69 ans, humour pince sans rire, costume 3 pièces. Monsieur Eddy a la classe. Monsieur Eddy est aussi fringant que lorsqu'il présentait La Dernière Séance, le soir sur la 3, il y a quelques années de cela.
La Dernière Séance... Pas de nostalgie inutile, c'est grâce à Monsieur Eddy et son érudition que j'ai pu découvrir et en VO, s'il vous plait, quelques chefs d'oeuvre du cinéma américain des années 40 et 50. Des films de Raoul Walsh, Howard Hawks, Anthony Mann. Des films avec James Stewart, Lauren Bacall, Humphrey Bogart, Stewart Granger... Scaramouche, Key Largo, Winchester 73... et tant d'autres. Dans l'atmosphère unique de ce cinéma de quartier, décrite avec tendresse et précision par Eddy Mitchell himself dans la chanson... J'allais rue des Solitaires à l'école de mon quartier. A quatre heures j'étais sorti, mon père venait me chercher. On voyait Gary Cooper qui défendait l'opprimé... Quelques lignes, le décor est posé. Souvenirs d'une enfance d'après guerre. Souvenirs d'une France fascinée par une certaine Amérique.
Cette Amérique mythique, façonnée à coup d'images en Technicolor, Panavision, 35 ou 70 mm, à coup de romans noirs, à coup de paroles de chansons de Presley, Cash ou Berry, cette Amérique s'est profondément inscrite dans nos inconscients collectifs de baby boomers et enfants de baby boomers. Cette Amérique, Eddy Mitchell a contribué à la faire vivre. Sur la route de Memphis. Nashville ou Belleville.
Souvenir personnel, je suis allé à Memphis, Tennessee, en 1990. J'ai rendu visite à Elvis Aaron Presley dans sa dernière demeure, Graceland. Puis j'ai trainé dans Memphis même, du côté de Beale Street. J'ai passé quelques temps le long du Mississipi. Les mots qui me venaient à l'esprit à cet instant étaient ceux de Monsieur Eddy, Sur la route de Memphis.
,Retour à l'Olympia un dimanche soir. Eddy Mitchell sur scène, pour deux heures de show. Rocker, crooner, avec big band. La totale. Que des classiques. Monsieur Eddy puise dans son Best of. Raconte des anecdotes, telle son audition chez Barclay, où il croise, le même jour, Louis Armstrong, Quincy Jones, et Duke Ellington. Monsieur Eddy en trio avec Souchi et Voulzon (copyright Eddy Mitchell) pour L'Esprit Grande Prairie. En duo avec Laurent Gerra (OMG!) sur Vieille Canaille. Avec Pascal Obispo (OMFG!) sur Pas de Boogie-Woogie. Avec Olivia Ruiz sur Couleur Menthe à l'eau. Avec Thomas Dutronc sur... (me rappelle plus du titre).
En solo, avec ou sans big band, Monsieur Eddy est impérial qu'il chante Alice (avec au passage un bel hommage à son compositeur depuis 1964, Pierre Papadiamandis), Avril à Paris, ou un medley de ses succès des 60s (Daniela, Tu parles trop, A crédit et en stéréo).
Deux heures intenses où on passe des grands espaces au Bar du Lutétia. Le public est extatique. Et grisonnant. 50 ans de chanson... Il y a comme qui dirait des seniors dans la salles. Des vieux, quoi. Qui sont aux anges, qui connaissent les paroles par coeur, qui chantent en choeur. Quelques ronchons aussi qui se croient à Pleyel. Et demandent aux rangs devant eux de s'assoir. Comment rester assis? Hein? C'est que Monsieur Eddy a l'énergie communicative. Le paralytique court. L'aveugle voit. Le sourd entend. Petits miracles! Le ronchon ronchonne, pas de miracle, certes. Mais on s'en fout.
Monsieur Eddy fait un ultime rappel, 50 ans de chanson. Il promet de ne pas faire de comebacks à répétition. Il n'est jamais devenu une caricature comme un autre rockeur, monument national, dont il parle d'ailleurs avec tendresse. On peut lui faire confiance.
Rideau.
La salle est en délire. Eddy! Eddy! Il revient, en peignoir, la clope à la main, entouré de ses invités. Dernier adieu.
Clap de fin.
Merci Monsieur.
Enjoy!
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