- Editions 10/18 -
- Traduit du japonais par Corinne Atlan -
C'est avec ce titre, extrait du recueil L'éléphant s'évapore, que je découvre l'univers et la plume de Haruki Murakami.
Quelle découverte, quelle belle initiation.
Un texte dense, une réflexion humaine et littéraire d'une profondeur qui n'a rien d'onirique, l'irrationnel plutôt que l'irréel. Limpidité, dureté et froideur du cristal.
" Mon corps voulait dormir, ma conscience voulait rester éveillée. "
A travers cette insomnie improbable, la narratrice se perd dans un troublant voyage intérieur. Ce qu'elle vit comme un privilège - cette impression d'un état de conscience supérieur, de revenir à un moi véritable - la détache insensiblement de son quotidien, des sentiments qui en sont les fondations, elle devient étrangère à sa propre vie. Ce qu'elle croit être une élévation par sa perception affinée la métamorphose en ombre d'elle-même, hantant son présent, son passé, les souvenirs s'imposant en force sur le mode hallucinatoire de sensations exarcerbées et retrouvées. Une obsession plus qu'une errance ou un tourment.
" Ma conscience vivait une chose, quelque part, et mon corps une autre, ailleurs. "
Si le prélude à la mort n'était pas le sommeil ? Si la mort était ces " ténèbres éveillées " ? Et si le sommeil était bien le régulateur d'un moi enfoui, le protecteur de l'obscur des nuits ?
Alors, quel est cet " au-delà " sans sommeil ?
" J'avais peut-être été ensorcelée ... " se demande la narratrice. C'est moi qui l'ai été, hypnotisée par ce texte et ces images.
.
Cette édition poche est précieuse, un petit bonheur de papier glacé très agréable à lire aux pages claires et aérées dont les illustrations supportent parfaitement le format réduit. Je vais même écrire que je les apprécie plus ainsi, leur relief en grand format m'ayant paru agressif.
- Un merci pour ce joli cadeau à Virginie qui toujours m'accompagne ( pas seulement en librairie -) -
*