Trente ans plus tard, un bataillon venu des colonies tenta de reprendre la planète aux envahisseurs, sans succès. En 2083, une seconde flotte est envoyée sur Terre : le lieutenant Stig Bernard, de l’armée de Mars, militaire dans l’âme, a pour seul but de bouter les extra-terrestres hors de cette planète-mère qu’il n’a jamais connue. Mais les choses tournent vite au vinaigre lors du premier contact : sa flotte décimée, sa fiancée tuée à bord d’un des vaisseaux martiens, Stig se retrouve seul, paumé sur un monde dont personne ne sait plus rien depuis que tout contact a été coupé plus d’une génération auparavant…
Sans autre but, il décide de se lancer dans une croisade personnelle contre les Inbits, jusqu’au Point Réflexe qui tient lieu de quartier général aux envahisseurs. En chemin, il croisera les routes de plusieurs personnes, d’autres soldats comme lui ou bien des descendants de civils survivants, dont certaines le rejoindront dans sa mission alors que beaucoup d’autres collaboreront avec les occupants venus d’ailleurs qui ne tolèrent aucune forme de résistance à leur autorité…
Il ne paraît pas très pertinent de mentionner l’influence de Mobile Suit Gundam (Yoshiyuki Tomino ; 1979) sur le monde de Genesis Climber Mospeada, ni même celle de The Super Dimension Fortres Macross (Noboru Ishiguro ; 1982) sur les divers designs qui l’illustrent, car ces deux productions ont su poser des marques indélébiles et ainsi influencer une grande partie des animes qui les ont suivies. On ne s’étonne donc pas du message écologique – faute d’un meilleur terme – qui a conservé toute sa pertinence plus de 25 ans après, ni du réalisme des véhicules et autres appareils, en plus de celui des décors, qui permettent aux spectateurs d’entrer facilement dans le récit. Car sous ces apparences, Mospeada, comme beaucoup d’autres productions nippones en matière d’animation, reste pour l’essentiel une histoire de rapports humains, de conflits d’intérêt où les jeunes apprennent la réalité des choses à la dure alors que les adultes ne s’étonnent plus de rien depuis longtemps, souvent jusqu’à avoir perdu leurs illusions – et il y a de quoi puisque ce monde rappelle bien sûr Mad Max (George Miller ; 1979) sous bien des aspects.
Côté musique, on apprécie que la bande originale sorte des sentiers battus car elle participe beaucoup à l’atmosphère du récit : bien que la J-Pop ne soit pas toujours facile d’accès, surtout à cette époque, on aura du mal à ne pas noter les sonorités blues, presque country, de certains morceaux qui donnent ainsi à l’ambiance un quelque chose des westerns spaghetti de Sergio Leone (1929-1989). Ces réminiscences de la culture occidentale ont permis l’inclusion de Mospeada dans Robotech (Robert V. Barron ; 1985) en rendant ainsi cette production célèbre dans le monde entier mais tout en en conservant la « substantifique moelle » au contraire des deux autres séries qui constituent le reste de cette saga américaine…
Si on ne peut pas dire que Mospeada soit un chef-d’œuvre, on peut néanmoins parler d’une réussite sur la plupart des plans et notamment les plus importants. Le premier d’entre eux concerne les personnages qui constituent l’aspect le plus intéressant de l’histoire : leurs interactions seront le prétexte de situations souvent rocambolesques, surtout au début de la série. Il faut dire que le cocktail est assez explosif. On y trouvera un soldat rendu limite fanatique par la mort de sa fiancée sous le feu ennemi, un second militaire survivant de la première flotte de libération de la Terre qui se cache par pure couardise, et un troisième qui se dissimule lui aussi mais sous les traits d’une chanteuse pop pour entretenir l’esprit de résistance chez les survivants. Si les deux premiers se montrent un peu banals, le dernier l’est moins et fut d’ailleurs l’objet de nombreuses controverses lors de la diffusion de la série en Amérique ; à noter que c’est encore ce personnage-là qui incarne le plus les cultures asiatiques à travers une certaine poésie dans le discours et une attitude plutôt zen en toutes circonstances ou presque.
