La Banque Nationale Suisse renonce à la rigueur

Publié le 14 septembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Les lobbies industriels se sentaient menacés par le franc fort : la BNS les rassure.

Une brève publiée en collaboration avec l’ALEPS(*)

Le Franc Suisse a été géré depuis des décennies avec une (relative) rigueur. C’est ce qui lui a valu de s’apprécier de près de 50 % en dix ans, et depuis l’an dernier sa valeur a encore augmenté de 11% ou plus contre l’euro ou 15 % contre le dollar américain.

Revers de la médaille : les factures présentées par les exportateurs suisses sont plus lourdes pour les clients. Certaines entreprises suisses (notamment dans la mécanique de précision) ont perdu en compétitivité, et craignent de voir leurs marchés extérieurs se dérober.

C’est une vielle lune qui veut que les pays à monnaie forte soient pénalisés dans la concurrence mondiale, et qu’à l’inverse une bonne dévaluation pouvait être « compétitive ». On nous a servi le refrain avec l’euro fort, ce qui n’a pas empêché les Allemands d’être les deuxièmes exportateurs du monde –derrière la Chine.

Comme l’a rappelé avec talent Victoria Curzon-Price, Professeur à l’Université de Genève, dans un article paru dans le journal financier Agefi de Genève, et sur le site de l’IREF (dont elle est administrateur) www.irefeurope.org, les pays à monnaie forte sont d’autant plus performants que leur position les oblige en permanence à innover, à s’adapter, pour garder leurs parts de marché. Une monnaie forte est un stimulant pour les entreprises, mises dans l’obligation de faire encore mieux, tandis que d’autres entreprises dans les pays à monnaie faible se croient mieux protégées et en oublient tout effort d’adaptation. En conclusion de cet article, Victoria Curzon-Price, qui entendait les cris des groupes industriels helvétiques, recommandait à la Banque Nationale de Suisse de surtout ne rien faire qui puisse affaiblir le Franc.

Or, mardi, la BNS s’est déclarée prête à combattre la « spéculation contre le Franc suisse », et a fixé une parité plancher franc/euro à 1,20 franc pour 1 euro. Elle est donc prête à racheter toute devise étrangère et pour ce faire à émettre autant de franc suisse qu’il faudra pour dévaloriser sa propre monnaie. Tout se passe comme s’il y avait le feu au lac…

Lire aussi : Et la Suisse adopta l’Euro.

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(*) L’ALEPSprésidée par le Professeur Jacques Garello, est l’Association pour la Liberté Économique et le progrès social, fondée il y a quarante ans, sous l’autorité de Jacques Rueff, dans la tradition intellectuelle française de Jean Baptiste Say et Frédéric Bastiat.