— Et à quelles aspirations répond l’impulsion créatrice ?
Christian Prigent — À ce que je viens de dire, je crois : le projet de trouver une langue qui réponde le mieux possible aux défis qui sont à la source du besoin d’écrire ; la résolution de ne rien céder sur le désir que cette langue soit, sans concession au bruitage d’époque, sans peur des tentatives d’intimidations scolaires ou mondaines ; la certitude que rien du monde ne se perçoit ni ne se comprend en vérité si cette langue-là ne vient pas médiatiser l’expérience d’une façon plus intimement juste qu’aucune autre des médiations (intellectuelles, savantes, religieuses, idéologiques...) que propose l’époque ; la volonté de jouir des effets de « nouveau » qui se dégagent de la trouvaille de cette langue ; l’espoir, enfin, que tout cela puisse communiquer à quelques-uns, dits « lecteurs », un peu de la liberté et de la jubilation qu’en se faisant ça s’est octroyé.
Roger-Michel Allemand, «Christian Prigent : la distance et l’émotion», @nalyses mis à jour le : 28/01/2010
[Fred Griot]