" Plus que jamais, le monde de la cuisine et de l’image ont besoin de se rencontrer. Difficile, en effet, aujourd’hui, quand on est cuisinier ou journaliste gastronomique, d’imaginer pouvoir communiquer sur son métier sans passer par un outil incomparable : la photo culinaire. Quels que soient les supports, l’image est au centre de tout : dans l’édition, sur les magazines, sur Internet, sur les blogs, la photo culinaire envahit notre quotidien. C’est pourquoi, l’Office de Tourisme a eu l’idée en 2008 de créer un événement mariant ces deux univers en organisant à Oloron Sainte-Marie la première édition du Concours International de L a Photo Culinaire. "
Travailler en binôme, je l'ai toujours espéré. Le chef Frédéric Coiffé m'a proposé il y a plusieurs mois de partir avec lui dans l'aventure du Concours international de la photo culinaire à Oloron Sainte-Marie. Je savais et il savait que je ne suis pas photographe culinaire, ni photographe de studio, ni une professionnelle de la retouche. Plusieurs mois nous séparaient du concours, sans plus réfléchir, j'étais partante. Quelques échanges de mails sur des idées, et un premier entrainement fin août (Voyage :: le goût du 4 étoiles). Extrêmement déçue de ne pas savoir magnifier son idée par cette lumière artificielle que je ne maitrise pas, j'ai lancé un appel au secours à un excellent photographe de studio Quentin Caffier. En lui expliquant l'image que je souhaitais réaliser et lui montrant les premiers essais, en deux minutes, l'installation était prête… c'est si simple le studio!! On apprend dans ces conditions comme il est utile d'observer, d'assister, et que finalement le studio c'est beaucoup de bidouilles. Rassurée, c'est le cœur presque léger que je suis partie à Bordeaux ce samedi 10 septembre, pour la seconde cession d'essais en vue du concours le lendemain midi à Oloron. Quelques heures auront suffit à nous déstabiliser, l'image nous ne pouvions plus la regarder. Est-ce une photo culinaire? Est-ce que les gens vont comprendre? Est-ce gourmand? Est-ce que la plaque va casser? Est-ce que la lumière est digne d'un photographe? Quoi, quoi quoi? et cette odeur de dorade que l'on traine derrière nous! Trop, s'en était trop. Seule et dernière ressource, l'appel à un ami! Par SMS, j'envoie l'image au chef Nicolas Castelet. Nous devions avoir l'avis de quelqu'un d'autre. Quelques remaniements, nous avons son feu vert! Ni une ni deux, nous avons remballé tout notre matos, c'est bon nous avions la photo… enfin.
"Côté cuisine sont pris en compte l’originalité de la recette, la mise en valeur des produits d’origine, le stylisme et la présentation du plat.
Côté photo sont jugés et appréciés la technique photographique proprement dite, comme la qualité de la lumière, la définition du grain, le jeu sur la profondeur du champ ou la précision du cadrage.
Mais aussi la valeur artistique de la photo à savoir l’originalité de la prise de vue, la créativité et la sensibilité du photographe. Les membres du jury évaluent la notion de « gourmandise » de la photo, chacun s’interroge pour savoir s’ils ont envie de manger le plat ou de refaire la recette !"
Dimanche 11 septembre, départ de Bordeaux. Oloron, 12H30, pour deux heures dans un boxe surchauffé pour refaire cette image. Je n'ai jamais autant transpiré durant ce week-end, je n'ai dans mes souvenirs jamais autant stressé pendant ces instants où l'on est observé, décortiqué, photographié, filmé. Je savais que je n'étais pas à ma place, je savais que je ne suis pas la photographe de studio, pas la photographe du culinaire. Ce que j'aime en vrai dans la vraie vie, c'est l'envers du décor, les coulisses, là où l'on est derrière, où personne ne vous calcule, observe, là où l'on est transparent. Le web m'a permis de sortir de l'anonymat avec cette surexposition volontaire de mon travail. Je n'ai aucun souci avec ça, ni avec ce que je publie, écris et compagnie. Là, dans ce genre de configuration, ce n'est pas ce que l'on te demande. On te demande de montrer physiquement ce que tu sais faire, ce que tu sais dire, ce que tu maîtrise. Après l'heure de préparation, on a shooté l'image en trois clic-clac. Aucune retouche était envisageable, c'était l'une de mes conditions : aucune montage, aucune triche, aucune retouche, que du brut de décoffrage! J'ai donné fébrilement la clé USB avec l'image au responsable du concours, remballé tout le matos en 2 minutes, c'est fait, on l'a fait, c'est terminé. Et dans la salle le cortège de photographes et chefs suréquipés… fuir! Ma part du contrat est achevé… le chef quant à lui se prépare pour son SHOW CULINAIRE devant 500 personnes. Et là le bonheur de me retrouver derrière l'appareil, en coulisse à photographier le stress qui monte, la préparation, la concentration… des autres! Il assure sans bégayer, sans sourciller, en vrai pro, j'admire.
