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En bref : l’épopée dense qui pourtant ne se déroule que sur un an, de septembre 1913 à septembre 1914, d’une jeune fille à la recherche des circonstances de la mort mystérieuse de son cousin, amour de sa vie, en Birmanie.
Le Résumé de l’éditeur : Automne 1913. A Paris et ailleurs – de Budapest à la Birmanie en passant par Venise -, une jeune femme intrépide, Gabrielle Demachy, mène une périlleuse enquête d’amour, munie, pour tout indice, d’un sulfureux cahier hongrois recelant tous les poisons – des secrets de cœur au secret-défense. Habité par les passions, les complots, le crime, l’espionnage, et par toutes les aventures qu’en ce début du XXe siècle vivent simultanément la science, le cinéma ou l’industrie, Dans la main du diable est une ample et voluptueuse fresque qui inscrit les destinées sentimentales de ses personnages dans l’histoire d’une société dont la modernité est en train de bouleverser les repères. En 1913, Gabrielle Demachy s’avance, lumineuse et ardente, dans les rues de Paris, sur les chemins du Mesnil ; entre l’envol et la chute, entre eaux et sables, la voici qui s’engage dans le roman de sa vie.
L’Auteur : Auteur d’une œuvre littéraire de tout premier plan, Anne-Marie Carat a obtenu le prix Femina pour son roman Aden (Le Seuil, 1992) et conquis un large public avec Dans la main du diable, paru en 2006 chez Actes Sud où elle a également publié L’Amour de loin (1998), Les Mal Famées (2000 ; Babel n°557), L’Insomniaque (Babel n° 440), Nous nous connaissons déjà (200.3 ; Babel n° 741), La Rotonde (2004) et Une faim de loup. Lecture du « Petit Chaperon rouge » (2004).
Mon avis : Ce qui est sûr c’est que j’ai eu énormément de mal à y entrer, que je trouvais le style pesant avec ses descriptions interminables, et que l’héroïne me paraissait plutôt mièvre et insipide. Je me souviens très bien m’être dit à un moment –alors que j’étais passée de lecture rapide à lecture disons, transversale – : « Enfin, il se passe quelque chose ! » et … j’étais quand même page 437 (sur 1288 que compte l’édition de poche Babel)!!!
Et pourtant. A partir de là, je n’ai plus lâché et j’ai même enchaîné directement sur le second tome, « L’enfant des ténèbres » où l’on retrouve nos personnages à la veille de la seconde guerre.
L’héroïne s’est avérée finalement beaucoup plus complexe et profonde qu’à première vue, comme si justement elle ne pouvait se révéler que dans la durée ce qui se confirme dans le 2ème tome.
Ce roman à la fois politique, historique, psychologique, sentimental et d’espionnage nous fait revivre la naissance de notre époque dans cette atmosphère trouble de 1913 où plane, omniprésente l’ombre de cette guerre qui finira par venir, et nous entraîne dans toute l’Europe et dans toutes les couches sociales de cette époque, des bas-fonds à la haute bourgeoisie en passant par les milieux artistiques et scientifiques.
Cette diversité des lieux et milieux est aussi due à la multitude de personnages secondaires qui n’ont de cesse de se croiser, de se perdre et de se retrouver.
Parmi les personnages, on notera la prédominance des femmes, de Mathilde grande bourgeoise chef d’entreprise, à Dora artiste de cabaret lesbienne, à Sophie qui osera quitter son mari, notaire campagnard coureur de jupons, et la vie étriquée qu’il lui impose, toutes adeptes d’un féminisme qui ne dit pas encore son nom.
Quant au style, et bien oui, il n’est pas facile, on est loin, très loin du roman de gare, mais justement c’est bien écrit, c’est même très bien écrit et ça vaut le coup de s’accrocher car c’est sans aucun doute une œuvre littéraire.
Conclusion : A l’époque des SMS et des livres courts et vite lus à l’écriture nerveuse et parfois hachée, il fallait oser cette épopée de près de 1200 pages au style plus proche des écrivains de la fin 19éme ou début 20éme que de nos contemporains. Et bien même si le résultat est un livre exigeant, c’est un pari gagné et je recommande ce livre.
Infos pratiques : Poche Editions Babel – 2007 – 12,5 € ou Actes Sud – 2006 – 25 €