Je viens tout juste de lire le quatrième de couverture. J’ai tant entendu parler de ce roman que je n’y avais même pas songé avant ! En plus, et c’est la première fois que cela m’arrive, j’oubliais d’en parler ici.
Tout au long de ma lecture, je n’ai pu retenir ma question : pourquoi un tel succès à ce premier roman écrit par une jeune femme, jusqu’alors inconnue, traitant de la Russie sans y avoir mis les pieds, nous séduisant avec un Russe assez rustre ?
On veut comprendre, comme si c’était possible de toucher à la recette invisible, et la faire sienne.
J’ai trouvé des réponses, mes réponses, et les voici. Qui n’aime pas les personnages forts ? Qui n’aime pas les histoires qui savent les cadrer avec juste ce qu’il faut de lumière pour que la photo soit naturellement artistique sans être nécessairement esthétique.
Kolia est cet homme mal né qui, par la force de son caractère, déploiera une énergie constante pour se sortir de ses prisons. On s’attache à un tel homme, d’autant plus qu’il ne fait rien pour séduire. Il m’a par ailleurs fait penser à un bélier trapu non belliqueux.
On aime habituellement les histoires où une personne mal partie s’en sort, sans baguette magique, mais avec sa volonté. On n’aime pas la complaisance de la faiblesse, on aime la force qui se démarque. Et pas cette force superflue de nos temps modernes, mais de l’indispensable, ce celle pour sauver sa peau. Pour grimper les échelons d’une élémentaire fierté, évitant le rampement sous une botte.
Nous partirons d’un monde de dureté et de violence (prisons de Staline) pour se rendre à un monde d’amusement et de distraction (le cirque), arpentant un bien nécessaire, la discipline.
J’ai particulièrement aimé les débuts où la dureté est à son paroxysme, à ces moments où Kolia n’est même pas au pied de la montagne à escalader. C’est là où j’ai vécu le plus d’intensité. Lui aussi d’ailleurs, je veux dire le personnage. Quand il sera « grimpé», il aura besoin de se donner du frisson, misant le tout pour le tout pour un simple hobby. Cela me l’a rendu plus humain, moins réglé au quart de tour.
Par le style impersonnel, chaud de mots justes et froid de ton neutre (tout de même pas autant qu’au journal télévisé!) les horreurs coulent sur les phrases comme sur le dos d’une portée musicale sans trémolo.
Et quand, vers la fin, poindra le profil d’une prégnante gratitude, le roman en sera traversé à rebours, pour finir loin de la banalité. Ce qui donnera une chair sensible au cœur du Kolia, faisant monter d’un cran l’émotion.
Il n’y a pas à dire, l’auteure sait manier ses effets.
Remarquez le destin tout en blancheur de ce roman :
L’homme blanc de Perrine Leblanc entrera dans la collection Blanche de Gallimard.
En plus d'avoir gagné le Grand Prix du livre de Montréal 2010,
L'Homme blanc sera publié chez Gallimard.
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Avez-vous été fidèle au rendez-vous La Recrue en ce dernier 15 septembre ? Numéro spécial. Une rétrospective, une pause, un point d’arrêt pour assimiler, tout ça et bien plus !
Je vous invite personnellement à visiter la section des « Cœurs de cœur ». En y allant, vous comprendrez pourquoi je l’ai ajouté ici.
Bonne navigation sur les eaux des premières crues !