Petit essai d'économie politique (2)

Publié le 08 septembre 2011 par Feuilly

Les citoyens ont déjà compris, suite à cette crise financière que traverse actuellement le système capitaliste, que ce sont surtout eux qui vont devoir faire des efforts. Cela ne les rassure pas beaucoup car la crise risque bien d’être longue et les efforts soutenus. En effet, on sent bien que ce n’est pas une petite crise passagère, qui serait  liée à un événement extérieur. Non, c’est le système lui-même qui est malade. Cela fait pourtant des années que les mêmes citoyens crient que cette mondialisation de l’économie, basée sur la concurrence et le libre-échange, n’apportera que des malheurs. Forcément ! Si on affaiblit le rôle des états, par nature protectionnistes, et si on détricote toutes les règles existantes pour ne conserver qu’une concurrence pure et dure, on ne peut arriver qu’à une espèce de jungle où toutes les firmes vont se manger l’une l’autre. Et c’est bien ce qui se passe.

Imaginez dix usines où on fabrique des chaussures. Celles qui vont offrir un produit de qualité, avec de la bonne matière première et qui en plus vont bien payer leur personnel, ne pourront pas résister longtemps à la concurrence puisque dans les rayons des magasins leurs chaussures se vendront  forcément plus chères.  Si elles ne changent pas de tactique, elles vont inéluctablement faire faillite. D’une part elles vendront peu et d’autre part la qualité de leur produit fini aura comme conséquence que les clients ne renouvelleront pas souvent leur achat. Par contre celles qui vont licencier à tour de bras, qui vont réduire les salaires, puis mécaniser au maximum et finalement utiliser une matière première moins onéreuse vont s’imposer.

Après quelques années, des dix usines, il n’en restera déjà plus que cinq (ce qui nous fait déjà pas mal de chômeurs supplémentaires, à charge de la collectivité). Mais elles sont toujours concurrentes et si elles veulent survivre, elles vont continuer à diminuer la qualité et à imposer des règles de travail inhumaines. C’est là que l’Etat, autrefois, intervenait, en imposant par exemple une législation sociale, qui protégeait les travailleurs. Mais avec la grande Europe, le pouvoir des états a été fortement réduit. Pour faire simple, on pourrait dire que ces derniers mènent un combat d’arrière-garde. Ils ne proposent plus aucune nouvelle mesure de protection mais sont au contraire  contraints, petit à petit, de modifier leur législation existante pour quelle corresponde à la nouvelle philosophie de l’économie : rien ne doit faire obstacle au commerce.

Mais tout cela, les citoyens le savaient depuis longtemps. Ils savaient qu’ils allaient voir leurs conditions de travail empirer et leurs salaires diminuer. Puisque les firmes licencient pour rester concurrentielles, ceux qui ont eu la chance de conserver leur emploi doivent mettre les bouchées doubles pour effectuer l’ensemble des tâches. Le rythme de travail devient quasi frénétique et l’épuisement guette. Soit.

Mais voilà que malgré tous les efforts fournis l’économie ne se porte quand même pas très bien. Il faut dire qu’elle reposait depuis toujours sur la croissance (vendre de plus en plus, accroître des parts de marché, etc.) et celle-ci n’est plus au rendez-vous. Forcément, le nombre de citoyens gagnant « bien » leur vie diminue chaque jour, tandis que les emplois à temps partiel, les emplois précaires et les emplois sous-payés se généralisent (et je ne parle pas des millions de chômeurs européens, qui vivotent comme ils peuvent). Dans un tel contexte, les gens essaient de ne pas trop dépenser et donc, indirectement, ils contribuent à la mauvaise santé de l’économie.

Comme si cela ne suffisait pas, la patronat, toujours obsédé par cette idée de concurrence dont il devient lui-même finalement victime, a délocalisé ses entreprises en Chine ou ailleurs. Les jeunes européens ne trouvent plus d’emploi et restent longtemps à charge de leur famille, ce qui réduit encore le pouvoir d’achat de celle-ci.

Puis est venue la crise boursière qui a achevé de démoraliser les milieux d’affaires. On demande donc une nouvelle fois aux citoyens de sauver un système qu’ils désapprouvent et qui leur a déjà enlevé plein d’avantages. Car on n’a plus que le mot « privatisations » à la bouche. L’eau, le gaz, l’électricité, tout y passe. Et les prix flambent, évidemment, car fournir de l’eau n’est plus considéré comme une obligation étatique pour répondre aux  besoins des citoyens, mais comme un moyen de s’enrichir. Tout ce qui peut rapporter de l’argent doit être privatisé. On oblige les états à vendre leur parc immobilier pour le relouer bien cher et on demande aux universités d’être autonomes (ce qui risque bien de limiter l’accès aux études, car celles-ci seront forcément de plus en plus inaccessibles sur le plan financier). L’enseignement, qui était considéré comme un devoir de la collectivité envers les jeunes générations, ne sera bientôt plus qu’un grand marché, lui aussi. On est contre l’état social. A la limite, si on pouvait faire disparaître cet état, on le ferait. En tout cas il est hors de question que les firmes privées lui donnent de l’argent via leurs impôts : tout doit être conservé pour les actionnaires. Alors, l’état ne pourra plus rien distribuer, puisqu’il n’aura plus rien. Et comme les caisses seront vides, on demandera aux citoyens de travailler plus tard : 67 ans, 69 ans, 70 ans ? Pourquoi pas ? D’ailleurs on pense déjà à permettre aux retraités d’exercer une petite activité complémentaire afin d’arrondir leurs fins de mois…

Bref, devant une telle situation, qui empire tous les jours, les citoyens se mettent à rêver à un pays où la vie serait différente, un pays où ils seraient à l’abri de cette économie mondiale qui les écrase.

Où pourraient-ils le trouver ?