Le mal propre
Polluer pour s'approprier
Michel Serres
Ed Le Pommier, 2008
Les tigres pissent pour
délimiter leur niche. Ainsi font sangliers et chamois. Mimons-nous ces
animaux ? Je le crains, je le vois, je le sens. Quiconque crache dans
la soupe ou la salade s’en assure la propriété. Vous ne couchez pas
dans des draps salis par un autre ; ils sont désormais à lui. Pour
pouvoir recevoir ses clients, un hôtel, un restaurant, inversement,
nettoient lit et serviettes. L’éthologie, science des conduites
animales, comme les pratiques hospitalières – mais aussi l’histoire des
religions, les techniques agricoles, même la sexologie… - montrent le
rapport étrange et répulsif entre le sale et la propriété.
Oui, notre propre, c’est notre sale.
Poursuivant une méditation, commencée avec le Contrat Naturel,
sur les risques d’aujourd’hui, ce livre dit que les pollueurs salissent
le monde pour se l’approprier. Rien de changé depuis les chiens et les
tigres ! Comment pollue-t-on ? Nous commençons à le comprendre. Mais
pourquoi polluer ? Ce livre répond à la question. Attachées seulement
aux questions de chimie et de médecine, les études actuelles sur
l’environnement négligent ces projets, simplement humains, d’expansion
et d’emprise.
Nos volontés d’appropriation sont dangereuses. Mais nous pouvons changer nos intentions.