Une croissance quasi-turgescente

Publié le 19 septembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Une croissance quasi-turgescente

Pendant que toute une intelligentsia s’auto-analyse en boucle pour savoir ce qu’il faut penser de DSK et se pignole vigoureusement sur le sens profond de ses dernières déclarations, le gouvernement tente de faire bonne figure en masquant par ses sourires de plus en plus crispés une situation économiquement … intéressante.

François Baroin s’est donc exprimé dimanche matin sur Europe1. Sa séance de squash devait avoir été annulée. Ou le temps ne lui permettait pas d’envisager autre chose. Et passer toute la matinée à glander au lit en attendant les croissants et en lisant le Figaro pages saumon (c’est le ministre de l’économie, après tout, hein), c’est pas son truc, à François.
Et une fois arrivé à la radio, il n’a pas hésité : tant qu’à s’être levé et pomponné pour aller raconter des trucs à Elkabbach, autant balancer du lourd qui fait jaser. Interrogé sur le projet économique du Parti Officiellement Socialiste, il n’a pas répondu « Hein, lequel ? » ce qui aurait été trop facile mais a tout de même osé ceci : pour lui, ce projet est « bon à jeter à la poubelle. »

Poubelle que connaît fort bien Baroin puisque c’est dans cette dernière qu’il va piocher ses meilleurs bobards sur la situation économique générale de la France. Situation qu’il présente avec l’aplomb que seuls les cuistres ou les hypocrites (cumul possible) sont capables de rassembler : on croirait, à l’écouter, entendre l’ingénieur du Titanic répondre sur le nombre de canots de sauvetages disponibles, sachant qu’un aviron numéroté lui est déjà réservé.

Car pour lui, la croissance prévue tiendra !

« On était sur une ligne à 2 %. On l’a corrigée à 1,75 et nous avons des raisons sérieuses de considérer que c’est atteignable. »

Parce que ce qui va arriver dans les prochaines semaines ne remettra pas en cause la bonne santé générale et la vigueur de l’économie française. D’ailleurs, à 1,75%, si on s’en tient à l’ambiance générale en Europe et dans le monde, on peut le dire, cette croissance sera quasi-turgescente !

Et pourquoi donc ? Parce que, selon le ministre qui grignote du viagra économique comme des cacahuètes avant un solide cordial, le gouvernement a pris les mesures nécessaires avec son vaste plan d’austérité pour 2011 et 2012.

Oui. Vous avez bien lu : le gouvernement a pris des mesures et un vaste plan d’austérité, même qu’il va rapporter 12 milliards d’euros de recettes à l’État. Et ce sera tellement austère, rigoureux et bien calculé que, je cite :

« Il n’y aura pas un euro de dépassement en termes de déficit par rapport à ce que nous avons pris comme engagement »

Il y aura donc des recettes et pas un euro de dépassement sur le déficit.

Vous me suivez ? Non ? C’est normal, c’est du berssy, un langage des hauts plateaux parisiens un peu complexe à comprendre. Ce que veut dire notre indigène est que l’État va faire exactement le déficit prévu, et que ce déficit tient compte à l’euro près des rentrées supplémentaires d’argent volé taxé.

On pourra s’arrêter ici quelques secondes pour méditer, et s’imprégner d’une foi immense en la bonne marche du monde. Parce qu’il va en falloir, de la foi, pour que :

a/ le déficit prévu ne soit pas dépassé. L’histoire montre que ce sera un vrai défi.
b/ les rentrées soient aussi bonnes que prévues. La conjoncture laisse rêveur.
c/ qu’aucun imprévu ne vienne flanquer tout ça par terre.

Notez que dans la même foulée, le même François a refusé d’admettre que les « recettes » nouvelles proviennent d’une hausse d’impôts. Pas question, pas question, pas question !

Et en 2012 ? Pas question, pas question, pas question !

Avalanche de taxes, donc, et on ne touche surtout pas aux dépenses. On voit que l’austérité touchera en conséquence essentiellement ceux qui produisent des richesses. Tous ceux qui tètent aux mamelles de l’État, eux, n’auront aucun dommage collatéral. Ouf.

On peut se demander quelles explications croustillantes le ministre nous trouvera lorsque la Grèce aura fait défaut, que les marchés se seront effondrés avec les rentrées fiscales et que les moutontribuables commenceront à se rebeller…

Oui, je sais, la rébellion des moutontribuables est une donnée hautement spéculative, plus peut-être même que certains subprimes. Pourtant, ce ne sera pas faute, pour nos tristes sires, d’avoir tout fait pour en arriver là, puisqu’un certain Jean-Luc M., qui n’hésite pas à pomper goulûment aux finances européennes tout en dénonçant ceux qui le nourrissent, appelle ouvertement à mettre le feu sur tout le continent dans de grandes envolées lyriques qui masquent fort mal l’absence complète de ressources à ses magnifiques idées basée sur des gros sprinklers d’argent gratuit provenant « des riches » qui, s’ils ne sont pas « apatrides », ont tout de même des aspects d’un autre âge.

Au demeurant, je ne comprendrai jamais pourquoi ceux qui distribuent l’argent gratuit des autres font toujours aussi petit jeu ; notre ami Jean-Luc continue ainsi de nous promettre un SMIC à 1700€, sans se rendre compte qu’avec 2000€, on vit tout de même mieux. D’ailleurs, en mettant le SMIC à 4000€, il rend tout le monde riche d’un coup d’un seul, et enquiquine Hollande qui ne les aime pas et qui se retrouverait ainsi avec tout son électorat dans la mauvaise partie du spectre fiscal. Pourtant, ce « une pierre deux coups », Méluche ne se l’offre pas.

Dommage.

Parce que du coup, avec tous ces riches, on pourrait lever une grosse foule de taxes et d’impôts roboratifs, hein.

Non ? Ça marche pas comme ça ?

Ah bon ?
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