Toutes celles et tous ceux qui s'intéressent à la question environnementale et qui auront assisté au débat, sur France 2, entre candidats socialistes à l'investiture de leur parti pour la présidentielle, auront sans doute remarqué la présence nouvelle de l'écologie dans les discours de la plupart d'entre eux. Petit essai d'analyse de science politique.
Ségolène Royal promettant la "révolution écologique" et une "mutation énergétique", François Hollande se justifiant longuement sur son souhait de réduire la part du nucléaire dans notre consommation d'électricité, Martine Aubry s'engageant pour une "mutation verte de la croissance" : une chose est sûre, les candidats "poids lourds" ont pris grand soin d'avoir recours à des éléments de langage écologistes pour convaincre de leur capacité à comprendre cet enjeu clé.
Certes, que l'on soit de droite ou de gauche ou favorable à tel ou tel candidat, il sera toujours possible de douter de la sincérité ou de regretter l'absence de précisions des auteurs de ces propos. Il sera également possible d'être surpris que ces prétendants à l'élection "suprème" restent si attachés à un hypothétique retour de la croissance pour relancer l'économie, dans un contexte de crise à long terme qui impose plutôt de concevoir notre avenir avec une croissance faible ou nulle pendant encore quelques temps.
Reste que l'émergence de l'écologie dans les discours des principaux responsables du principal parti de l'opposition est un fait "remarquable", au sens où cela est de nature à modifier la tonalité de la campagne présidentielle. Reste que l'écologie aura mobilisé un temps de parole important. A lui seul le nucléaire aura suscité de longs développements de la part de chacun avec, pour certains, des propositions manifestement préparées.
Le nucléaire : j'ai été frappé par le temps de parole consacré à cette seule question, laquelle aura occupé beaucoup de place dans cette émission. Plus encore, le débat sur le nucléaire aura été le seul moment où les candidats, à commencer par Martine Aubry et François Hollande, auront réellement pu débattre entre eux.
Jusqu'à présent, l'écologie était assez pour ne pas dire totalement absente du débat politique. En contrepoint, l'emploi des éléments de langage verts des candidats socialistes démontre que cette question est encore conçue comme clé, tant pour des raisons de stratégie, d'alliances mais aussi, sans doute, parce que cela peut intéresser des électeurs/trices et les convaincre au moment de rentrer dans l'isoloir.Je fais partie de ceux qui sont convaincus que la politique a ses cycles et qu'un nouveau cycle de présence de l'écologie dans le débat public s'ouvre à présent. Le débat entre candidats PS en est un signe, pas le seul bien sûr. Un premier cycle "vert" s'était ouvert avec le Pacte écologique de Nicolas Hulot, poursuivi avec le Grenelle de l'environnement et refermé à Copenhague. Depuis lors, l'écologie avait cédé la place à la crise et apparaissait de nouveau comme une contrainte de luxe et non comme une opportunité économique.
La mobilisation contre l'exploitation des gaz de shiste et l'accident nucléaire survenu à la centrale de Fukushima puis de Marcoule ont certainement constitué le prémice d'un changement de cycle. Le discours des candidats socialistes va - peut-être - avoir pour effet de rebattre quelques cartes. Cela peut amener les autres partis, dont celui de la majorité et ceux du centre à réinvestir la question de l'écologie, à avancer leurs propositions. Cela peut également modifier la relation du parti socialiste avec Europe Ecologie Les Verts, le premier pouvant être désormais tenté de ne plus déléguer la question au second.
A la question de savoir si l'écologie sera un sujet important ou trés important de la campagne présidentielle de 2012, il est permis de répondre par l'affirmative.