C’est en effet là que Franssou, (Isabelle Carré) jeune assistante d’anglais, qui vient d’hériter de 50000 euros décide de faire la cigale en les dépensant tout l’été plutôt que de faire la fourmi en les mettant sur un compte épargne. Evidemment dans le second cas, l’intrigue aurait tourné cours, ce qui aurait été bien dommage, et puis le compte épargne est plus utile que glamour. Franssou n’aurait alors pas non plus rencontré Stéphane (José Garcia), escroc baratineur qui vit au Carlton sans en avoir les moyens, juste le bagout de faire croire qu’il les a. On se fie aux apparences et il y interpelle, tutoie, apostrophe, comme s’il était chez lui jusqu’au jour où il entre dans la chambre de Franssou, par la même occasion il entre dans sa vie et n’en sortira pas de sitôt. Apparition fracassante et tonitruante de José Garcia qu’elle ne quittera guère plus que quelques secondes ensuite. Cet "escroc mais pas trop" comme dirait Woody a lui aussi bien tort de se fier aux apparences. L’arroseur va être arrosé, l’escroc escroqué… et ces deux-là vont bientôt s’entendre pour arnaquer un troisième, un coureur automobile qui cherche à acheter une maison en fonction du garage. La proie idéale.
Ce duo fonctionne comme ceux des meilleures comédies hollywoodiennes des années 40 et 50 auxquelles Christian Vincent rend hommage, également à Lubitsch avec Haute Pègre comme référence avouée. Hommage (furtif) également à Renoir et sa Règle du jeu avec l’évocation d’un certain La Chesnaye.
Le décor scintillant est ici aussi un personnage à part entière et contribue à cette délicieuse évasion. Le début laisse présager un humour délicieusement noir pour finalement nous entraîner dans une cavalcade effrénée et joyeusement amorale. Cette comédie est tellement pétillante, autant que les bulles de champagne que les héros passent leur temps à siroter, que son rythme nous fait oublier les lacunes scénaristiques (pourtant certaines). Le dénouement est certes prévisible mais l’important dans ce genre de comédie n’est pas vraiment ce qui arrive mais comment cela arrive. Ce film plein d’énergie la transmet au spectateur. Les acteurs prennent plaisir à jouer ou nous le font croire, ce qui est encore plus louable : Isabelle Carré si sombre dans la plupart de ses rôles, si lumineuse ici, fait penser à Julia Roberts dans Pretty Woman ou à Audrey Hepburn, et prouve une nouvelle fois l’étendue de sa palette qu’elle n’a certainement pas fini de nous montrer, tout comme José Garcia, hâbleur à souhait, ou encore François Cluzet, irrésistible de naïveté.
On murmure qu’une suite serait en préparation. Ne l’attendez pas pour arpenter avec délice les couloirs de ce Quatre étoiles. 8 euros et quelques centimes, ce n’est pas cher payé pour cette coupe de champagne euphorisante. La griserie est certes éphémère mais elle a le mérite de ne pas provoquer d’effets secondaires si ce n’est une soudaine bonne humeur. A regarder sans modération.
Sandra.M