Philippe Pelletier, Président du Comité Stratégique du Plan Bâtiment Grenelle, s’exprime sur l’évolution de l’Eco-PTZ et sur les qualifications des entreprises pour l’installation de systèmes d’énergies renouvelables. Interview exclusive accordée à Qualit ENR
Quelles sont vos principales propositions sur l’évolution du dispositif Eco-Prêt à taux zéro ?
Les propositions procèdent d’un constat partagé par la centaine d’acteurs associé au groupe de travail :le crédit d’impôt Développement Durable est bien connu des ménages mais il représent un coût important pour les finances publiques et ne finance que des actions isolées ; l’éco-prêt à taux zéro permet d’associer différentes actions de travaux mais sa distribution est complexe pour les réseaux bancaires.
Nous proposons donc une réforme conjointe du crédit d’impôt Développement Durable et de l’éco-prêt à taux zéro. Une idée force a guidé notre réflexion : lier le niveau d’aide publique à la performance énergétique des travaux réalisés. Pour atteindre les objectifs du Grenelle et améliorer sensiblement la consommation énergétique du parc, il est indispensable de favoriser une approche globale et d’inciter fortement les ménages à entreprendre des rénovations d’envergure.
Nous proposons donc de maintenir les deux dispositifs mais de mieux les combiner afin d’instaurer une progresivité de l’aide au regard de la performance énergétique. Dans la recherche d’une meilleure combinaison des deux aides, il est utile de prévoir une harmonisation des actions éligibles. Nous proposons à cette occasion d’introduire les travaux de ventilation ainsi que les actions de fourniture d’électricité avec énergies renouvelables dans la liste des actions éligibles au niveau dispositif.
En outre, nous préconisons un dispositif adapté aux copropriétés. Dans sa version actuelle, l’éco-prêt à taux zéro ne peut y être facilement mis en œuvre. Or, il est indispensable d’engager la rénovation énergétique des 8.5 millions de logements en copropriété. Nous proposons la mise en place d’un éco-prêt à taux zéro collectif, délivré au syndicat des copropriétaires, sur une durée de 15 ans et permettant de financer une amélioration globale de la performance éneergétique de l’immeuble. De l’avis de tous, cet outil est indispensable pour assurer la mobilisation de l’ensemble des acteurs de la copropriété. De plus, il s’inscrit dans une dynamique de sensibilisation des copropriétés qui, entre 2012 et 2017, ont l’obligation de réaliser un diagnostic ou un audit énergétique.
Enfin, nous simplifions la distribution de l’aide publique. L’éco-prêt à taux zéro apparaît, à l’ensemble des réseaux bancaires, comme un produit complexe à distribuer car les conseillers endossent la responsabilité du contrôle technique de l’éligibilité du prêt. Nous proposons de confier à un acteur techniquement compétent (entreprise qualifiée ou titulaire d’un signe pertinent de reconnaissance de la qualité, ou tierce partie) la validation technique du dossier de travaux. Cette idée conduit à réserver l’accès aux travaux éligible à l’éco-prêt à taux zéro et au CIDD, aux professionnels qualifiés d’ici 2015.
Pourquoi avez-vous choisi de vous appuyer sur la qualification des entreprises ?
S’appuyer sur la qualification des entreprises permet en premier lieu de simplifier la distribution du produit, les établissements bancaires n’ayant ainsi plus besoin d’assurer cette fonction requérant des compétences techniques.
En second lieu, le recours à une entreprise qualifiée constitue un gage de qualité des travaux réalisés et assure une meilleure efficacité de la dépense fiscale et de l’investissement des particuliers.
Enfin, cela constitue un levier exceptionnel vis-à-vis des professionnels de la filière du bâtiment : indiquer l’horizon d’une exigence de qualification aura un effet incitatif puissant, permettant de soutenir efficacement les démarches de formation et de qualification engagées aujourd’hui.
Pensez-vous que ces propositions sont suffisantes pour inciter les particuliers à lancer les travaux ?
La progressivité de l’aide publique est un levier pissant pour inciter les particuliers à se lancer dans des travaux particulièrement performants. La référence à une entreprise qualifiée devrait simplifier les démarches auprès des réseaux bancaires et rassurer les ménages qui seront d’autant mieux accompagnés dans leur projet.
Cette évolution de l’éco-prêt à taux zéro devra s’accompagner d’une campagne massive de communication sur l’enjeu de rénover son logement. Confort, valorisation du patrimoine, économies d’énergie doivent être mis en avant dans une campagne asociant le ministère de l’Ecologie, l’ADEME mais aussi les établissement de crédit et les professionnels de l’immobiliser et du bâtiment. Il est primordial d’expliquer aux ménages l’intérêt de ce nouveau dispositif pour gagner ensemble.