Pour News-de-stars.com
News de stars: Toi, moi, les autres est très différent de Regarde-moi, votre
premier film. Comment passe-t-on d'un film pareil à une comédie musicale?
Audrey Estrougo: L'envie de faire une comédie musicale n'est pas venue de moi mais des
producteurs. A l'époque j'avais 24 ans, je n'avais pas fait d'école et je ne connaissais pas mon métier après un seul film. Et puis ça pouvait être marrant. C'est rigoureux, c'est quand même un
exercice de style mais ça ne me déplaisait pas de m'y frotter et ça pouvait être intéressant de travailler dans un autre cadre que des films que j'écris moi, dans la lignée de
Regarde-moi. Et l'envie aussi de parler des sans-papiers mais de manière plus légère pour toucher un public plus large, plutôt que de faire
un film d'auteur qui serait vu par 300 personnes. Essayer de toucher un maximum de gens avec une comédie musicale, avec tous les éléments que cela comporte, par la musique, par la danse, par
l'amour, par les couleurs. Essayer d'alléger la dureté du propos.
Benjamin Siksou était-il un choix prédéfini, ou est-ce
simplement un hasard?
A. E: Non, il a passé le casting comme plein de comédiens, mais dès
qu'il est venu c'était évident.
Qu'est-ce qui vous a plu dans ce film? Le fond ou la forme?
Benjamin Siksou: Moi c'est vraiment Regarde-moi qui m'a décidé. Je ne savais pas encore que je le faisais, c'était la veille du casting et ça m'a motivé à avoir ce rôle.
Qu'est-ce qui vous a intéressé dans Regarde-moi?
B. S.: Je sais pas, vraiment j'étais... allez je vais le dire,
ébloui! C'était un film puissant et original. Et moi ce que j'aime dans l'art, c'est être surpris et j'ai été surpris par ce film. Il m'a emmené dans des endroits auxquels je ne m'attendais pas
et c'est ça que je préfère. J'étais encore plus étonné que cette jeune fille-là fasse un truc qui n'avait rien à voir, ça me plaisait encore plus et c'est vraiment tous ces paradoxes là, ces bons
paradoxes, qui m'ont poussé. Et au final, ça me faisait vraiment marrer.
Vous faites de la musique, vous avez joué dans des films, mais c'est la première fois que vous jouez dans une comédie musicale. Était-ce plus
compliqué?
B. S.: On s'est bien entraînés, on a eu beaucoup de répétitions et on avait tous nos
angoisses, mais on était tous ensemble, tous les comédiens pendant 6 mois et on s'est tous épaulés. On a appris à se connaitre et c'est comme ça que ça a fonctionné aussi. Chacun s'est entraîné
de son côté et tous ensemble, et c'est venu tout seul.
Vous avez laissé tomber la production de votre album le temps de tourner dans Toi, moi, les autres. Où en êtes-vous maintenant?
B. S.: J'ai repris depuis, mais je me fais des feintes à moi-même!
Pour le coup je pensais que j'allais pouvoir faire les deux en même temps, et non, donc je me suis vraiment lancé dans le film. Au final, l'album n'est toujours pas là, mais il s'est passé
beaucoup de choses internes aussi, donc...
"Quand on décide de balancer quelque chose comme ça, on ne peut pas le faire dans son coin et ensuite se défiler"
Vous faites pourtant des concerts...
B. S.: Je teste des morceaux, je continue d'en faire. Il y en a à peu près un par
mois.
Une préférence entre la musique et la comédie?
B. S.: Je m'épanouis dans les deux et je prends du plaisir dans les
deux, un plaisir radicalement différent et où il y a un stress qui est différent. Mais tant que ça fonctionne, je prends.
L'image de la Nouvelle Star vous pèse-t-elle?
B. S.: On me connaît pour ça, mais après, je n'ai pas à rougir de ce
que j'ai fait là-bas. Après c'est à moi de faire quelque chose en vrai, mais je n'ai pas à faire oublier quoi que ce soit.
