Hérode , tétrarque de Judée (interprété remarquablement par le ténor Stig Andersen) est une sorte de DSK de Samarie qui a du mal à contrôler ses pulsions. Mariée à la "libertine" Hérodias, (magnifique Doris Soffel) haïe du très puritain Jokanaan(qui serait sûrement aujourd'hui contre le mariage gay) elle s'inquiète à juste titre du regard lubrique qu'il pose sur Salome , sa belle-fille. Mais Dieu va le punir et le livrer aux mains d'une femme". Après une danse des Sept voiles minimaliste mais astucieuse(la soprano Angela Denoke n'est pas danseuse), Salome " qui a tout de sa mère" demande la tête de JB qui -bien sûr- s'est refusé à ses avances. Il faut dire que la jeune femme fait fort dans l'impudicité. Au point que Narraboth(jeune et beau syrien interprété par Stanislas de Barbeyrac )s'en tranche la gorge de pudeur.Le livret de Salome qui amusait Michel Leiris nourrit dans sa traduction quelque aspect de boulevard qu'a su capter la subtile mise en scène d'André Engel . L'homme de théâtre n'a pas peur de la scène et a su transmettre l'art du mouvement aux solistes qui évoluent sous les moucharabiehs de Nicki Rieti. Salome , c'est un mélange de Tristan et Don Juan. La tête coupée , embrassée sur la bouche rose va avoir l'effet de la statue du Commandeur, un plongeon dans les ténèbres, le baiser de Thanatos à Eros. Musicalement , ça démarre comme le récit, in media res . La direction musicale de Pinchas Steinberg ferme dans ses choix fait sourdre les aplats wagnériens,leitmotiv straussiens, ratiocinations musicales (comme cette illustration sonore étonnante d'un débat théologique ironique entre les prêtres du Sanhédrin). La danse elle est à la hauteur du drame , un petit joyau musical.On reconnaîtra dans les petits rôles un François Piolino toujours aussi vif et un page d'Herodias bien convaincant(Isabelle Druet). Angela Denoke enfin est remarquable et fait oublier les indécisions de Camilla Nylund entendue en ces mêmes lieux alors qu'on regrette le Jochanaan de Vincent le Textier. On redit notre enthousiasme pour la direction d'acteurs et la subtile pantomime choisie par Engel pour la danse qui prémunit contre toute chorégraphie ridicule.