L’habit ne fait pas le moine, la psycho-morphologie est une erreur fatale. Qui pourrait un instant imaginer que Nono, le mec qui fait griller ses saucisses dans votre camping estival, est sûrement le créateur de l’un des albums de musique électronique les plus profonds de l’année ?
Arnaud Rebotini, ancien (pas tant que ça, aux dernières nouvelles) Blackstrobe, est désormais connu pour n’utiliser que des machines, aucun laptop, mais sans faire de la musique à papa. Deezer plus tard, nous voici sur le premier morceau de ce second album qui suit le premier succès tant critique que commercial de Music Components. The First Thirteen Minutes of Love nous plonge au plus profond de nous-mêmes à travers une odyssée qui va nous purger de toute la musique qu’on a pu écouter auparavant. Bienvenue dans un monde nouveau, après l’Apocalypse des guitares, la mort des batteries. Il n’y a plus, maintenant, sur terre, que des hommes, des claviers et des boîtes à rythme.
Another Time, Another Place nous confirme cette impression. Une voix vocodée façon film de série B futuriste des 80′s se place entre des arpèges qui puent l’analogique. Et, dans un paysage de désolation, les survivants se mettent tous à danser, comme dans le clip de LMFAO. La comparaison s’arrête ici, car ce que nous entendons est beaucoup plus doux et surtout, ici, on groove avec la tête, comme dans un égocentrique voyage vers sa propre psyché. A la fin de ces six minutes-là, on est hors du temps et de l’espace, les marcels et la stache-mou du chef sont oubliés, prêt à entendre la bonne parole. L’album commence alors vraiment par le très « crack crack boum boum » Personal Dictator.
Comme si, d’un coup, en plus, on retrouvait les ambiances du génialissime – quoi que ça fasse débat à chaque fois – film Steak mais repris par David Lynch jeune surfant sur ses dunes. Si ce n’est pas le meilleur titre de l’album, celui qui suit va très nettement nous convaincre que oui, Rebotini Gave Me Religion. Dans Another Dictator, les synthés viennent parer le danseur d’un doux habit d’une texture neigeuse, amènent un genre de sentiment de plénitude total style MDMA. Puis vient l’étrange Echoes, qui suit un peu la même idée, quoi que, entre nous, ce soit peut-être un peu une sous-chanson.
Arrive ensuite l’unique précepte de cette nouvelle secte que notre aimé dictateur nous énonce à travers son vieux vocoder : All You Need Is Techno. Le titre parle de lui-même. Suite logique, par Who Gonna Play This Old Machine, le gourou nous montre tout ce qu’on a à apprendre de lui. Et c’est grandiose. Le choix des sonorités est juste génial, entre la souris suraiguë et la nappe sidechainée presque 90′s, nous sommes convertis. Ensuite, comme tout bon groupuscule de fanatiques, nous devons nous entraîner à aller vers des sphères plus violentes où nous guide Extreme Conditions Demand Extreme Reponses. Nous subissons, nous jouissons, c’est gigantesque, comme si nous devenions des espèces de petits soldats du Rebotinisme.
On finit, comme il se doit avec la grand messe qu’est The Choir Of The Dead Lovers. L’expérience psychédélique est poussée à son paroxysme. Suit a priori le bonus track Sunny Sunday Blues qui nous ramène à la réalité en dix-sept minutes dont on ne perdra pas une miette, tant la descente est difficile.
Entre Kraftwerk, Jarre et la volonté de créer le déhanché, cet album a la force d’être aussi radical sur un dancefloor qu’à la maison en manque de Lexos, ou pas, d’ailleurs. Et surtout de nous transformer. De faire de nous une autre personne. C’est là la force d’un grand album.
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Tracklist
Arnaud Rebotini – Someone Gave Me Religion (Blackstrobe Record,2011)
01. The First Thirteen Minutes of Love
02. Another Time, Another Place
03. Personal Dictator
04. Another Dictator
05. Echoes
06. All You Need Is Techno
07. Who’s Gonna Play This Old Machine?
08. Extreme Conditions Demand Extreme Responses
09. The Choir Of The Dead Lovers
10. Sunny Sunday Blues (Bonus track)