Les trois autres et derniers actants ne manquent pas d’intérêt non plus car ils illustrent chacun à leur manière l’état d’esprit de ces humains qui ont grandi sous le joug des envahisseurs : ce sont des survivants et ils en portent les stigmates. On ne saura jamais si oui ou non Houquet fut violée par le gang des Serpents Rouges mais ça ne nous étonnerait pas ; de même, on comprend aisément que la jeune Mint n’a pas eu une enfance heureuse, pour des raisons évidentes, et la plupart de ses prétendants le réaliseront douloureusement ; quant à Ray on devine assez vite qu’il n’a pas grandi en apprenant à compter sur les autres… Enfin, Aisha apporte assez vite son lot de mystères et la narration amène le spectateur à s’interroger sur sa véritable nature sans pour autant tomber dans la métaphysique douteuse mais plutôt en entretenant une forme de suspense présenté avec adresse et qui jouera un rôle assez intéressant dans le dénouement…
Dans le plus pur style road movie, et ce n’est pas un hasard si le titre de la série comprend le nom du véhicule principal utilisé par nos héros pour atteindre le Point Réflexe, l’histoire amènera ce petit groupe à croiser de nombreux personnages, survivants comme eux, mais surtout des civils. Et si les premiers épisodes s’avèrent un peu répétitifs à force de montrer que le plus grand danger vient des humains, ils présentent au moins le mérite de proposer une bonne diversification des motifs derrière cette collaboration avec les envahisseurs. Certains de ces traîtres se montreront d’ailleurs assez dérangeants et demanderont une certaine maturité de la part du spectateur pour se voir appréciés à leur juste valeur. La plupart, quoi qu’il en soit, amèneront les protagonistes principaux à se reconsidérer – c’est-à-dire à évoluer…
D’ailleurs, l’évolution tient une place de premier plan dans cette histoire. Afin de permettre à son peuple de vivre en toute quiétude sur cette espèce de terre promise, l’entité maîtresse des Inbits mène des expériences pour adapter sa race à ce nouvel environnement. Le fruit de ses travaux la poussera à reconsidérer les tenants et les aboutissants de cette migration – puisqu’il n’a jamais été question d’invasion de son point de vue, juste de la survie de son peuple – car il s’avérera assez vite que la forme de vie la mieux adaptée à cette planète se trouve être celle de ses ennemis les plus virulents : ces humains qui lui tiennent tête depuis trop longtemps. Ainsi, ceux de ses enfants qui ont été adaptés ne tardent pas à développer une notion étrange pour l’essaim : le libre-arbitre. Le paradoxe, assez intéressant, amènera le spectateur à sa propre conclusion. À noter cependant que l’évolution n’est pas imposée aux Inbits par leur reine mais bel et bien accordée comme un honneur qu’on ne saurait, et qu’on ne voudrait, refuser…
Beaucoup moins simple qu’il n’y parait au premier abord sans toutefois être devenu un réel classique du genre, Genesis Climber Mospeada reste une production très honorable qui a su se démarquer des autres réalisations de l’époque par un ensemble de petits détails d’apparence plutôt anodine mais qui, une fois mis bout à bout, dépeignent un ensemble plus vaste que la somme de ses parties et au final tout à fait intéressant. Si vous êtes nostalgiques des 80s, ne le manquez sous aucun prétexte…
Notes :
Selon les créateurs de la série, le personnage de Ray serait en fait télépathe. Si cet aspect était bien plus présent dans les versions originales du scénario, il reste néanmoins palpable à travers notamment l’hallucination dont Ray est frappé à un moment, mais surtout à travers sa compréhension instinctive de la fonction du « puits de la genèse » où lui et Stig se retrouvent dans un épisode.
Genesis Climber Mospeada est la toute première production sur laquelle ont travaillé des mecha designers du célèbre studio Artmic qui créa par la suite, et entre autres, Megazone 23 (N. Ishiguro ; 1985), Gall Force – Eternal Story (Katsuhito Akiyama ; 1986) ou Bubblegum Crisis (plusieurs réalisateurs ; 1987-1991).
L’utilisation de rayures noires et blanches sur les Legios et les Mospeada est un clin d’œil aux forces alliées anglaises, américaines et canadiennes qui présentaient des motifs semblables lors du débarquement en Normandie pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Mospeada se prononce « mos-pi-da » et signifie Military Operation Soldier Protection Emergency Aviation Drive Auto. C’est le nom des motos transformables en armures de combat utilisées par la plupart des personnages de la série.
Genesis Climber Mospeada fut diffusé en occident pour la première fois en 1985 aux États-Unis sous la forme du dernier tiers de la série TV Robotech déjà évoquée dans le corps de cette chronique.
Cette série est le premier anime à présenter une chanson de thème dans le style jazz.
Genesis Climber Mospeada, Katsuhisa Yamada, 1983
ADV Films, 2003
25 épisodes, pas d’édition française à ce jour
Cette chronique fut à l’origine publiée sur le site Animeka