Cette année, ma fille, tu rentres en CM1. Bientôt le collège. Plus que deux ans pour apprendre les fondamentaux de l'école primaire, avant la jungle du collège. Mais rassure-toi : nos gouvernants, imbus de sagesse et de compréhension, ont pensé à la sauvegarde de ton âme (républicaine, cela va de soi).
Ils ont rétabli, sans en préciser les contours d'application, la leçon de morale en classe. Tu sais, ma petite fille, le genre de truc bête mais essentiel comme : c'est pas bien de voler, c'est mal de mentir, et tuer, c'et pire que tout... Oui, je sais, tu sais déjà ce genre de commandements. Tu rajoutes, à mon intention, d'autres vérités de ton cru, comme "Papa, ce n'est pas bien de fumer !", ou "Papa, tu roules trop vite !". Que ferais-je sans toi, mon ange, que serait ma vie chaotique sans tes paroles de bon sens, tes interdictions butées, tes leçons de morale qui me font grandir encore ?
Des leçons de morale, mon amour, tu n'en as pas vraiment besoin. Pas encore du moins. Par contre, tu aimerais bien ne pas être coincée dans une classe de 32 marmailles. Tu me diras sans doute, dans quelques années, que les leçons de morales gouvernementales auraient été plus profitables si elles avaient été administrées aux grands, qui volent consciencieusement des pays entiers, qui tuent pour un peu de pétrole et qui mentent outrageusement à leur peuple.
Mais mon ange, je t'entends par avance me couvrir de reproches : "Papa, arrête de faire la morale !" Tu as raison, ma fille. J'ai passé l'âge.
François GILLET