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3 – la substance eternelle de l’espace ou prematiere

Publié le 07 septembre 2011 par Jeanjacques

Si l’univers éternel est immobilité, qu’il est en permanence à l’origine du système des causes, il faut qu’il « existe », qu’il ait une réalité sous la forme d'un objet physique quelconque et ne peut pas relever de la pure idéalité. Il doit posséder quelques propriétés par lesquelles quelque chose existe et se caractérise par une substantialité qui permet son appréhension.

La substance éternelle et infinie de Spinoza est purement spéculative et ne possède aucune qualité propre sauf à être la cause première. Mais comment un être sans réalité peut-il être à l’origine de toute la matérialité ? Celle-ci ne peut s’extraire que du néant et nous retrouvons l’aporie à l’origine de toutes les cosmogénèses.

Exister, c’est être dans le temps. Temps et Etre ne sauraient se dissocier. A contrario, ce qui n’est pas, ce qui cesse d’exister, ne dispose plus de temps pour être. Consécutivement, le temps n’est pas une catégorie abstraite, un pur concept, mais s’accorde à un existant comme une condition pour être. Si l’univers de la matérialité disparaissait, le temps cesserait avec lui.

Le temps est saisissable selon le mode de la durée qui est toujours celui d’un phénomène. Dès lors toute durée implique un début et une fin : il ne saurait y avoir un phénomène purement instantané non inscrit dans une durée. Le temps comme durée suppose le passage d’un avant vers un après : le présent d’un phénomène n’est donc jamais immobilité. L’essence du temps doit dès lors se comprendre comme participant du principe du mouvement.

Chaque étant dispose d’une durée de vie qui est fixée par  des lois physiques et physiologiques et qui constitue son « temps de vie ». Cette durée peut se découper en périodes (jeunesse, maturité, vieillesse) et on peut mesurer cette durée propre au moyen d’un instrument extérieur qui représentera une objectivité à laquelle pourront se rapporter toutes les durées, tous les rythmes. Cette durée, relative à la constitution d’un étant, est totalement indépendante, dans son principe, de la mesure. Le temps peut alors être relatif  à telle ou telle conditions variables de la mesure, mais la mesure du  temps suppose un étalon arbitraire et invariable nécessaire pour fonder initialement un point de référence : on ne saurait imaginer un étalon variant sans cesse.

Tout existant relevant de l’ordre minéral, végétal ou biologique dispose d’une durée d’être qui est nécessairement limitée. Cela suppose toujours une origine et une fin, une émergence et disparition, une naissance et une mort. En conséquence, seul ce qui est créé entre dans le temps, la condition pour être est de disparaître, temps et être naissent et disparaissent simultanément.

Dans l’absolu : Etre et temps sont intriqués. Si l’être disparaissait, le temps aussi. Si l’univers était réduit à la pure étendue de prématière amorphe, le temps n’aurait aucune signification et « existence ». Mais le cycle du temps lui est éternel alors même qu’il ne doit s’incarner que dans des individualités temporelles.

L’hypothèse retenue qui est démontrée dans le livre I « cosmophysique »,  c’est que l’ordre minéral est soumis au temps, au cycle création/destruction et qu’étoiles et galaxies finissent par disparaître pour que s’effectue le recyclage de la matière et du rayonnement.

Tout existant créé suppose le principe d’un cycle naissance/mort par lequel s’effectue la reproduction. Il ne saurait y avoir pure création ex nihilo hors la persistance d’un cycle de la reproduction. Chaque ordre ( minéral, végétal, biologique) est doté des procédés de sa perpétuation, de sa reproduction selon un cycle mort/naissance. Aussi, l’univers de la matérialité minérale ne saurait se créer ex nihilo et son existence doit obligatoirement s’inscrire dans un cycle par lequel étoiles et galaxies naissent et disparaissent, ce qui suppose des procédures d’émergence et de disparition des particules tout autant que des photons.

Les conceptions d’une naissance simultanée des temps, espace et matière ( Augustinisme, cosmogénèse du big bang ) sont toutes adossées à  l’idée de création et n’échappent pas à l’aporie : où se trouvait l’espace avant son extension. Où était condensée l’infinité de la masse de la matière et que faisait Dieu avant la création du monde, sans substrat matériel ?

Ce qui est éternel échappe à la durée limitée qui est celle du temps et ne saurait avoir ni début ni fin et ne peut naître ni disparaître. Consécutivement, est éternel ce qui n’est pas soumis au cycle de la création et qui pourtant EST car on ne saurait donner statut d'existant à ce qui n’a aucune réalité, à ce qui n’est pas constitué en objet physique quelconque.

Mais cette succession des cycles ne participe en rien de la catégorie fondamentale de l’éternité. En effet, chaque existant créé l’est selon une durée limitée : une succession de durées ne saurait constituer une stricte définition de l’éternité. En conséquence, tout existant qui entre dans le temps par le moyen du cycle continu de la création n’est pas éternel. Aussi, le concept d’éternité ne peut s’appliquer à un existant qui est soumis à une durée limitée pour être.

Ici se pose la question d’un mouvement infini qui serait agi par une énergie finie. Le mouvement perpétuel est un interdit radical en physique mais il semble qu’il ne soit pas respecté puisqu’un photon paraît doté d’une capacité à se mouvoir inchangé sans limite autre que le bord supposé de l’univers ou se condamne à la circularité dans le cadre d’un univers sphérique.

Ce qui est éternel, incréé et qui échappe à l’ordre successif du temps ne saurait être pure idéalité, mais doit au contraire manifester sa présence permanente en l’espèce d’un objet physique possédant justement les propriétés ci-dessus définies. Si en effet le principe d’éternité ne peut s’incarner que dans des existants qui sont tous dotés d’une durée de vie limitée et que par ailleurs il ne peut être simple concept, il faut bien qu’un quelque chose lui-même étant soit éternel, qu’il existe de façon permanente et qu’il soit, par cette permanence, principe d’immobilité, sans énergie aucune puisque celle-ci supposerait toujours une source extérieure pour alimenter ses déperditions continues.

Si tous les objets de la matérialité sont soumis au temps, nous devons nécessairement supposer la présence d’une substance différente possédant des propriétés radicalement différentes de celles de la matière. Cette substance se doit d’être absolument permanente puisque incréée, absolument immobile et passive puisque sans énergie propre et insusceptible d’un cycle à l’égal de la matière puisque non soumise au temps. Si par ailleurs nous lui accordons le statut d’objet physique réel, nous devons rechercher le lieu de sa présence permanente et immuable.

Cette substance éternelle, permanente et incréée ne saurait occuper d’autre lieu que l’espace lui-même de sorte qu’on peut dire que l’espace est le lieu de cette substance et qu’on ne saurait différencier le contenant comme cadre (l’espace) du contenu (la substance de l’espace).

On a  du mal à concevoir cette intimité, cette consubstantialité espace/substance tant nous avons été habitué à concevoir l’espace comme vide, comme cadre qui accueille les objets, d’où cette dualité cadre/contenu par laquelle on essaye de « placer » une substance dans un « lieu » lui préexistant. Or sans contenu, pas de cadre pour y placer les objets physiques.

La substance de l’espace ou prématière est un objet physique dont la réalité s’impose théoriquement pour fonder la distinction entre le concept de temps dont relèvent tous les objets de la matérialité et celui d’éternité qui s’applique à cette seule substance de l’espace.


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