Cet Étrange Festival cru 2011 aura tout de même apporté son lot de films enthousiasmants (Super, Revenge : a love story), forts (Kill List, Redline) et intrigants (Confessions), assez pour estimer qu’une fois de plus, le rendez-vous parisien de la rentrée s’est montré indispensable. Et ce même si les deux derniers films que j’aurai vu dans la grande salle 500 du Forum auront été loin de m’électriser.
J’attendais le premier de pied ferme, Cold Fish, car les films de son réalisateur Sono Sion ont une fâcheuse tendance à ne jamais sortir en salles en France. Et voici que L’Étrange Festival avait l’audace de passer deux films de Sono Sion, celui-ci et Guilty of Romance, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs cannoise en mai dernier. Mon emploi du temps m’a poussé vers Cold Fish quand j’aurais aimé poser mes yeux sur les deux… du moins avant de voir le film. Après coup, j’ai franchement regretté d’avoir vu celui-ci plutôt que l’autre, mais encore une fois, les regrets de ce type sont futiles.
Il y a quelque chose de trop prévisible dans ce portrait d’un japonais moyen, père de famille effacé qui se laisse constamment marcher sur les pieds sans réagir. Il est trop facile de reconnaître en lui une bombe à retardement qui va accumuler les coups au long du film pour mieux exploser dans un bain de sang. Cela se produit comme imaginé. Heureusement, le ton confère à la comédie, à raison, parodiant les relations humaines dans la société japonaise, où le respect de façade cache l’arrivisme ou le mal être. Sans ce caractère grotesque assumé, le film serait bien trop facile, ou plutôt encore plus facile et risquerait le ridicule comme il s’y perd dans cette séquence finale entre sang et morts qui est un joli n’importe quoi scénaristique, et pousse l’hystérie générale jusqu’à son paroxysme.
Dans The Divide, il n’y aura pas eu les belles plastiques de Megumi Kagurazaka et Asuka Kurosawa, allègrement filmées par Sono Sion, pour distraire d’un sentiment mitigé. Le film de Xavier Gens avait fait l’ouverture, dix jours plus tôt, et le réalisateur français était là dimanche, en ce dernier jour de festival, pour nous présenter le film. Et en guise d’introduction, il nous raconta une anecdote des plus jubilatoires à propos de la production du film.
L’anecdote est savoureuse à entendre, certainement plus que le film ne l’est à être regardé. Il ne s’agit pas là d’un mauvais film, seulement d’un film passant derrière d’autres, plus illustres, plus ambitieux, plus réussis, sur des prémices similaires. Dans The Divide, New York est prise sous les feux de bombes (sûrement nucléaires) instaurant la panique dès les premières secondes du film. Les habitants d’un immeuble se réfugient dans le sous-sol où vit leur gardien. Tapis sous terre en attendant d’éventuels secours, les relations au sein du groupe, une dizaine de personnes, va peu à peu se détériorer à mesure qu’il devient clair que ce qui viendra de dehors ne sera probablement pas leur salut.
Les personnages étant trop chichement écrits – la plupart avec un passé vierge à notre connaissance et un caractère assez caricatural, The Divide échoue à nous faire ressentir la moindre empathie à leur égard. Le cadre de cette situation quasi apocalyptique est lui trop succinctement posé et entretenu pour offrir une dimension politique ou sociale qui aurait été la bienvenue, d’autant que le caractère totalement flou de la situation rend le film plus frustrant que de raison. Nous ne saurons rien ou presque de ce qui s’est passé, de ce qui se passe, ou de ce qui se passera à l’extérieur de ce sous-sol en forme de refuge désespéré. Ce qui aurait été une qualité si Gens s’était astreint à de petites touches pour donner plus de détails à son cadre scénaristique, plutôt que ce quasi néant.
On trouve tout de même un personnage plus réussi que les autres, celui campé par l’acteur de Heroes Milo Ventimiglia, le seul montrant une réelle transformation au fil des épreuves traversées, le seul évoluant sous la pression de la situation, quand les autres restent uniformes tout le long du récit. Je quitte le Forum des images et l’Étrange Festival sur cette note tiède, avec quelques plus chauds souvenirs heureusement. Et en sachant que je serai de toute façon fidèle au rendez-vous en 2012.