorties dissuasives.
Le coût de sortie des placements monétaires ne doit pas être négligé. Il comporte des plus values latentes et le plus souvent une pénalité de sortie anticipée.
La sortie de groupements, GIE, groupement d’achat peut être couteuse.
Dans le cas d’un projet de changement ou d’adjonction d’exploitation il sera nécessaire de regarder toutes les autorisations d’exploiter, et il y en a qui se cachent : l’objet social, l’objet du bail, le règlement de ZAC ou de copropriété, d’AFUL, les accords particuliers conclus par le cédant avec des voisins ou un cessionnaire de fond de commerce, obtenir les extensions nécessaires peuvent coûter cher, voire ne pas être possible …
Présentation de l’auteurJean Louis PICOLLO est issu du monde de la banque et du financement.
Diplômé de la Faculté d’Economie Appliquée d’Aix en Provence et de l’EDHEC, il a exercé les fonctions de Directeur d’Agence, de Responsable de Centre de Profit puis de Manager de Réseau Commercial.
Au cours de sa carrière Jean Louis PICOLLO à travaillé sur des opérations de cession-reprise pour le bénéfice de ses clients. C’est en tenant compte des spécificités des PME et TPE, et en capitalisant sur son expérience professionnelle, qu’il a fondé RESOLVYS.RESOLVYS est un spécialiste en cession de fonds de commerce, transmission d’entreprises, spécialisé en PME et TPE. Plus d’infos sur www.resolvys.com et sur www.cession-reprise.fr