Drôle de roman. Il m’a semblé très bancal, mal fichu, artificiellement dérangeant tout en gardant de superbes passages à la fois tristes et cruels. Et puis j’ai eu la douloureuse impression d’être passé à coté, comme si ce texte ne s’adressait pas à moi. Sans doute mon manque de sensibilité légendaire. Il faut dire aussi que Solange n’attire aucune empathie. Une adolescente entièrement focalisée sur la question du désir, c’est très limitatif. Tous les événements de la vie courante qui surviennent ne semblent pas la toucher. Son père qui disparaît du jour au lendemain sans donner de nouvelles ? Aucune réaction. La tentative de suicide d’une camarade ? Rien à cirer. Sa mère qui part en maison de repos ? A peine si ça la travaille. Elle prend tout cela de façon très détachée, ne donnant pas l’impression d’être concernée. Les seules choses qu’elle cherche à comprendre sont celles liées au sexe. Son dico sous le bras, elle part à la pêche aux définitions : orgasme, vagin, copulation, verge…
Niveau écriture, je ne suis pas fan de ce style très sec, syncopé. Sans compter que les dialogues sonnent faux avec cette utilisation quasi systématique de formules triviales pour faire jeune. D’ailleurs, je préfère prévenir les amoureux du langage châtié : le récit de cette éducation sentimentale dans les méandres de la France profonde est cru, très cru. Marie Darrieussecq jette le mot « bite » une centaine de fois à la face du lecteur. Sans doute veut-elle se poser en auteur libérée et provocatrice. A la longue, cette répétition devient ennuyeuse, pénible et ridicule.
Tout ça pour dire que je me suis rarement senti aussi perdu en renfermant un roman. Ou alors, tout simplement, je n’ai rien compris. Une critique professionnelle à comparé Clèves à du Houellebecq au féminin. Je ne peux pas me prononcer, je n’ai jamais lu Houellebecq. Décidément, je suis vraiment trop con.
Clèves, de Marie Darrieussecq, édition P.O.L, 2011. 345 pages. 19 euros.