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le « ground zéro » des démocraties occidentales

Publié le 11 septembre 2011 par Mister Gdec

le « ground zéro » des démocraties occidentales

(Un exemple d’illustration de la propagande assimilant  terrorisme et résistance : l’affiche rouge. Son histoire est ici. )

Le 11 septembre, il n’y a pas que les deux tours, qui soient tombées… Mais également la notion de respect inconditionnel de l’être humain et de la défense des libertés publiques, dans nos démocraties occidentales… Toutes notions tombées sous le coup de la peur, de son business alloué, et des idéologies rattachées. Alors que les démocraties arabes naissantes, elles, ont su braver les pires tentatives d’écrasement ou de musellement des révoltes, notamment par des équipements techniques dernier cri fournis gracieusement par l’occident… dont la France. Pays des droits de l’homme, vraiment ?

Qu’est-ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001 ?   « Rien »           ais-je lu, stupéfait, à l’instant, dans un interview d’un intellectuel faussaire épinglé par… lui-même, Pascal Boniface, dans mon quotidien régional (1) qui, pour une fois, me donnait matière à stimulation intellectuelle, anniversaire oblige.

Selon lui, les institutions internationales n’ont guère évolué, n’ont pas su s’adapter, les rapports de force entre les grandes puissances sont toujours les mêmes, et « la chute du mur de Berlin a changé le monde et celle des tours, non ».

Que Pascal me permette, humble blogueur même pas vraiment intellectuel, de ne pas être d’accord avec lui. Car quelque chose de fondamental a bien évidemment changé : nous sommes entrés dans le règne de la peur, les terroristes (malgré la mort de Ben Laden) ont gagné la bataille des émotions, et les gouvernements occidentaux s’y sont largement fourvoyés.

La preuve, c’est qu’aujourd’hui, s’il y a un attentat, l’idéologie qui l’a forcément guidé ne peut être qu’islamiste… comme l’a prouvé l’épisode de la tuerie d’Oslo. La dictature médiatique de l’instant est en marche, ainsi qu’a pu le prouver l’incroyable saga DSK, qui à elle seule nous montre combien le monde est devenu fou, sous l’influence néfaste de ces deux paradigmes surlignés en gras…

D’ailleurs, il serait vraiment surprenant de pouvoir contester le fait que le regard de nombre d’entre nous sur les personnes d’origine arabe ou pré-supposée a changé, et qu’une peur sourde, totalement irrationnelle, s’est installée dans l’esprit des moins critiques, ou des plus influençables de nos compatriotes… Un seul exemple ici. Mes amis concernés le ressentent un peu trop… durement. Leur humanisme s’en trouve meurtri, et moi aussi : j’ai honte, parfois, et encore plus de puis 2007, d’être français.

OUI, depuis le 11 septembre, le terrorisme est islamique, et l’amalgame entre islamistes, musulmans et terroristes, s’est ancré inconsciemment (ou pas, chez ceux et celles qui en font leur fond de commerce) chez un trop grand nombre de français. Inutile de le préciser, je n’en serai jamais.

Pourtant, il me semble utile cette fois, à ce stade de la discussion, de rappeler qu’auparavant, le terrorisme ne comportait pas de dimension religieuse, genre basané à djellaba et femme à burqa pour être clair, mais se revendiquait clairement d’une idéologie : la bande à Baader ou Fraction Armée Rouge, les brigades rouges italiennes, l’ETA, l’IRA, le FLNC et autres Front de Libération de la Bretagne, l’épisode du groupe de Tarnac et de Julien Coupat et l’hystérie sur l’ultra-gauche qui s’en suivit…   Le terrorisme avait il n’y a encore pas si longtemps (avant que la vague médiatique dominante ne nous lave le cerveau…) davantage couleur locale, et l’on pouvait tout à fait appartenir à un mouvement terroriste tout en votant pour le front national, ce n’était pas incompatible… Damned ! j’ai oublié de citer également ici la figure pleine de sens par chez nous des anarchistes français tels que Vaillant ou Ravachol, ou les nihilistes russes genre Netchaïev ou Kropotkine, qui ne sont pas nécessairement étrangers à une certaine mode de l’anti-communisme primaire qui règne par chez nous aussi… C’est en effet de notoriété publique : avant l’amalgame duquel nous sommes plus familiers (arabes, musulmans, islamistes, terroristes), il y a avait un amalgame en œuvre dans les consciences françaises tout aussi ridicule : russe, communiste, fou, anarchiste, alcoolique et violent donc … terroriste.

