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« Eve n’est pas coupable »

Publié le 06 septembre 2011 par Cathcerisey @cathcerisey

« Eve n’est pas coupable »

Un cancer est un tsunami, une bombe qui vous tombe dessus sans prévenir. Mais en plus de composer avec la maladie, d’avoir mal, d’avoir peur, il nous faut composer avec la culpabilité savamment distillée au gré des paroles de proches toujours bien attentionnés. Un commentaire du Docteur Dominique Gros, des discussions avec des amis, un article lu dans un journal m’ont interpellée : de quoi sommes-nous donc coupables? 

Et cela commence dès l’annonce. Juste après le moment de sidération qui nous envahit, vient la question du pourquoi moi? Qu’ai je fait ou pas fait pour mériter ça ? Notre culpabilité judéo chrétienne resurgit avec fracas. Choc émotionnel mal géré, conduites à risques, mauvaise hygiène de vie …  jusqu’à se demander si l’on n’a pas fait ou dit quelque chose de pas très avouable vis à vis de sa copine ou sa voisine de pallier qui aurait attirer les foudres d’une divinité quelconque sur nous? Mais nous savons aujourd’hui que le cancer est une maladie multifactorielle, que c’est un faisceau de causes qui ont engendré le développement anarchique de ces cellules dans notre corps jusqu’à le rendre malade, que nous ne sommes en aucun cas responsables d’avoir développer ce cancer du sein qui nous ronge.

Ensuite vient la période des traitements et là, le commun des mortels à une théorie tenace : « le moral c’est 50% de la guérison ». J’ai déjà écrit un post sur le sujet, mais j’avoue que cette phrase  m’horripile particulièrement . Et donc, quand on n’a pas le moral, et avouez que cela arrive fréquemment, le risque est grand de se dire que nous ne faisons pas ce qu’il faut pour guérir. Or ce mythe n’est basé sur aucune thèse scientifique fiable. Il existe des cancéreux déprimés qui s’en sortent et à l’inverse des malades au moral d’acier peuvent ne pas guérir. Un article intitulé « Les malades du cancer face à la « tyrannie de la pensée positive » »  vient de paraître dans le dernier La croix qui démonte ce poncif que l’on retrouve de façon quasi permanente dans l’imaginaire collectif. Je vous engage à le lire….

Enfin le temps de la fin des soins arrive… Fini les allers retours à l’hôpital, fini les traitements lourds. Nous sommes guéris ! Enfin ça c’est c’est ce que pensent les bien-portants, les autres… Nous, nous devons d’abord nous battre  avec de nouveaux adversaires : la solitude face à notre peur de la rechute, la fatigue et les effets secondaires qui persistent, voire même la dépression suite à ce dur combat …. Livrées à nous mêmes, seules face aux contrôles rapprochés, à nos médecins qui nous parlent de rémission et non de guérison, nous sommes loin de nous sentir sorties d’affaire. Mais sommes-nous coupables de ne pas nous sentir à nouveau dans le monde des bien-portants?  Sommes-nous coupables d’entretenir les liens d’amitié crées avec nos compagnes d’infortune qui elles nous comprennent si bien? Sommes-nous coupables d’avoir encore le besoin de vivre dans le monde du cancer parce que, finalement, nous n’en sortons jamais vraiment?

Finalement c’est tout au long de notre parcours que nous devons composer avec les phrases assassines de certains proches et nous battre contre certains clichés qui ont la dent dure. La culpabilisation qu’ils génèrent est difficile à vivre et vraiment pas nécessaire. Non, nous ne sommes en rien responsables de ce qui nous arrive ; non, nous ne pouvons pas toujours avoir le moral, sourire, supporter la douleur sans rien dire ; et non, notre peur est légitime et nous ne pouvons pas simplement fermer le livre et oublier comme on nous le demande. Comme le dit le Dr Dominique Gros, NON, « Eve n’est pas coupable » …

Catherine Cerisey

A lire aussi : Pourquoi moi ?


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