C'est au Jas de Bouffan à Aix-en-Provence que j'avais pris ces photos. Difficile de rendre, l'impression que l'on ressent au contact de cette oeuvre de Giuseppe Penone. L'arbre est en bronze et ce n'est qu'en le touchant, quasiment, qu'on se rend compte qu'il ne s'agit pas d'une écorce vraie. Il est déraciné, surélevé du sol par des tuteurs, "se rapproche ainsi de la lumière" comme le dit l'artiste. À proximité de chacun de ces tuteurs, un jeune arbre a été planté. Le tronc de celui-ci, en croissant, englobera le tuteur et chaque racine de l'arbre de bronze deviendra vivante. Un même type d'arbre se trouve au Jardin des Tuileries. Là, le processus d'englobement est déjà amorcé.
Pourquoi je parle de Giuseppe Penone, aujourd'hui ? Tout simplement, parce qu'hier, j'ai vu au cinéma un film sur cet artiste.
Contrairement à certains artistes contemporains, il ne se perd pas en discours parce que son travail est au coeur de la matière à la recherche de l'essence de la vie, donc interpelle chacun de nous, sans passer par des chemins intellectuels, pas toujours très sincères.
Le fil conducteur du film est la création de l'oeuvre qui fut présentée dans le hall de Beaubourg en 2004. Il a acheté aux enchères un cèdre du parc de Versailles tombé lors de la tempête de 1999. Cet arbre avait plus de 200 ans. Giuseppe Penone va le creuser en son centre pour retrouver l'arbre aux alentours de ses vingt ans. D'un arbre mort, il dévoile l'enfance. On le voit creusant la matière jusqu'au coeur fatidique, jusqu'à montrer le jeune arbre qu'il fut. C'est très émouvant.
Il fait de même pour le marbre qu'il érode pour en montrer les veines nées du processus de sédimentation qui le constitua.
Il dit que notre société s'efforce d’effacer les traces en nettoyant de façon incessante alors que lui cherche les traces pour les mettre en évidence, car elles sont les signes de la vie.
Giuseppe Penone nous offre son regard sur la nature, sur le temps qui la transforme sans que notre oeil s'en aperçoive, nous montre la vie, le mouvement, dans ce qui peut nous paraître le plus figé. Par exemple, il a pris une pierre dans le lit d'une rivière, et puis, il est allé chercher en amont un bloc de la même matière que cette pierre, il l'a ensuite sculptée pour lui donner la même forme que celle recuillie en aval. L'artiste s'est mis dans la peau de la rivière qui siècle après siècle a érodé la roche. Réduction du temps. L'artiste imite la Nature.
Si, un jour, on nous propose des documentaires de cette qualité à la télévision, peut-être que je rebrancherai l'antenne. Mais, je crains que ce type de film ne soit pas propice à vendre des parts de cerveau disponibles à Coca-Cola.