Économie verte : pourquoi il est urgent d'investir dans le secteur de l'eau

Publié le 14 septembre 2011 par Bioaddict @bioaddict
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Investir 0,16 % du PIB mondial dans le secteur de l'eau permettrait de limiter la pénurie d'eau et de réduire de moitié, en moins de quatre ans, le nombre de personnes privées d'un accès durable à l'eau potable et à un réseau d'assainissement élémentaire, selon cette étude.

Actuellement, l'insuffisance des investissements dans les services d'approvisionnement en eau et le manque d'efficacité de la collecte et du traitement des eaux usées et de leur réutilisation exacerbe la pénurie dans de nombreuses régions du monde et contribue à une situation où la demande mondiale en eau pourrait dépasser l'offre d'ici 20 ans.

Dans le chapitre sur l'eau de ce rapport remarqué sur l'économie verte, publié lors de la Semaine mondiale de l'eau à Stockholm, le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) a ainsi montré que l'investissement dans l'assainissement et l'eau potable, le renforcement des systèmes locaux d'approvisionnement en eau, la préservation des écosystèmes essentiels à l'approvisionnement et l'élaboration de politiques plus performantes permettaient d'éviter les coûts sociaux et économiques élevés résultant d'un approvisionnement en eau inapproprié.

Ainsi, les problèmes liés à une mauvaise hygiène, tels que les maladies d'origine hydrique, coûtent au Cambodge, à l'Indonésie, aux Philippines et au Vietnam, près de 9 milliards de dollars par an, soit 2 % de leur PIB combiné.

" Améliorer l'accès à une eau potable de meilleure qualité et aux services d'assainissement est la pierre angulaire d'une société plus durable, où les ressources sont utilisées de façon plus rationnelle ", a déclaré Achim Steiner, Secrétaire général adjoint des Nations unies et Directeur exécutif du PNUE.

" Le rapport sur l'économie verte montre combien l'accroissement de l'investissement dans les écosystèmes liés à l'eau, les infrastructures hydriques et la gestion de l'eau, couplé à une politique efficace, peut renforcer la sécurité des ressources en eau et la sécurité alimentaire, améliorer la santé et promouvoir la croissance économique ", a ajouté M. Steiner.

Si l'on n'améliore pas l'efficacité de l'utilisation de l'eau, la demande en eau devrait dépasser l'offre de près de 40 % en 2030.

Le rapport sur l'économie verte indique ainsi qu'il faudrait améliorer la productivité de l'eau et augmenter l'offre (de nouveaux barrages et usines de dessalement ainsi que davantage de recyclage) pour réduire d'environ 40 % ce déficit en eau, mais que les 60 % restants devront être obtenus par des investissements dans l'infrastructure, par des réformes de la politique de l'eau et par le développement de nouvelles technologies.

" Si cet investissement et ces réformes politiques n'ont pas lieu, l'approvisionnement en eau traversera des crises de plus en plus fréquentes ", a déclaré le Professeur Mike Young de l'Université d'Adélaïde, principal auteur du chapitre sur l'eau du rapport précité.

Il est également indispensable d'utiliser l'eau de façon plus efficace et plus durable si l'on veut répondre à la demande mondiale croissante en énergie. Avec le développement et l'accroissement démographique des pays, la demande industrielle en eau risque d'augmenter. En Chine par exemple, plus de la moitié de l'augmentation de la demande en eau devrait être due, au cours des 25 prochaines années, à l'expansion importante du secteur industriel.

Selon le scénario d'investissement vert décrit dans le rapport sur l'économie verte, la consommation mondiale d'eau pourrait être maintenue dans des limites durables et l'objectif du Millénaire pour le développement visant à réduire de moitié le pourcentage de la population n'ayant pas un accès durable à l'eau potable et à des services d'assainissement de base, pourrait être atteint d'ici 2015.

Avec un investissement annuel de 198 milliards de dollars, soit 0,16% du PIB mondial d'ici 2030, l'eau pourrait être utilisée de façon plus rationnelle, permettant une production agricole, industrielle et de biocarburants plus importante et plus durable. Par rapport au maintien du statu quo, ce scénario permettrait de réduire de 4 % le nombre de personnes vivant dans des régions soumises au stress hydrique et de réduire ce même nombre de 7 % à l'horizon 2050.

Le rapport souligne plusieurs cas concrets où des investissements verts dans le domaine de l'eau ont permis d'obtenir des avantages économiques et environnementaux.

