Décidément, plus je prends connaissance des propositions des candidats socialistes, et plus je me dis que j'ai été raide avec Bayrou, au point que Marianne2 ait titré "Peut mieux faire" en reprenant mon billet.
Là, je viens de lire les "propositions" de François Hollande pour l'école. Ce qui me frappe, c'est l'absence totale d'originalité. Ils me gonflent, à droite et à gauche avec leurs nouvelles technologies. On trouve aussi ça chez Montebourg et à l'UMP. Voilà, c'est le nouvel eldorado. Plutôt que d'apprendre à réfléchir, à entreprendre et à libérer sa créativité sous toutes ses formes, le nec plus ultra de la pédagogie, depuis 10 ans à gauche et à droite, c'est les nouvelles technologies.
Débile. Les nouvelles technologies, ce n'est pas un sujet d'instruction. C'est idiot au possible. C'est juste du matériel. Quand les politiques décident de fournir du matériel informatique aux établissements scolaires, et...les LAISSENT s'organiser au lieu de se servir de cet équipement pour truander les marchés locaux dans les Conseils Généraux, bon très bien. Tableaux inter-actifs, tablettes tactiles, ordinateurs portables, projecteurs et cetera, ce sont les tableaux noirs, les craies et les cartes de géographie de demain (ça devrait d'ailleurs être ceux d'aujourd'hui) mais ça n'a rien à voir avec un enseignement disciplinaire. Ridicule.
Il est marrant Hollande. Toujours en rondeurs, ce gars-là. Allez, étude ou commentaire de textes (je ne sais plus comment on appelle ça à l'école, maintenant...). Lisez la phrase suivante et interprétez-la (c'est du Hollande dans le texte) :
Je propose aussi quelques pistes de débat avec les enseignants sur le nombre de jours de classes dans l’année
Idéale, cette proposition pour étudier l'implicite et l'explicite, non ? Royal, en 2007, c'était plus direct : allez, au boulot, tas de fainéants ! aux 35 heures dans les établissements scolaires ! Avec Hollande, on propose. Mais on n'est pas fou. Le débat, on sait bien que dans l'opinion, il tournera au désavantage des profs, tant elle est convaincue que ces jeanfoutres n'en rament pas une derrière leurs bureaux...
Martine Aubry, c'était plus subtil :
Je repenserai les rythmes scolaires : nos élèves ont les journées parmi les plus longues et l'année la plus courte. Je reviendrai sur la réforme absurde qui a imposé les quatre jours à l'école primaire.
Elle est plus maligne. C'est un peu façon MoDem (décidément...!) : hop, en passant un petit commentaire sur la brièveté de l'année scolaire, mais on rassure son éventuel public eneignant en se rabattant tout de suite sur la semaine de quatre jours.
Montebourg, s'est emparé aussi de la question, je l'ai rappelé dans un billet précédent. Valls, pour ce que j'en sais, est à peu près sur la même ligne que Ségolène Royal.
Une chose m'étonne avec Bayrou : il écrit dans son État d'urgence un plaidoyer sincère pour prendre la défense des enseignants. Il rappelle la difficulté de gérer une classe et tout le travail périphérique qu'occasionne la préparation de cours.
Le premier avantage, avec Bayrou, c'est que ce n'est pas un technocrate. Ce n'est pas, comme dans les commissions du PS, un individu qui a passé son temps à éviter les classes via des décharges ou des nominations bidon.
Le second, c'est que lorsqu'il écrit un livre et fait des propositions, il le fait tout seul : il n'y a pas derrière lui une armée de comités Théodule pour lui raconter un ramassis de conneries.
Je reprends le fil de ma pensée. Bayrou, après avoir donc pris la défense d'un corps fort malmené depuis de longues années, défile en vrac toutes les problématiques qu'il faudra un jour aborder, en plus de celles qu'il choisit lui-même de traiter. Et il cite dans le tas la question des rythmes scolaires, notamment la longueur de la journée pour les écoliers. Il l'a écrit dans son livre.
Question : il compte la traiter comment ?
Moi, je l'ai déjà démontré : on sait que nouss la France, les Français, l'état français, on n'a pas de fric. Si on allonge l'année scolaire, même si l'on réduit la journée de cours, la vérité, c'est qu'on augmente le temps de travail des enseignants. Les seuls déplacements engendrés, je l'ai calculé, à eux seuls, génèrent plus de 40 heures supplémentaires. Et encore, c'est dans une configuration optimale. Je ne parle même pas des surcroûts provoqués par ce projet.