Il est extrêmement édifiant de savoir, et ce n’est pas anodin, qu’aussitôt après la série d’attentats anarchistes qui ensanglantèrent la France à la fin du 19ème, et plus particulièrement celui d’Auguste Vaillant , qui avait commis l’irréparable, émergèrent les trop fameuses « lois scélérates », qui tentèrent de museler la presse, et de créer un délit d’opinion (cela ne vous rappelle rien ?), en contre-réaction aux violences anarchistes d’alors. Mais en ces temps là, la gauche française était un peu plus forte, et bien des points de ces lois furent expurgés, car jugés attentatoires aux libertés publiques… Mais les réacs d’alors avaient quand même marqué des points en leur faveur.

Ce n’est pas vraiment le cas aujourd’hui, avec le frère germain du Patriot Act, la Lopsi 2 (tiens ! C’est l’Iris, l’institut de Boniface qui le publie, quelle coïncidence!) qui va encore plus loin dans le rétrécissement des libertés individuelles, et cela jusqu’à traquer notre liberté d’opinion. Cette loi d’exception bien française, l’une des plus « avancées » au monde en la matière, offre en effet la possibilité de placer des logiciels espions dans votre ordi, et comprend également le filtrages de sites, la création d’un délit de cybercriminalité, ou l’interdiction totale (voir totalitaire), des logements éphémères… (voir Le Patriot Act à la française, Politis de cette semaine, P. 25).

Toutes ces choses là portent gravement atteinte à nos libertés individuelles sous prétexte de terrorisme… alors qu’il ne s’agit pas là, manifestement, d’intérêts supérieurs de sécurité nationale… Quel intérêt y a-t-il à tenter d’expulser en vertu de cette loi les habitants, militants écologistes et par ailleurs chefs d’entreprise, de leur yourte d’Ardèche ou d’ailleurs ? Constituent-ils une menace pour la nation ?

Dernier avatar en date, on apprend que le spécieux Squarcini (qui vient de s’illustrer brillamment  ailleurs par ses valeurs soucieuses du respect des droits de l’homme, alors que c’est un proche de Sarkozy, qui le protège comme la prunelle de ses yeux), se retranche derrière des notes découvertes dans la traque de Ben Laden pour justifier des précautions particulières prises en France, sous prétexte qu’elle fut autrefois également la cible d’Al Quaida… Passons  sur le fait que cette interprétation de notes éparses relève davantage de vagues intentions fugitives que d’une réelle intention, comme je l’ai vu écrit je ne me souviens plus où…  Il est indubitable, en tous les cas, qu’il y a un intérêt stratégique et symbolique particulier à venir attaquer la mairie de Lunéville les oies, dont je suis proche, ou du Kremlin-Bicêtre (là, c’est Nicolas, je crois). Je suis envahi par la peur, sans rire.

Et nous ne parlerons pas ici, sous risque d’alourdir péniblement, plus qu’il ne l’est, ce billet, de toute cette industrie de la peur générée depuis cet horrible événement, qui voit certains chefs d’entreprise de télésurveillance (2) , et autres équipements informatiques ou de traçage de type géolocalisation, faire les poches de tous ces paranoïaques que nous sommes devenus, grâce à l’effort conjugué de la télévision, d’internet, des journaux, des politiques, et d’autres experts auto-proclamés. Ainsi, l’exemple notable  d’Alain Bauer, qui peut continuer impunément à jouer sur tous ces terrains là, pour son seul égoïste profit.  Le conflit d’intérêts n’a jamais fait peur à l’autocratie sarkozyste et à ses élites.

La figure du futur terrorisme ne risque-t-il pas, finalement, de se montrer sous ce masque là :  la menace technologique et la restriction de nos libertés individuelles sous prétexte fallacieux de protection, jusque dans une intimité qui ne nous appartient déjà plus ?

Un autre monde est possible. Ainsi, si nous fêtions dignement ce 11 septembre, ne devrait-il pas se révéler comme le jour de la réconciliation des peuples, par delà les religions, les idéologies, et les supposées dangerosités spécifiques d’ appartenances ethniques ou culturelles (en un mot comme en 100 : le racisme et la xénophobie, que j’exècre d’où qu’elle vienne) qui nous divisent, au lieu de nous rassembler ? Ce devrait être un principe  acquis que la différence, loin de nous léser, nous enrichit, et que la folie meurtrière  n’a pas de race ni de patrie, si la connerie humaine n’était pas si présente partout ?

Sur le sujet, lire aussi, l’excellent bug brother ici


(1) Pascal Boniface, « Le monde n’a pas changé », l’Est Républicain, aujourd’hui. Propos recueillis par Michel Wagner.

 (2) jusqu’à se fourvoyer dans de drôles de stratagèmes



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