les morts, les vaches... et les vivants

Publié le 25 mai 2007 par Caroline
Je continue la balade commencée lors du billet précédent. Je disais que certains patronymes revenaient avec insistance sur les tombes. Notamment celui de Pignol. C'était le nom que portait le précédent maire, entre autres célébrités locales. Mais, je voudrais parler de Paul Pignol. Il y a treize ans, nous avions loué une maison non loin de là, de l'autre côté de la rivière. Nous avions fait connaissance (ou plutôt, c'est lui qui avait fait connaissance avec nous !) avec un certain Paul Pignol. Tous les jours, en début d'après-midi, cet étrange promeneur, ouvrait le portail et s'intallait dans la cuisine en réclamant un café (et des cigarettes, mais ça nous n'en n'avions pas). Il entamait une conversation étrange où il nous parlait de la guerre qu'il avait soit disant faite, mais ne disait pas laquelle et surtout s'amusait à demander la date de naissance de toutes les personnes présentes, les enfants, les amis de passage. Les jours suivants, sans se tromper il nous ressortait les dates en les attribant à qui de droit. Le café bu, il s'en allait, sans prévenir de son départ. Il se levait de table et repartait sur les chemins. Toute la journée, ainsi, il marchait. On lui attribue plus d'une vingtaine de kilomètres par jour. Cet hiver, sur une route, il me semblait l'avoir reconnu. Je le croyais très vieux et fut étonnée de le revoir treize ans après arpentant les chemins. En fait, c'était bien lui, Paul Pignol, le visiteur des débuts d'après-midi de l'été 1994. En tant que future résidente, on m'a mise au courant des particularités de l'endroit et donc des habitudes de ce promeneur. Ne surtout pas s'affoller quand on voit entrer chez soit ce bonhomme mince au chapeau mou, canne à la main. Sa conversation est toujours la même. Sa mémoire regorge de date de naissances. Il a 83 ans. Personne ne l'a jamais vu travailler, pas même aider à rentrer les foins. Été comme hiver, il va sur les chemins faisant des visites sans préambule à ceux qui se trouvent sur son passage, buvant une tasse de café, quémandant une cigarette et posant quelques questions sur l'état civil des personnes présentes. Ces retrouvailles me plaisent. Et puis, si on veut tirer des conclusions scientifiques à tout ça, on peut dire que la marche, le café et les cigarettes, ça conserve et que, surtout, pour garder la santé, il ne faut jamais travailler !