(Suite, à lire de préférence dans l'ordre des chapitres, voir plus bas)
Un défi majeur avait été lancé aux physiciens de la fin du XIX siècle qui consistait à donner corps et propriétés à un être physique difficilement décelable : l'éther. L'expérience négative de Michelson et Morley devait mettre fin au dilemme puisqu'il fut impossible de montrer l'influence d'un quelconque vent d'éther. Ce faisant, on avait bâti cette expérience sur une préconception de l'éther et retenu sa simple propriété de ténuité. L'hypothèse d'une densité quelconque avait été rejetée et les ondes lumineuses ont été constituées en objets sui generis indépendants de l'éther, qu'ils traversent simplement.
Dans l’expérience de Michelson et Morlay, on supposait que l’éther extrêmement fluide devait se comporter comme un gaz constituant une matière homogène emplissant tout l’espace. Les ondes EM et la lumière devaient s'y propager et sa réalité être prouvée par un effet de freinage sur les corpuscules. Cet effet n’ayant pas été constaté, on a conclu à l’inexistence de l’éther. C'est sur cette disparition de l'éther que s'est construit la relativité. Il ne restait plus que l'espace comme contenant vide de tout contenu. Or, on ne cesse de prêter des propriétés à ce vide quantique et nous nous trouvons dans une situation paradoxale où un inexistant " existe" par ses effets sans se voir attribuer un quelconque statut de réalité
Avec la disparition de l'éther, cette représentation d'ondes électromagnétiques sans substratum d'aucune sorte a subsisté et a été formalisée dans la théorie des champs électromagnétiques. Einstein, en fondant la relativité, n'a fait que prendre acte de cette disparition de l'éther en préservant simplement de l'espace son cadre nécessaire au positionnement et au déplacement des corps et des champs.
Il nous faut donc revenir à une physique pré-einstenienne en interrogeant en aval même de l'expérience de Michelson et Morley qui avait posé l'éther comme une substance fluide sans traiter au fond la contradiction fluidité/densité.
En toute logique, la raison nous enseigne que s'il se trouvait une substance quelconque remplissant l'espace, celle-ci ne pourrait être qu'assez radicalement différente de la matière. S'il fut toujours jugé que la grande célérité des ondes électromagnétiques supposait un milieu hautement dense incompatible avec la fluidité d'une substance n'offrant apparemment aucune résistance aux petites vitesses, c'est qu'il fut pris pour référence la densité et la structure discontinue de la matière.
S'il en était autrement, cette substance aurait été depuis longtemps identifiée. On ne saurait dès lors prêter à cette substance tous les attributs qui sont ceux de la matière. On pourrait même inverser la perspective et se demander s'il n'est pas tout aussi autorisé de déduire certaines particularités de la matière de celles présupposées de la substance de l'espace. Il nous semble en effet tout à fait pertinent de décider de l'ordre des déductions. Rien n'indique que la matière soit première et que tous les autres objets physiques doivent avoir des propriétés qui en découlent.
Nous pourrions ainsi attribuer à la substance de l'espace des propriétés que nous refusons à la matière comme celle par exemple d'être contradictoirement fluide et dense. Mais par définition, il ne pourra s'agir d'une densité comparable à celle de la matière car il faut bien que la substance de l'espace s'en distingue par un côté ou un autre. Nous pourrions nous référer à une densité première pour envisager ensuite les rapports qu'elle entretient avec celle de la matière ou densité dérivée. La physique quantique qui définit le vide comme un état de plus basse énergie ne trouverait rien à redire si nous accordions un substratum à cette énergie : à la densité première de cette substance correspondrait en effet l'état de plus basse énergie.
Mais qu'est-ce qui pourrait expliquer cette densité première qui serait celle de l'espace ? Il faut se souvenir qu'une densité est un rapport entre une quantité de matière et un volume. Ce rapport suppose qu'il soit possible de contracter plus ou moins les molécules et atomes qui vont occuper un volume déterminé. Cela implique une distance moyenne entre les éléments. La célérité de la propagation d'une vibration va dépendre de cette densité c’est-à-dire de la distance séparant ces éléments. Plus ceux-ci seront proches et moins la distance parcourue par un élément pour heurter le suivant sera grande, plus vite la vibration se propagera. Dans les solides comme dans les liquides, la vitesse est fonction de la densité du milieu de propagation. C'est ce raisonnement qui a été appliqué à l'éther et on a conclut qu'il faudrait que celui-ci ait une densité inouïe pour pouvoir propager des ondes E.M à la vitesse fantastique de 299792 km/s. On se contenta de plaquer les propriétés de la matière pour interdire à l'éther un quelconque pouvoir mécanique de transmission des ondes.
Cette argumentation supposait qu'il soit possible de distinguer des éléments constitutifs de l'espace, qu'il existe une possibilité de séparer, d'individualiser ceux-ci pour appliquer le concept de densité qui implique un rapport entre un volume et des corps distincts. Or, il n'y a pas d'espace entre l'espace et ce rapport de densité revenait en fait à rapporter le volume de l'espace sur lui-même puisque nous avons affaire à une substance totalement homogène qui ne se donne pas comme discontinue. La mathématique de la densité ne peut donc s'y appliquer car nous nous trouvons devant une propriété tout à fait distincte de celle de la matière : l'absolue continuité de cette substance.
Ceci entraîne d'importances conséquences comme l'impossibilité d'instaurer un vide entre deux morceaux d'espace, d'insérer un espace entre deux espaces, l'interdiction de pouvoir en prélever un échantillon pour le mesurer et nous en servir d'étalon. L'espace possède cette particularité qui le singularise : d'être une substance totalement homogène et insécable. La matière seule détient les attributs de la discontinuité. Il est donc absolument impossible de détecter un quelconque « vent d’espace » comme on le croyait avec les expériences de Michelson et Morley. On ne peut découper un morceau d’espace pour l’analyser et prouver sa réalité. Cette impossibilité à apporter une preuve expérimentale directe, explique pourquoi la « substance » de l’espace, bien que supposée, a toujours fait l’objet de beaucoup de scepticisme
S'il s'agit d'une substance absolument dense telle que n'existe aucun espace entre ses éléments, la vibration initiale ne doit parcourir aucune distance pour ébranler le milieu. Elle peut donc se propager à une vitesse dont la valeur n'a plus rien à voir avec celles que nous connaissons pour les ébranlements dans les milieux matériels discontinus. Ainsi, seules les propriétés de continuité de l'espace pourraient autoriser une vitesse comme celle de la lumière.
.(A SUIVRE)