Epuisés, le soir de cette première journée s'achève à un Cocktail dînatoire au château Lamothe à Moumour. Simone n'a pas été bonne, elle nous a fait faire quelques détours vers des champs de haricots maïs, des droites qui n'étaient que des gauches, des châteaux d'eaux en bas puis tout droit. Ainsi rassemblés, quelque 200 personnes de la profession goûtaient au Jurançon, au fromage d’Estive, au cochon purée, fuir.
Lundi 12 septembre, Maximin a 6 ans, je ne suis pas là, maman se prépare à aller faire du rafting avec ses nouveaux amis. Angoisse dans le bus, je ne me sens pas bien, une nouvelle fois : je ne sais pas nager et je m'embarque dans une aventure liquide. La combinaison si près du corps, le casque si esthétiquement enfoncé, nous sommes une vingtaine, chefs et photographes à braver le ridicule, au moins nous sommes tous logés à la même enseigne! De belles rencontres avec des femmes photographes, normal nous n'étions que 4 sur les 17 photographes, la concurrence semble moins rude. A nous les gaves d'Aspe, d'Ossau, et d'Oloron. Plus de 20kms de rafting, une pose barbecue hors du temps, un saut périlleux de 3m parce que l'on flotte comme des bouchons, une eau si fraiche que j'en ai encore des spasmes. Mais quel bonheur, oui, maman a fait joujou comme une ado… enfin! Ok, on se fait beau… et l'heure du gong a sonné : Soirée de remise des prix. J'emmène le chef au fin fond de la salle, que neni nous sommes très vite rattrapés, il nous faut être devant : "Il va y avoir quelques arrêts sur image, il faudra parler de votre image". Oh non, tout mais pas ça, je me décompose littéralement, jamais ressenti cela encore.Que je vous plante le décor : Et ce monde là partout, autour de nous, derrière, là-bas, et cet écran géant digne des plus belles salles de cinéma parisennes, ces caméramans, ces photographes. Frédéric doit me sauver la mise ou sinon je pars aux toilettes pendant toute la cérémonie. Il le fera me dit-il! Philippe Boé, Journaliste Gastronomique à VSD présente la cérémonie, tandis que le jury mené par Michel Troisgros défile sur scène. C'est tout sauf bon enfant, je suis pétrifiée, j'annonce au chef que je ne dois pas parler. Le défilement des images du concours commencent, un premier duo s'exprime sur leur image, aucune faiblesse ne transparait, faut dire l'image est sublime. Second arrêt sur image. Depuis le début de la cérémonie, je filmais ce qu'il se passait sur scène. Notre image remplit l'écran. Comment dire, au fin fond du ventre? La caméra se dirige vers nous, nous sommes sur l'écran géant. Je ne sais comment je m'y suis pris, mais je n'ai pas lâché le caméscope, il me cachait, seule la tignasse dépassait, tétanisée, je n'ai pas réussi à baisser la caméra, l'école des fans en direct live. C'est ainsi que le chef a assuré pour deux, Alex ne se sentant pas bien, et a expliqué notre démarche, cette dorade qu'il est allé pêcher, ce pavé mosaïque, la vie, la mort, la mort, la vie, un gros délire. Fini stop on arrête tout, je vais exploser… et pourquoi ne suis pas allée me réfugier dans les toilettes fumer mes clops, hein, pourquoi?
Parce que je n'ai pas pu, quand je me suis vu à l'écran, quand j'ai vu les photographes, les chefs, quand j'entends la salle… le trac, le trou noir. Il semblerait que beaucoup aurait aimé parler de leur image. Je ne veux pas parler, c'est impossible. Ne nous voilons pas la face, évidemment que je souhaite que mon travail soit connu voire reconnu, mais pitié pas de micro, pas de caméra… Le chef me fusille du regard… je crois que j'ai merdé sur ce coup là.
TROPHEE PUR BEURRE "Rôtissot de lotte mariné et rôti au beurre demi-sel, raviole transparente, beurre de betterave"
Yannick DELPECH et David NAKACHE
Concours International de La Photo Culinaire
PHOTO GAGNANTE "Feuille à feuille bœuf foie gras et truffes noires"
Olivier NASTI et Laurent SEMINEL
La soirée fut suivie d’un banquet… et d'un retour le lendemain à Paris. Point.
Il y a donc, des choses comme ça parfois dans la vie, qui nous font mettre les pieds dans des endroits improbables… enfin pas tant que ça finalement… il fallait y être, point.
J'en profite pour remercier surtout et encore le chef Frédéric Coiffé, pour tout ce qu'il a réussi à me faire dépasser… l'initiative et l'énergie de Marie Cabazan et de toute son équipe de bénévoles, le Chef Nicolas Castelet pour son oreille attentive, le photographe Quentin Caffier pour sa joie de transmettre, mes parents pour les sms de mon horoscope quand il était bon!, les enfants, la famille, tout tout tout. Et puis aussi mes amis, Vivi la Blonde, Lala Pardessus, Herdji, Nath, Leslie, pour leur soutien indéfectible. C'était important, et ça l'est encore∞ d'où ces remerciements!!!!!
Je reviendrais certainement très bientôt avec la vidéo…