Les Socialistes ne le disent pas tout haut : ils parlent de revalorisation salariale, de refonte du statut de 1950 et cetera...Mais la réalité, c'est qu'ils n'ont pas les moyens de payer davantage les enseignants pour le surcroît de travail. DONC : en résumé, l'issue de l'élection présidentielle, pour les enseignants, c'est de travailler PLUS pour gagner MOINS. Ça, c'est ce que proposent les Socialistes, mais aussi l'UMP puisque Châtel veut expérimenter un racourcissement des vacances scolaires dès 2014.
Trêve de doubles discours, comment le MoDem, qui semble emprunter le même chemin que le PS et l'UMP pense traiter la chose ? Et François Bayrou se retrouve-t-il dans les propositions de son propre parti ?
Revenons à notre Batave national : ben y'a trois fois rien dans ses propositions. L'école à deux ans ? Déjà le principe m'énerve. Quand on voit déjà la difficulté des tout-petits de 3 ans à s'adapter au fonctionnement de l'école maternelle, la surcharge des classes, je trouve sa proposition aussi idiote que retorse. Retorse ? Eh oui, voyons : une place d'école en plus pour un enfant de deux ans = une place de crèche en moins, voyons ! Capisce ? Ça coûte moins cher de tout balancer sur l'école !
Côté Verts, il suffit d'observer que leur nouvelle tête pensante, l'inénarrable Philippe Meirieu, est en parfaite adéquation avec Châtel pour ne pas espérer un discours différent de côté-là.
Je trouvais qu'il n'y avait pas assez de détails de la part de Bayrou, mais chez les autres, c'est soit le délire, soit le vide inter-sidéral. Brighelli a fait, me semble-t-il, une bonne synthèse des propositions du Béarnais. Le mieux est d'en prendre connaissance.
J'aurais bien commencé les propositions pédagogiques des candidats socialistes, mais il n'y en a pas, sauf peut-être chez Montebourg.
Quant à l'UMP, eh bien comme on voit tous les jours ce que fait Nonos-Pipo Châtel, ça va finalement : avec les Socialistes, ce sera la rupture dans la continuité, suppressions de postes mises à part . Et encore ! comme le note Brighelli, collez les profs aux 35 heures et vous verrez les économies monumentales en postes. Bon, il faudra recruter des clandestins chinois pour assurer les cours, évidemment - je crois que cela s'est déjà fait, sans rigoler, d'ailleurs - puisque plus personne ne voudra se faire chier 50 heures pour un salaire assez peu consistant mais on y arrivera...
Cela dit, sur les rythmes scolaires, j'ai un avis : je pense aussi qu'au moins pour les plus petits, c'est difficile de tenir des journées parfois longues. Je ne suis pas convaincu par l'augmentation de l'année scolaire, parce que je suis convaincu (et je parie que je ne me trompe pas) que d'autres activités viendront prendre la place du temps libéré. Au final, les enfants n'y seront pas gagnants. Ils auront des années scolaires plus longue avec toujours autant de fatigue par jour.
Pour les collèges et a fortiori les lycées, je suis nettement plus dubitatif sur l'intérêt d'allonger l'année scolaire. Cela ne cadre pas du tout avec le fonctionnement administratif des établissements, notamment les inscriptions en collège ou ailleurs.
Mais, j'ai une idée, même si elle risque de faire hurler, à commencer par les syndicats, et, peut-être certainement pas mal de profs, mais qu'ils m'écoutent avant de hurler au vil exploiteur du peuple.
Plutôt que de parler de rythmes scolaires, moi, je pense qu'il faudrait mettre en avant une annualisation des temps scolaires. Est-ce par exemple pertinent d'étudier des disciplines artistiques sur neuf mois ? Ou même de la géométrie ? On pourrait imaginer une année où les différentes disciplines enseignées ne seraient pas forcément dispensées en même temps. Et, dans la foulée, serait-il obligatoire que les enseignants soient forcément là tous en même temps au fil de l'année ? On pourrait imaginer si l'on allonge l'année scolaire, que certains cours se déroulent sur telle période, tels autres cours sur une autre période, et cetera.
Ainsi, on parviendrait à rallonger l'année scolaire sans pour autant léser les enseignants puisqu'ils partiraient une fois leur temps de service accompli.
Avec moins d'heures de discipline par semaine, les journées seraient plus courtes, avec moins d'enseignants sur place, les emplois du temps et la gestion des salles plus aisés pour l'administration.
Toutefois, les services administratifs verraient leur charge de travail augmenter. Il faudrait donc accroître les effectifs dans les administrations des établissements scolaires et y revaloriser les salaires.
La boucle serait ainsi bouclée.
Une fois cette réforme simple et respectueuse de chacun des rythmes scolaires faite, on pourrait alors passer aux choses sérieuses, c'est à dire les programmes, les méthodes d'enseignement et l'environnement de l'écolier, du collégien et du lycéen.