- Une guerre qui dure depuis plus de 50 ans
Le Chrysomèle des racines du mais (diabrotica virgifera) est un insecte de l’ordre des coléoptères. Les larves sont pondues dans le sol et se régalent des jeunes racines de maïs une fois le printemps venu.
Surnommé « l’insecte à un milliard de dollars » par les agriculteurs américains, il est apparu dans les années 50 aux Etats-Unis (notamment dans la « corn belt ») et il est aujourd’hui présent dans les zones de culture du maïs aux Etats-Unis et au Canada, et il est récemment apparu en Europe.
Pour lutter contre cet insecte particulièrement vorace, les pratiques habituelles des paysans du Middle West étaient la rotation des cultures maïs/soja (efficace dans les années 80, avant que l’insecte ne mute pour s’adapter à la rotation et ne puisse désormais éclore sur du soja et patienter jusqu’au retour du maïs) et l’utilisation d’insecticides de synthèse pour lutter contre les larves au moment des semis.
Enfin, le maïs transgénique de la variété Bt (du nom de la bactérie Bacillus thuringiensis dont est extrait le gène qui code la toxine Cry3Bb1) commercialisé par Monsanto a été mis en culture en 2003 face à l’inefficacité croissante des insecticides. Ce maïs a connu un énorme succès aux Etats-Unis puisque 45% du maïs cultivé en 2009 était de cette variété.
- Mutation du chrysomèle et responsabilité partielle des agriculteurs
Mais seulement 6 ans plus tard, une nouvelle variété de chrysomèle résistant à la Cry3Bb1 est désormais capable de prospérer dans les champs de maïs Bt, comme cela a été mis en évidence pour la première fois dans un champ de l’Iowa (Etats-Unis) en 2009.
Une étude vient d’être publiée par des chercheurs de l’université de l’Iowa dans la revue scientifique PLoS ONE. Cette étude précise entre autres que le gêne résistant à la toxine Cry3Bb1 est non récessif, ce qui favorise la propagation de cette nouvelle espèce de chrysomèle.
La responsabilité des agriculteurs dans la prolifération d’insectes résistants aux OGM est mise en cause. En effet, les solutions préconisées contre ce fléau sont la rotation des cultures et l’aménagement de zones refuges, aussi recommandées par l’agence américaine de protection de l’environnement. Il s’agit de conserver 20% de surfaces non OGM pour éviter la transmission trop rapide du gène de résistance aux OGM aux lignées suivantes d’insectes. La part d’agriculteurs réfractaires à cette mesure a augmenté face au succès du maïs Bt, et seulement la moitié des cultures respectent cette disposition réglementaire.
- Réaction de Monsanto : stratégie d’empilement transgénique
Pour sa défense, Monsanto précise que la majorité des cultures n’est pas encore touchée par le chrysomèle, et il commercialise maintenant une variété de maïs combinant les toxines Cry3Bb1 mais aussi Cry34/35Ab1 (commercialisé par son concurrent Mycogen). Cet empilement transgénique est censé retarder l’apparition de l’insecte résistant dans d’autres régions, et de mater doublement la mutation. En effet, aucune variété résistante à la toxine Cry34/35Ab1 n’a encore été constatée.
De plus, la variété de maïs SmartStax, qui contient 6 variétés de protéines insecticides est commercialisé aux Etats-Unis depuis 2010 et en attente d’approbation pour la commercialisation en Europe.
Mais selon les spécialistes, le développement de variétés d’insectes résistants est inévitable. En effet, l’apparition d’insectes de plus en plus résistants aux OGM est avérée : d’autres insectes ont développé une résistance à d’autres formes de maïs Bt à Porto Rico et en Afrique du Sud par exemple, et au coton OGM dans le sud des Etats-Unis.
Les experts estiment que si cette variété devrait proliférer, un recours intensif aux pesticides serait à craindre puisque 45% des champs de maïs aux Etats-Unis sont des maïs de la variété Bt.
- Avis Sequovia
Malgré l’annonce de sa nouvelle génération de graines transgéniques, Monsanto perd en crédibilité puisqu’il avait déjà annoncé sa victoire contre la chrysomèle après la commercialisation de la première génération de maïs Bt.
Dans le cadre de cette course sans fin contre la résistance des insectes, Monsanto empile de plus en plus de protéines insecticides auxquelles aucun parasite n’est censé résister. Dans ces cas là, ne peut-on pas légitimement s’inquiéter de l’effet de ces protéines sur l’homme ?
Et les constantes mutations des insectes pour faire face aux nouvelles variétés d’OGM ne risquent-elles pas d’affecter la chaîne alimentaire dans son ensemble ?