Toutes choses scintillant

Publié le 19 septembre 2011 par Lorraine De Chezlo
de Véronique Ovaldé
Roman - 170 pages
Editions L'Ampoule - août 2002
Editions poche J'ai Lu - août 2005
Au pôle, sur les terres du Nunavuk, il est une île, Koukdjuak. Nikko y est née, et parmi les enfants de sa génération, elle est la seule survivante d'un mal propagé par l'usine de traitement de déchets, fermée depuis. La Nodamycine a pris possession de son corps, la rend malade, mais elle tient bon malgré tout. Malgré les dysfonctionnements, malgré l'alcoolisme de son père (comme de quasiment tous les hommes du coin, désoeuvrés, ne chassant plus, violents) qu'elle pense intimement ne pas être son père. Un jour un homme débarque, un journaliste qui souhaite enquêter sur cette pollution et attaquer semble-t-il les propriétaires de l'usine. Mais les témoignages se font rares. Un autre jour, l'usine rouvre et se remet à fonctionner grâce à cette armée d'hommes blancs qui débarque du continent et d'au-delà. Nikko n'a bientôt plus qu'un rêve, quitte Koukdjuak, quitter ce lac, ce tombeau scintillant, quitter cette pollution ravageuse et ces hommes qui se meurent.
C'est beau je trouve d'écrire en prenant place sur des terres si éloignées, si différentes qu'elles constituent un ailleurs d'emblée romanesque. Avec des descriptions lunaires, des sensations mystérieuses, une ambiance inquiétante et parfois apaisée, les premières pages de Toutes choses scintillant peuvent dérouter. Et puis le monologue de Nikko nous raccroche à la vie, sur cette terre devenue presque stérile. Enfant, jeune fille puis femme, on la suit à travers ses questions, sa croissance, l'évolution de son environnement (famille, amant, mari, fils). Elle nous donne tantôt de l'espoir et tantôt de l'effroi.
Extrait : 
"Après ça mon père disparut. Il partit vers les plaines. Nous l'avons attendu. Nous l'avons attendu en espérant très fort qu'il ne reviendrait pas - oh oui qu'une louve le dévore ou l'emporte dans sa tanière, qu'elle en file un peu à ses petiots puis congèle le reste afin d'en avoir jusqu'au printemps."

L'écriture de Véronique Ovaldé que je découvre ici, ce sont des mots qui résonnent, qui scintillent, des mots comme autant de perles qui font des chapitres de véritables bijoux. En 170 pages seulement, j'ai la sensation d'avoir voyagé très loin, assez longtemps, d'avoir savouré de nombreuses phrases, d'avoir ressenti le froid du lac gelé qui éblouit. J'en suis revenue ravie.
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