Des dizaines de milliers de manifestants dont des membres de l'intelligentsia japonaise, ont défilé lundi à Tokyo pour réclamer "l'arrêt des centrales nucléaires." Un peu plus de six mois après la catastrophe nucléaire de Fukushima, le Japon s'interroge.
Alors que catastrophe nucléaire de Fukushimaa entraîné une pénurie d'électricité sans précédent et que le nouveau gouvernement a initié une campagne pour tenter de la compenser, les Japonais se mobilisent massivement. Seuls 11 réacteurs sur les 54 que compte le pays fonctionnent encore et les obstacles économiques s'accumulent pour trouver de nouvelles sources d'énergie. Lundi 19 septembre, ils étaient environ 60 000 dans les rues de Tokyo, scandant "Plus jamais de Fukushima" et réclamant "l'arrêt des centrales nucléaires", un peu plus de six mois après l'accident nucléaire de la centrale Fukushima Daiichi (220 km au nord-est de Tokyo) et les rejets massifs de radiation.
Rassemblés à l'appel de plusieurs organisations près du sanctuaire Meiji, les manifestants, parmi lesquels le musicien et acteur Ryuichi Sakamoto et le Prix Nobel de Littérature 1994 Kenzaburo Oe, semblent convaincus qu'il est possible de suivre l'exemple de l'Allemagne. Et pour cause, la part de l'atome dans la production nationale d'électricité est quasiment la même au Japon qu'outre-Rhin ! Le prix Nobel de littérature Kenzaburo Oe a ainsi estimé : "Certains disent qu'il est impossible de se passer d'énergie nucléaire, mais c'est un mensonge. L'énergie nucléaire est toujours accompagnée de destructions et de sacrifices".
Pénuries d'énergies et dilemmes économiques
Mais à la différence de l'Allemagne, l'économie nippone doit absolument sortir de l'ornière économique et faire face à une pénurie d'énergie sans précédent. Les usines qui tournent au ralenti depuis six mois doivent continuer de produire et d'exporter sous peine de crise économique aggravée. Le temps presse et les investissements nécessaires à un Japon plus vert prendront nécessairement plus de temps et d'argent qu'en Allemagne. C'est d'ailleurs l'argument du nouveau premier ministre Yoshihiko Nod qui souhaite redémarrer les réacteurs nucléaires à l'issue des stress tests effectués sur les centrales. Pour autant, il envisage le développement des énergies renouvelables et a promis d'annoncer d'ici à l'été 2012 une nouvelle politique énergique.
Selon une étude de l'Institut de Tokyo pour les énergies renouvelables, la part des énergies vertes pourrait passer de 10 à 30% d'ici 2020. Le professeur Iida qui dirige l'Institut de Tokyo pour les énergies renouvelables, rêve même d'un Japon vert : " On peut imaginer que 100% de l'énergie consommée au Japon proviennent d'ici 2050 d'énergies renouvelables comme l'éolien, le solaire et l'hydraulique. Nous travaillons actuellement sur de nouvelles techniques qui pourraient permettre au pays de prendre un avantage considérables dans ce domaine " a-t-il déclaré à un journaliste de Novethic.
Les manifestations de ces derniers mois l'ont montré, les Japonais sont prêts à vivre cette nouvelle révolution et à tourner résolument le dos aux risques du nucléaire. Un récent sondage a d'ailleurs montré que 82 % des Japonais souhaitent que leur pays sorte de l'énergie nucléaire et 67% des 1.853 personnes interrogées, réclament que plus aucun réacteur ne soit construit au Japon.
Depuis le 1er juillet, les services publics, les entreprises et les particuliers sont contraints de réduire leurs dépenses d'électricité de 15%. Une règlementation obligatoire dans la région de Tokyo et le Nord-est de l'archipel. Si les Japonais prennent avec philosophie la nouvelle politique d'économie d'énergie du gouvernement, certaines entreprises en revanche, réfléchissent déjà à délocaliser à l'étranger.
Entre le soutien de sa fragile économie et la confirmation claire de l'abandon du nucléaire, quelle décision doit prendre l'actuel gouvernement ?
"Je suis convaincu que nous relèverons ce défi et que nous trouverons un avenir avec un nucléaire plus sûr"a pour sa part déclaré à l'AFP le ministre chargé de la crise nucléaire Goshi Hosono. Dont acte.
Célia Garcin