Une histoire à tiroirs, qui ne sont que des prétextes, mais surtout un graphisme inimitable. Corto Maltese est vraiment un héros déconcertant. Pas vraiment à côté de ses pompes, mais pas tout à fait d’équerre non plus. Mais beau et calme, et surtout très malin.
Dans cet épisode, paru en Italie en 1980, Corto part à la recherche d’un manuscrit devant lui permettre de retrouver le trésor de Cyrus volé par Alexandre le Grand et caché quelque part dans les environs immédiats de la Maison dorée de Samarkand, qui n’est autre qu’une abominable prison. Une intrigue des plus classiques. Mais rien n’est simple : nous sommes en 1922 et se rendre de Rhodes, où débute la quête, jusqu’aux frontières de l’Afghanistan et de la Bactriane n’est pas simple. C’est encore la guerre entre Russes, Turcs, Khurdes, Arméniens, Bolcheviks, et chez les Turcs, on suit le destin d’Enver pacha, général qui fut l’ami de Mustapha Kemal puis le trahit, avec pour objectif la création d’une entité pan-turque, de l’Anatolie à la Chine.
Rêves éveillés, délire de narghilés, combats de soudards, crépitement des mitraillettes, uniformes rutilants maculés de boue, tronches de soldatesque aux yeux injectés de sang, neige au mois d’août… Les contrastes et l’utilisation du noir par grands à-plats est démoniaque. Chaque case est en soi un tableau plein de fureur. Cette édition donne aussi quelques hors-textes et aquarelles très belles, d’un trait rageur et précis, une œuvre en soi.
Je n’ai pas lu d’autres aventures de Corto Maltese, mais j’y songe ….
La maison dorée de Samarkand, 26° aventure de Corto Maltese par Hugo Pratt, aux éditions Casterman, 199 p. (1992) en couleurs, 58 pages de présentation et de hors textes.