Prisons canadiennes VS prisons américaines
Quand les prisons sont pleines
Des études démontrent que si un jeune de 18 ans, arrêté pour agression, sort de prison à l’âge de 22 ans, ses risques de récidives ne sont pas plus grandes que pour une autre personne dans la population en général. La société y gagne en dépensant moins pour garder des prisonniers. Le système américain, lui, règle ce problème en ne laissant jamais ses jeunes sortir de prison.
Colin McGregor, prison de Cowansville. Dossiers Prison,Religion et spiritualité
La nuit, j’aime m’étendre sur le lit de fer de ma cellule. Je ferme les yeux et j’écoute la radio. J’écoute des émissions américaines, à des kilomètres de moi: du Vermont, de Detroit, de Buffalo, de New York et, certaines nuits, de Chicago. J’ai brisé plus d’une paire d’écouteurs en me retournant sur mon oreiller alors que je m’endormais au son de discussions sur la politique à Washington, du baseball ou des ovnis.
Le Christ à Cowansville
En 2004, un prêtre catholique renégat, Andrew Wingate, qui se décrit comme un mystique possédant un site Internet suivi par des millions de fidèles, donnait une entrevue à la radio. Il annonçait une nouvelle incroyable. Il proclamait que le Christ revenait sur terre, que le Sauveur apparaîtrait à Cowansville, au Québec, vers le 15 septembre de la même année. J’écoutais fébrilement.
À ce moment, j’ai fait le tour de mon unité pour trouver le fameux candidat. Après tout, la première fois qu’il est venu sur terre, Jésus a été condamné. Il est parti comme un criminel. Peut-être qu’à son retour, il reviendrait sous les habits d’un prisonnier. Au bout du couloir, il y avait un gentilhomme qui cuisinait parfois des biscuits. Il en donnait aux autres prisonniers gratuitement. Mais ses biscuits étaient faits avec de la pâte à biscuit. Pas avec de la mie ou du poisson. J’ai arrêté de chercher.
Personne n’a remarqué de Messie à la prison en 2004. Et le pape n’a pas été enlevé, une autre prédiction d’Andrew Wingate. Mais si les Américains s’attendent à ce que Jésus débarque dans une prison, ils n’ont pas besoin de chercher si loin. Aujourd’hui, un Américain sur 100 est derrière les barreaux. Si on ajoute ceux qui sont en probation ou sous conditions, pas moins d’un adulte sur 31 est sous supervision correctionnelle aux États-Unis.
Prisons américaines
Notre prison n’est qu’à quelques kilomètres du Vermont. Puisqu’il semble que notre système pénal se rapproche de celui des Américains, il serait utile de comprendre comment le système carcéral fonctionne au sud de notre frontière.
On recense plus de 4000 crimes fédéraux aux États-Unis par année. Dans l’État de la Californie seulement, 3700 détenus purgent des peines à vie pour des crimes qui ne sont pas violents ou sérieux. C’est plus que le nombre de prisonniers condamnés à perpétuité que compte le Canada. En Alabama, Jerald Sanders restera derrière les barreaux toute sa vie pour avoir volé une bicyclette. Un fleuriste du Texas a été emprisonné pour avoir possédé des orchidées sans avoir obtenu le permis approprié. Des Américains sont en prison pour avoir empaqueté des queues de homard dans un sac plutôt que dans une boîte. C’est une place merveilleuse pour travailler, en prison. On ne perd jamais son emploi!
Risques de récidives
Des études démontrent que si un jeune de 18 ans, arrêté pour agression, sort de prison à l’âge de 22 ans, ses risques de récidives ne sont pas plus grandes que pour une autre personne dans la population en général. La société y gagne en dépensant moins pour garder des prisonniers. Le système américain, lui, règle ce problème en ne laissant jamais ses jeunes sortir de prison.
Des économistes disent que la société peut dépenser son argent dans la coercition ou dans les services sociaux. C’est un choix. La façon de combattre le crime, bien sûr, est d’investir en éducation, en santé et en sécurité sociale. Le désespoir et la faim peuvent être des moteurs qui appellent à des comportements extrêmes. En étant nourris et éduqués, les gens seront moins portés à voler ou à devenir violents.
C’est facile de critiquer les Américains de ne pas dépenser d’argent pour arrêter le crime avant qu’il ne soit commis. Mais ils ne peuvent tout simplement pas. Selon la Constitution, la sécurité sociale, l’éducation et la santé tombent sous la responsabilité de chaque État. Ici, ce sont des domaines de juridiction provinciale. Quand le Québec a besoin de plus d’argent, il peut emprunter ou faire un déficit. On est très bon pour ça! Mais 49 des 50 États américains ne sont pas autorisés à être déficitaires selon leur constitution (chaque État a sa propre constitution). Quand on entend que la Californie a un manque à gagner de 30 milliards, leur gouverneur doit trouver l’argent aussitôt ou fermer boutique. Ils ne peuvent pas augmenter l’assistance sociale même s’ils le désirent. Seul le petit Vermont, tout près de Cowansville, peut être en déficit. Peut-être est-ce la raison pour laquelle le Vermont est paisible et gai, l’État hippie. Le reste des États-Unis doit construire des prisons. C’est la loi.
Occupation double en prison
Ma prison enfle et s’agrandit. Ils vont entasser deux hommes dans la même cellule de 7 X 10 pieds, meublée avec deux lits superposés, une toilette et un lavabo. Ils construisent de nouvelles unités pour rajouter des cellules. Les gens qui travaillent ici nous demandent toujours de regarder le côté positif des choses. Voici un avantage: je suis très seul, peut-être qu’ils vont m’emmener un pêcheur de homard ou un fleuriste qui fait pousser des orchidées avec qui je pourrais échanger! Un jour, tous les pauvres seront en prison. Et nous pourrons alors regarder Occupation Double tous ensemble à partir de nos cellules à lits superposés. Je ne me sentirai plus seul.
VOS COMMENTAIRES SUR Occupation double en prison
Autres textes sur Prison
Un détenu ministre de la Justice …
Pénitencier: sexualité des prisonniers
Le prisonnier et la religion
Femme au pénitencier: gardienne de prison
Drogue et paradis artificiel en prison
Prisons et suicides, rêves ou réalité?
Ce billet, ainsi que toutes les archives du magazine Reflet de Société sont publiés pour vous être offert gracieusement. Pour nous permettre de continuer la publication des textes ainsi que notre intervention auprès des jeunes, dans la mesure où vous en êtes capable, nous vous suggérons de faire un don de 25 sous par article que vous lisez et que vous avez apprécié.
Merci de votre soutien.
Quand un homme accouche
Roman de cheminement. Le personnage principal accouche de son enfant intérieur qui devient son ami et son thérapeute tout au long du roman. Ce livre est le premier d’une trilogie qui a été reprise dans L’amour en 3 Dimensions. 9,95$
Disponible Par téléphone: (514) 256-9000, en région: 1-877-256-9009
Par Internet: http://www.editionstnt.com/livres.html
Par la poste: Reflet de Société 4233 Ste-Catherine Est Montréal, Qc. H1V 1X4