d'après Maupassant, dit le "mauvais passant"

Publié le 19 septembre 2011 par Dubruel

SUR L’EAU

J’avais un bateau

Que j’utilisais pour pêcher au lanterneau.

 

Fatigué, seul, une nuit

J’ai voulu me reposer.

Il n’y avait aucun bruit

La lune luisait.

Le fleuve brillait.

Je jetai l’ancre à la rivière

Et m’assis à l’arrière.

Le canot fila sa chaîne, puis s’immobilisa.

À ma droite, une grenouille croassa.

Je chantonnais, je fumais.

Enfin, je m’endormais.

 

Soudain ma barque pivota sur son erre,

Fut mystérieusement soulevée à l’arrière ;

J’étais ballotté

De tous côtés.

J’en avais les nerfs si ébranlés

Que je décidai de m’en aller.

Je rentrai mon matériel

Mais quand j’ai voulu lever l’ancre, ciel !

J’ai sentis une inhabituelle résistance.

J’ai tiré sur la chaîne avec insistance,

Je la secouais rageusement.

De nouveau, je forçais nerveusement.

L’ancre ne vint pas.

Rien de remua.

J’essayais en vain de l’arracher

Mais quelque chose au fond

Avait dû s’y accrocher.

L’ancre tenait bon.

 

Je possédais une bouteille de bière.

J’en bus deux ou trois verres.

Ma situation me fit rire.

Puis j’essayais de réfléchir.

Que se passait-il en moi ?

Ma volonté était surpassée par mon effroi.

 

Je bus encore une fois puis me rendormais.

 

À l’aube, un pêcheur ramait

Près de moi. Je le hélais.

C’était

Un normand à la forte carrure.

Je lui contais ma mésaventure.

Nous avons uni nos efforts

Mais l’ancre résistait encore

Enfin un nautonier

Vint nous aider.

L’ancre alors céda lentement,

Remonta doucement

Chargée d’un poids considérable.

Apparut une masse noire incroyable :

Le cadavre d’une vieille femme

Sans doute octogénaire

Lesté d’une altère

De cent kilogrammes.