INDIE ROCK - Le phénomène Wu Lyf a fait parler de lui tout l’été. Leurs lives physiques très remarqués (au Montreux Jazz, aux Eurockéennes et à Rock en Seine notamment) incarnant enfin plus d’un an de buzz sur le web ont tâché de confirmer leur statut de nouvelle sensation rock, confirmé d’ailleurs par le fondateur lui-même «[jouant] le rôle de chanteur de [son] groupe préféré».
Alors que le monde entier avait les yeux tournés vers Brooklyn, à guetter LE groupe de l’année, c’est d’une ville presque ringarde musicalement que le groupe est originaire. L’industrielle et sombre Manchester, qui avait vu naître certains des plus grands artistes des trente dernières années (The Smiths, Joy Division ou encore Oasis), n’avait plus vu un groupe de rock local devenir grand depuis les… Ting Tings.
L’une des raisons de leur succès ? Un marketing rôdé laissant planer le mystère autour du groupe : quelques copies rarissimes et hors de prix de leur premier EP vendues uniquement en vinyle, un refus systématique d’interviews avant la sortie de l’album, des concerts surprises et peu d’images du groupe ont largement contribué au succès médiatique de Wu Lyf. Rien de mieux que d’être insaisissable pour susciter l’intérêt.
Mais passé le ramdam autour de ces lads semblant sortir d’un film de Guy Ritchie, des critiques élogieuses et de leurs concerts furieux, la question de savoir si ce premier album justifie une telle hystérie. La réponse est oui.
Bilan : 10 morceaux pour une durée de trois quarts d’heure. On entre doucement dans l’univers des Mancuniens avec "LYF", chanson assez douce faisant la place belle à l’orgue. On comprend rapidement le potentiel du groupe : un son électronique et planant, comme si le groupe jouait dans une citerne, des riffs de guitares contre-balançant la mélodie du chant, une batterie tout sauf sobre et une voix immédiatement identifiable. Un cri plaintif, rauque, beuglant des paroles difficilement compréhensibles.
La particularité de Wu Lyf réside sans doute dans ce savant mélange d’influences à la fois space pop, post-punk et même grunge, sans qu’il soit possible d’attribuer une étiquette juste sur leur musique.
"Cave Song", le morceau suivant, montre cette fois le côté le plus dansant du groupe. Un tube assez évident, s’il n’était pas troublé par ce chant presque tribal qui peut à la fois séduire ou repousser complètement. Quant à "We Bros", il apparait comme l’hymne de ces bandes de garçons traînant dehors en buvant de la bière tout l’été, alors qu’ Heavy Pop, l’ultime morceau, dont le nom pourrait d’ailleurs tout à fait qualifier le style musical du groupe, incarne ce que Wu Lyf peut faire de mieux.
Malheureusement, sur album, la musique du groupe parait assez répétitive. Peut-être est-ce dû à un manque de refrains entêtants, de mélodies réellement nouvelles ou simplement à cause d’une transcription studio qui ne rend pas justice à la puissance scénique du groupe, mais ce GO TELL FIRE TO THE MOUNTSAIN laisse l’auditeur sur sa faim. Après une entrée en matière aussi surprenante et hypnotisante, on ne peut s’empêcher d’être déçu lors de l’écoute de la seconde moitié de l’album. Peut importe : Wu Lyf fait véritablement partie de cette nouvelle émergence de groupes britanniques ressuscitant et se réappropriant leur héritage national sans pour autant se laisser aller à la facilité d’un revival sixties surexploité. Fini les petits rockband à la Fratellis, Enemy, Pigeon Detectives ou Subways, d’ailleurs retombés dans l’oubli, il faudra désormais compter avec cette nouvelle vague plus électro avec Foals, Metronomy et Wu Lyf.
Ecrit par Eléonore Payro - Le 20 sep 2011