Avez-vous eu des retombées concernant le sujet abordé?
A. E.: On l'a vu lors de la tournée en province. Ce que je voulais faire s'est finalement produit: pour
beaucoup de personnes, les sans-papiers étaient des criminels, ils ne savaient pas ce que c'était, beaucoup m'ont dit "On entend sans-papiers à longueur de journée mais on ne sait pas vraiment à
quoi ça tient d'être sans-papiers", tout bêtement, d'un coup, ça a permis d'identifier. Comme si le personnage de Tina incarnait une problématique, ça leur a permis de se brancher dessus et de se
poser des questions et ça c'est cool. Et le film pendant toute la tournée a été très bien perçu, les gens étaient touchés...
B. S.: Ou alors les gens qui sont en première ligne qui nous on dit
que ça faisait du bien de voir ça. Des gens, des jeunes, des petites meufs, d'autres pas si petites que ça, ça peut paraître incroyable, mais qui découvraient aussi ce problème...
Le film commence comme une simple bluette avant de basculer totalement dans le vif du sujet...
A. E.: C'était l'équilibre à trouver entre la volonté des
producteurs qui voulaient faire juste une histoire d'amour et moi qui voulais aussi raconter cette histoire de sans-papiers. C'est vrai que le film démarre sur la rencontre des deux personnages
principaux, donc on est obligés d'installer un peu la narration autour de ça et voilà, une fois qu'ils se sont roulés une pelle, on passe à autre chose et on fait un truc un peu plus
profond.
C'était un sujet qui vous tenait à cœur?
A. E.: C'est un problème majeur des 15/20 dernières années... l'église St Bernard...
c'est des choses qu'on a vues, dont on entend parler depuis pas mal de temps... Et puis je pense que je suis quelqu'un d'engagé, je me soucie vraiment du monde dans lequel je vis, ça fait partie
des thématiques qui me touchent aussi à titre personnel. J'ai voulu m'engager d'une certaine manière et là c'était un moyen de rejoindre les deux.
B. S.: Je pense qu'on a besoin de symboles comme ça, d'images fortes
pour parler de ce sujet-là, dont on n'aime pas parler normalement parce que ce sont des choses qui dérangent. Effectivement, à chaque fois qu'on parle des sans-papiers on entend parler de
l'église St Bernard et moi le premier, quand je parle de ça, je me souviens de ces images là. Je pense qu'il faut partir de symboliques comme ça pour aller vers ces sujets, qui restent sans fin
au final. Il y aura une solution un jour peut-être... Mais c'est ce qui me plaisait là-dedans, il y avait un visage sur des masses de gens.
Vous avez présenté le film dans beaucoup de festivals et faites encore de la promotion pour la sortie en DVD. C'est peu
commun...
A. E.: Quand on décide de balancer quelque chose comme ça, on ne
peut pas le faire dans son coin et ensuite se défiler. C'est important d'aller rencontrer le public, c'est très enrichissant et là on fait le taff jusqu'au bout. Les DVD font maintenant partie de
l'industrie cinématographique. On est engagé ou on l'est pas j'ai envie de dire.
B. S.: Surtout qu'il est resté quoi, un mois à l'affiche? Moi ça m'a fait un choc. Je me
suis dit "Deux ans qui partent en un mois comme ça...", c'est la première fois que je prends vraiment conscience de ça, il faut continuer, il faut le faire vivre. On peut plus vraiment s'arrêter
à la sortie en salles uniquement.
Quels sont vos autres projets?
A. E.: Mon prochain film est en écriture. Sur le milieu carcéral
féminin.
La cause des femmes vous tient beaucoup à cœur, non? Regarde-moi traite de la violence féminine, dans Toi,moi les
autres, Tina est mère célibataire...
A. E.: On parle trop des mecs, on parle jamais des filles. Quand on parle d'elles, c'est
toujours dans des situations de pauvres victimes...
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