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Habemus Papam

Par Tedsifflera3fois

Nanni Moretti avait un sujet passionnant, il en a fait un film plutôt longuet. Certes c’est gentil (trop gentil même pour créer la polémique) mais c’est loin d’être incisif. Le réalisateur italien choisit la dérision et enferme ses personnages dans des comportements infantiles. Jusqu’à une dernière scène très réussie.

Synopsis : Après la mort du Pape, le Conclave se réunit afin d’élire son successeur. Mais le souverain élu ne semble pas prêt à supporter le poids d’une telle responsabilité…

Habemus Papam - critique
Habemus Papam a sans doute l’un des pitchs les plus originaux, amusants et intelligents de l’année. Et si à la mort d’un pape, son successeur, élu par le conclave, se trouvait écrasé par l’ampleur de sa tâche? Et s’il se sentait incapable d’assumer le rôle pour lequel il a été choisi?

Si le nouveau souverain pontife refusait de se présenter à ses fidèles, les quelques jours d’indécision qui s’ensuivraient laisseraient un milliard de catholiques orphelins, dans l’incompréhension d’un pape qui souhaite préserver son anonymat.

Mais ce n’est pas tant la détresse des croyants qui intéresse Nanni Moretti que celle du pape lui-même et de ses cardinaux. Le film déroule alors deux parties bien distinctes: d’un côté, il suit le pape et ses déambulations dans Rome tout autant que dans ses angoisses, de l’autre il raconte l’attente des cardinaux, enfermés dans les palais pontificaux du Vatican.

Ce qui amène Habemus Papam à alterner deux tons assez différents : le pape, en pleine remise en question existentielle, s’enfuit, se cherche sans se trouver, revient à sa première passion, le théâtre, s’essaie à l’anonymat pour pouvoir se mêler aux gens et vivre de nouveau dans la simplicité et la découverte des autres. Les cardinaux, inquiets, essaient de tuer le temps. Sous la férule d’un psychologue athée enfermé avec eux parce qu’il a été mis dans le secret (et interprété par Nanni Moretti lui-même), ils organisent un tournoi de volley-ball, avec comme objectif un peu idiot de redonner du courage au pape qu’ils croient enfermé dans sa chambre.

Ce qui gêne dans ce film, c’est d’abord ce temps à tuer qui n’est pas toujours bien utilisé. Les errements du pape deviennent vite répétitifs et son cheminement ne le mène à rien. Le personnage n’avance pas et se révèle très peu, les scènes dans lesquelles il promène son regard perdu de chien battu finissent par être vite lassantes. Du côté des cardinaux, ce n’est pas beaucoup plus intéressant : Nanni Moretti, sorte de Woody Allen au ralenti, se moque de la religion et de la psychanalyse et dresse des portraits de cardinaux assez sommaires puisqu’ils se retrouvent tous noyés dans une masse impersonnelle qui évoque plus les Schtroumpfs que des individus de chaire et de sang.

En voulant leur rendre leur humanité, le réalisateur italien les a surtout infantilisé : ces gamins gentils et irresponsables, qui ont déjà fait de l’élection une mascarade ridicule, forment un bloc qui s’oppose au pape qu’ils ont choisi comme dans le Maillon faible, autant pour se protéger eux-mêmes que pour se débarrasser de lui. Ce pape, sorti de la masse, devenu subitement seul, ressemble lui aussi à un enfant, timide, incapable de soutenir les ambitions que ses parents (ou ses cardinaux) ont placé en lui. Un enfant qui fugue et supplie qu’on le laisse tranquille.

Nanni Moretti se moque, certes gentiment, de tous ses personnages, ce qui l’empêche de traiter sérieusement son sujet : l’absence du nouveau pape pourrait avoir des conséquences énormes et passionnantes, mais le réalisateur passe à côté, trop occupé à sa farce. La critique du pouvoir devient elle aussi plutôt puérile.

Habemus Papam se relève dans la scène finale, sans doute l’une des plus intenses de l’année. Un frisson parcourt alors la salle. On dirait que le film devrait commencer là, ou alors que tout ce qui a précédé était une introduction pour cette séquence. Dommage que le reste du film soit loin d’avoir la même puissance.

Note : 4/10

Habemus Papam
Un film de Nanni Moretti avec Michel Piccoli, Nanni Moretti, Jerzy Stuhr et Renato Scarpa
Comédie dramatique – Italie, France – 1h42 – Sorti le 7 septembre 2011


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