Bien différent de celui de Spoerri est, un peu plus au Sud, aux confins du Latium, le Jardin des Tarots de Niki de Saint-Phalle. L'espace y est plus restreint, on va de statue en statue sans guère avoir le loisir de se perdre dans la pinède, et c''est une véritable attraction familiale où débarquent cars de touristes allemands et familles nombreuses; on y joue, on y grimpe, on y crie, on s'y prend en photo, tout cela a un petit côté Disneyland qu'a sans doute voulu la sculptrice. Le Jardin est basé sur la logique des cartes de tarot et un adepte (ce qui n'est pas mon cas) en ferait une lecture plus approfondie. Gaudi est bien sûr l'influence maîtresse, mais son style est ici féminisé, sexué, avec force seins et fesses mafflues. Il y a évidemment ici bien des niveaux de lecture, le parc d'attraction, les cartes, la sexualité, l'astrologie et aussi la dimension plus profonde, plus tragique de l'artiste. Et l'Injustice y est enfermée à clef à l'intérieur de la Justice; Tinguely a jeté la clef.
Au milieu de l'exubérance et de l'émerveillement, m'ont soudain frappé des images de blessures, ici un rhinocéros blessé, là des coeurs sanglants comme blessés d'une balle mortelle. Et aussi la multiplicité
des miroirs, murs de miroirs qui devaient réfléchir à l'infini le visage de l'artiste quand elle vivait là (ci-contre sa salle à manger). Sans doute faudrait-il revenir ici seul, un samedi d'hiver, loin des foules joyeuses, pour y vivre une autre expérience.Niki de Saint-Phalle étant représentée par l'ADAGP, les photos seront ôtées du blog au bout d'un mois.