Paysage urbain
Publié le 14 janvier 2007 par Caroline
La photo n'a rien à voir avec ce dont je vais parler ensuite. Il s'agit d'une photo prise à cent mètres de chez moi, interpellée que je fus par la géométrie accentuée par le soleil du matin. Ce nouvel appareil a l'avantage d'être léger, maniable et donc répondre plus facilement aux clins d'oeil que me proposent mon environnement. J'envisage de l'emporter quand je vais courir. Ce matin, j'aurais bien cliqué quelques serres.
Dans mes lectures de la presse, ce week-end, j'ai évité d'ouvrir Le Monde (et même sans l'ouvrir, puisque son article est en quatrième de couverture, je veux parler d'Éric Le Boucher) et donc de le lire, même s'il a atterri à la maison. Par contre, j'ai feuilleté Libé et j'ai lu la page offerte à
Erri de Luca. Beaucoup de choses intéressantes, même si, à mon goût, il parle beaucoup de la Bible, mais comme c'est son obsession, à ce brave garçon, je le lui pardonne. Personnellement, la Bible m'ennuie : elle dit tout et son contraire, fait couler beaucoup de sang, fait craindre la colère de Dieu, traîte la femme un peu à la légère... Mais, je ne suis pas docteur en théologie et ne lis pas l'hébreux (comme Erri De Luca). Ce qui m'a particulièrement interpellée dans le déroulement de sa semaine, c'est le mercredi :
La chance des livres
Hier, j'ai vu un de mes livres dans les mains d'une femme. Elle était assise dans le méttro, ses doigts serraient les pages pour les immobiliser et les tournaient délicatemment. J'ai compris hier que les livre ont un sort meilleur que ceux qui les écrivent. Gardés dans les bras, emportés en voyage, peut-être sur une île du Sud ou sous une tente en montagne, fixés avec intensité par deux yeux qui aussitôt feraient baisser les miens. Oui, les livres prennent du bon temps, bien plus que ceux qui les écrivent.
Je bénis mon sort d'écrivain de récits et non d'articles de journaux, car, près de la dame, j'ai vu un homme avec un quotidien. Il le tournait à coups secs, le lisait mécontent, puis il l'a replié et l'a fourré dans sa poche. Avant le soir, il l'aura expédié dans une corbeille à papier, au pilon. Quelle chance, en revanche, pour mes phrases dans les bras de la femme assise ! J'ai eu envie aussitôt d'en écrire une pour l'ajouter au bout de son livre.
Les mots que j'ai écrits ne sont plus à moi, ils sont devenus les siens. Elle les a voulus, en pêchant justement ceux-là dans le grand bazar des livres. Elle les a payés avec de l'argent prélevé sur d'autres dépenses, en se passant d'une bouteille de vin, d'une séance de cinéma, d'un concert. Ils ont pour elle une valeur ajoutée, celle de remplacer des choses plus agréables qu'un livre. Et, maintenant, ils sont là, sur ses genoux, feuilletés par une légère caresse, ses cheveux retombant dessus. Les pages ainsi prises et tenues sont les siennes, beaucoup plus qu'elles n'ont été les miennes.
C'est beau, non ?
À part ça, dans les journaux, on nous parlait du sacre d'un petit bonhomme. Rien d'intéressant.