A force de crier à la résurrection du western, il serait pourtant temps d’admettre que le western n’est pas mort. Tout juste n’est-il plus ce grand genre populaire qu’il a été, et est passé du côté du cinéma artisanal. Oui, le western est devenu un travail d’orfèvre. Les belles œuvres du genre sont apparues trop nettement ces dernières années pour que l’on puisse décemment qualifier le genre de zombie, ce défunt recouvrant la vie sans être tout à fait vivant. Open Range, L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, The Proposition, Appaloosa… 2011 nous a même déjà gratifiés d’un remarquable western by ze Frères Coen, True Grit, pendant que Kelly Reichardt défiait cet univers d’hommes pour signer un western atypique, contemplatif et fascinant, La dernière piste.
Si Paul Newman a prêté ses traits à Butch Cassidy il y a toutes ces années, Mateo Gil a lui offert le rôle à Sam Shepard. L'acteur américain qui ces dernières années a plus souvent joué les seconds rôles de luxe dans les productions hollywoodiennes se trouve ici au cœur de tous les plans ou presque, son visage buriné, sa barbe épaisse, sa silhouette fatiguée mais toujours charismatique. Son Butch est un homme las mais toujours alerte qui se déplace dans un paysage magnifié par la caméra du réalisateur espagnol.
Entre ces plans cherchant la beauté, cette gueule bourrue et gracile de Shepard, et cette voix entonnant avec simplicité quelques chants traditionnels magnifiés par la voix rocailleuse de l’acteur américain, la balade en Bolivie offerte par Mateo Gil est suspendue, aérienne, loin de toute époque. C’est une virée sans âge, amère, magnifiquement cinématographique.