Les mouettes

Il n'y a pas plus tard qu'une heure Haricot et moi étions au parc de Ploudalmézeau (fabuleux au printemps). Nous étions passés à la boulangerie pour acheter un pain, et forcément, Haricot, petit morphalou, avait prélevé sa dîme.

Le quignon de pain à la main, il observait le lac; à ses côtés, je tremblais dans mes bottes.

En face sur l'eau, les canards, et surtout les mouettes. Des dizaines et des dizaines de mouettes qui plutôt que pêcher viennent piquer le goûter des autres.

Juste pour que vous compreniez bien : Haricot, le pain à la main, les mouettes à l'affût.

Parce que forcément, alors que d'habitude des tas de gamins viennent balancer de la croûte, à ce moment précis, on était les seuls à avoir de la bouffe sur nous.

Et puis ne comptez pas sur haricot pour lâcher le quignon de pain, ni sur moi pour leur filer quoi que ce soit à ces sales bêtes (je n'aime pas qu'on réclame).

Et mon fils, ce newbie de la vie, de grailler tranquille, innocemment, pendant que de mon côté, je calculais en combien de temps j'arriverais à le pousser hors du parc... Toutes mes estimations menaient à la conclusion suivante: les mouettes parviendraient à nous avoir, même si je zigzaguais (hautement dangereux en bottes à talons, prise de risque inutile).

Je les voyais qui pliaient et repliaient leurs ailes, et je me demandais si en me retirant dignement, elles me laisseraient filer, quand soudain une petite fille a surgi pour piquer le crouton du Haricot.

Ah c'est mon fils, pas de doute. Surpris ou pas, il l'a méprisée en lui lançant le fameux regard noir de sa mère, sans même déserrer sa prise. Le papa de la petite est intervenu aussitôt, à la fraction de seconde près, et de mon côté, j'ai profité de la diversion pour rouler vers la sortie.

Les mouettes ont tout de suite vu que je me débinais. Bien sûr, bien sûr, elles se sont envolées... Et bien sûr,w bien sûr, j'ai cru jusqu'au bout qu'elles nous avaient manqués. En effet, c'est sur la poussette qu'elles ont ch...