Par exemple, dans le cadre de son plan quinquennal pour une croissance verte, la Corée du Sud a annoncé un investissement de 17,3 milliards de dollars dans le projet de restauration de ses quatre principaux fleuves en 2009. Les cinq objectifs clés du projet sont de sécuriser les ressources en eau afin d'éviter les pénuries, de mettre en oeuvre des mesures de maîtrise des crues, d'améliorer la qualité de l'eau tout en restaurant les écosystèmes des bassins fluviaux et de développer les régions locales ainsi que l'espace culturel et de loisirs autour des grands fleuves. Globalement, on estime que ce projet de restauration de la santé des fleuves créera 340 000 emplois et génèrera 31,1 milliards de dollars de retombées économiques.

Une filière bioénergie bien planifiée est un élément clé de l'économie verte

L'utilisation de l'eau pour la production de bioénergie fait l'objet d'un autre rapport, également publié à l'occasion de la Semaine mondiale de l'eau : Les liens entre la bioénergie et l'eau, élaboré conjointement par le PNUE, l'Oeko-Institut et la " Task 43 " de l'Agence internationale de l'énergie.

Les sources d'énergie renouvelables et durables sont un élément essentiel de la transition vers une économie verte à faibles émissions de carbone et où les ressources sont utilisées de façon rationnelle. Toutes les formes d'énergie ont un impact plus ou moins important sur les ressources en eau, et la relation entre l'eau et les bioénergies (énergies renouvelables issues de matières organiques comme le bois, la biomasse ou les sous-produits agricoles) est particulièrement complexe.

Ce rapport constate que la demande en eau des bioénergies est en grande partie liée à la culture et à la transformation des matières premières agricoles qui à leur tour présentent des implications importantes en matière d'agriculture durable, d'utilisation des sols et de production alimentaire.

Dans un monde où plus de 70 % de l'eau douce est utilisée pour l'agriculture, le rapport souligne que le développement des bioénergies doit être soigneusement planifié pour ne pas aggraver les pressions existantes. Cette planification doit tenir compte de l'augmentation des besoins en matières premières et de la concurrence entre ces mêmes matières premières pour des utilisations telles que l'alimentation, le fourrage et les fibres tandis que la population mondiale devrait atteindre neuf milliards d'individus d'ici le milieu du siècle. Dans certains cas, ces considérations peuvent être des arguments contre le développement des bioénergies.

Toutefois, le rapport décrit les circonstances dans lesquelles un développement bien planifié des bioénergies peut améliorer les pratiques agricoles, y compris promouvoir un usage efficace de l'eau et une utilisation durable des engrais, voire améliorer l'accès à l'eau, grâce au pompage et au traitement de l'eau alimentés par la bioénergie et renforcer la sécurité alimentaire dans le cas de systèmes combinés de production d'aliments et de bioénergie.

Les recommandations du rapport du PNUE sont les suivantes :

  • Adopter une approche holistique et une perspective à long terme - Tenir compte du contexte afin d'identifier les meilleurs usages pour l'eau disponible. Il n'existe pas de solution unique. Appliquer une approche basée sur le cycle de vie, considérer les interrelations avec les autres besoins en ressources et prendre en compte l'ensemble du bassin versant.
  • Baser les décisions sur les évaluations d'impact afin de garantir une gestion durable de l'eau - Analyser les systèmes bioénergétiques d'un point de vue socio-écologique global. Promouvoir une utilisation durable des sols et de l'eau.
  • Concevoir et mettre en oeuvre des instruments politiques efficaces dans le domaine de l'eau - Ceux-ci doivent couvrir la production de matières premières et la transformation énergétique et surveiller la concurrence entre les différents usages de l'eau.
  • Promouvoir le développement technologique - Les nouvelles technologies peuvent contribuer à réduire la pression sur les ressources en eau mais une vérification poussée s'impose avant leur utilisation généralisée.
  • Poursuivre les recherches, combler le manque de données et développer des instruments à l'échelle régionale - Soutenir la coopération internationale en matière de recherche sur l'impact des bioénergies sur les ressources en eau ; traiter les nouvelles questions encore largement inexplorées telles que le potentiel et les risques des microalgues dans les zones côtières, des microalgues cultivées sur terre et des organismes génétiquement modifiés ; mettre en place un suivi régulier pour combler l'insuffisance de données et vérifier le respect des réglementations et de la production durable ; l'évaluation de l'impact du cycle de vie et l'empreinte hydrique ne sont pertinentes que s'il existe des outils régionaux permettant d'évaluer les impacts localisés.

Pour plus d'informations, le rapport sur l'économie verte (dont le chapitre sur l'eau) ainsi que d'autres documents sur le même thème peuvent être téléchargés à l'adresse : www.unep.org/greeneconomy

Le rapport "Les liens entre la bioénergie et l'eau" peut être téléchargé à l'adresse : www.unep.fr/energy/bioenergy