le 9/08/11 • Dans la catégorie insolite Paris
Le marché des Enfants Rouges, très fréquenté par la population du 3e, est un lieu incontournable et mythique ! Connaissez-vous son histoire ? Voici quelques anecdotes sur ce célèbre marché couvert dénichées par notre investigatrice, Laurène !
L’orphelinat des enfants vêtus de rouge…
Au XVIe siècle, des orphelins sont logés par l’Hôtel Dieu. Maladies infectieuses, insalubrité, ces enfants étaient voués à une vie trop courte… En 1536, Marguerite de Valois, la sœur de François 1er, crée un hôpital pour recevoir ces orphelins, appelés les Enfants de Dieu. Leur dénomination évoluera de par les vêtements de couleur rouge, symbolisant à l’époque la charité chrétienne, dont ils étaient vêtus. Ils se firent appeler Les enfants rouges.
La création d’un marché
Au début du XVIIe siècle, la ville de Paris était délimitée au nord par l’actuelle place de la République. Henri IV avait envisagé de créer aux alentours de cette limite de Paris une place de France, point de départ depuis lequel rayonneraient des rues portant les noms des provinces du pays. Ce projet, dont certaines rues conservent la trace – rue de Bretagne, Poitou, Saintonge, Perche, Picardie – ne sera pas achevé.
Parallèlement, la demande en produits de consommation courante ne faisant que s’accroître, Louis XIII charge 2 commissaires de guerre, Sulfice Richard et Jean Duflos, de créer un petit marché à proximité de cette place. Ils établissent ce marché à l’angle des rues de Bretagne et de Berry, sur un vaste terrain acheté à Pigou, un notable de l’époque. Perceval Noblet, maître charpentier du roi, reçoit commande d’une imposante halle de bois reposant sur 16 piliers de chêne, des étaux de boucherie, une fosse à purin et un puits. Le marché sera appelé le « Petit Marché du Marais ». La demande étant si importante, ce marché évolue et s’agrandit rapidement, devenant le « Marché du Marais du Temple ».
Comment l’orphelinat a-t-il donné son nom au marché ?
En 1772, l’orphelinat des enfants rouges, situé rue du Grand Chantier, ferme ses portes, sur ordre des pouvoirs publics. Coïncidence étrange avec le marché dont la famille, propriétaire durant un siècle, veut se séparer.
Les orphelins sont transférés aux Enfants Trouvés, sur l’Ile de la Cité. En mémoire de cet établissement, qui a rythmé le quartier entier, les riverains donnent au marché du Marais du Temple le nom de « Marché Des Enfants Rouges », dès la fin du XVIIe siècle.
L’agrandissement du marché
Geoffroy d’Assy, philanthrope et franc-maçon, rachete le marché. Paris s’agrandit et la démographie impose d’augmenter l’approvisionnement en nourriture. Pour pallier aux nouveaux besoins, Geoffroy d’Assy valorise l’importance du Marché des Enfants Rouges. Il entreprend sa rénovation et son agrandissement, installe un réverbère en son centre ainsi qu’une fontaine, demandée par les bouchers, poissonniers et primeurs.
En étant inscrit à l’inventaire des Monuments historiques depuis 1982, le marché des Enfants Rouges a pu résister à de nombreuses opérations financières.
Les enfants rouges et le communisme…
La couleur « rouge » a souvent été associée au communisme. Y a-t-il un lien entre la dénomination de ce marché, la couleur des vêtements des enfants et le parti politique ?
En creusant, on s’aperçoit que le quartier du Marché des Enfants Rouges a été un lieu de rassemblement ou de création d’évènements liés au parti.
En 1789, Robespierre, représentant de l’extrême gauche démocratique et de la Commune, habite au 64 rue de Saintonge, pendant 3 ans.
Au 49 rue de Bretagne, se succédent divers rassemblements communistes :
- Maison commune du 3e arrondissement, au 1e étage : Conférence de Lénine sur « le parti ouvrier et la religion » le 21 mai 1909, avec le club du prolétariat. Puis Siège de l’Union des sociétés de conscrits et de réservistes en 1925.
- Siège de la Fédération de Paris du parti socialiste (PCF) – Louis Aragon et André Breton adhèrent au PCF après le congrès de Tours en janvier 1921
- Restaurant de la Coopérative communiste de la Famille nouvelle, tenu par La Muse Rouge, Hô Chi Minh et Radi, le gérant. Ce café restaurant était associé à l’une des organisations du PCF et des Goguettes révolutionnaires, de 1922 à 1925.
Le marché des Enfants Rouges est le plus vieux marché de Paris ayant subsisté. Vous pouvez vous y rendre par 3 entrées : au 39 ou 41 rue de Bretagne, ou au 33 bis rue Charlot.
Ce marché est au cœur du quartier et ancré dans le quotidien des riverains. Les habitants l’appellent la « place du village ». Il n’a été réhabilité qu’en novembre 2000, grâce à la volonté des habitants et du soutien de la municipalité.
Le Marché des Enfants Rouges est un espace de convivialité, où marchands et habitants cohabitent en toute sympathie. Les commerçants sont présents durant l’année entière. Des producteurs du terroir, des marchands de produits biologiques, ostréiculteurs, cavistes, traiteurs spécialistes. Les régions de France y sont finalement représentées… clin d’œil au projet initial d’Henri IV ?
En plus des terroirs des régions françaises, quelques stands offrent un large choix de produits marocains, asiatiques et méditerranéens. Des restaurants cafés, un fleuriste et même un photographe y sont également implantés.
Le Marché des Enfants Rouges est un lieu parisien à ne pas manquer ! Petit conseil, évitez les heures de pointes (entre 12h et 13h30) pour y déjeuner !
Horaires d’ouverture : mardi au jeudi 8h30-13h et 16h-19h30, vendredi et samedi 9h-13h et 16h-20h, dimanche 9h-14h
Auteur : Laurène Bailly Sommacal