Magazine Culture
L’Alhambra
21, rue Yves Toudic
75010 Paris
Tel : 01 40 20 40 25
Métro : République / Jacques Bonsergent
Une comédie de Ron Clark et Sam Bobrick
Adaptée par Jean Cau
Mise en scène par Bernard Ménez et Fabrizio
Avec Bernard Ménez (Victor Tabouré), Karine Lyachenko (Béatrice Tabouré), Fabrizio (José), Xavier Bernard (Michel Tabouré), Elisa Ménez (Martine)
Ma note : 6/10
L’histoire : Victor Tabouré, teinturier à Limoges, est bien malheureux : sa femme, Béatrice, vient de le quitter pour son propre frère… Pour se consoler, il monte à Paris rendre visite à son fils Michel. Il découvre alors avec stupeur que celui-ci vit avec un autre garçon, José, homosexuel extraverti et virevoltant. Dépassé par les événements, Victor va tout faire pour tenter de modifier le comportement de son fils d’abord, de José ensuite…
Mon avis : Quarante ans après sa création, Bernard Ménez reprend le rôle de Victor Tabouré, immortalisé par Jean Lefèbvre au début des années 80. Cette pièce avait marqué également les premiers pas au théâtre de Bernard Giraudeau.
Quatre décennies plus tard, le thème de cette comédie vaudevillesque n’a pas pris une ride. Ce qui pourrait sembler quelque peu paradoxal avec la banalisation de l’homosexualité. On peut donc en définir que la société n’a pas tellement évolué face à cette question lorsqu’on y est soi-même confronté.
Bernard Ménez, en provincial grand teint, naïf et foncièrement réac, est aisément entré dans le costume du sieur Tabouré. Pas besoin d’être or(Le)fèvre en la matière pour décréter que ce rôle lui va comme un gant. Pourtant, à la fin de la représentation, j’ai ressenti la sensation bizarre que notre pseudo teinturier limougeaud avait joué en demi-teinte, qu’il en avait gardé sous la semelle. Il lui manque ce petit grain de folie qui fait basculer une pièce dans une franc délire. Là, on ne reste que dans la drôlerie. Mais peut-être est-ce voulu par le comédien lui-même puisqu’il cosigne la mise en scène. Peut-être a-t-il voulu ne pas tomber dans la pitrerie gratuite pour jouer plus sur la corde sensible…
Bernard Ménez est fort bien entouré. Il n’y a rien à dire sur un casting où chacun est parfaitement à sa place avec, toutefois, une mention particulière pour Fabrizio qui, en dehors de quelques emprunts un peu lourds au Michel Serrault de La cage aux folles, est vraiment très bon, très convaincant. Il se dégage en outre de sa personne un charme indéniable et un sens de l’autodérision qui le rendent sympathique… Mention spéciale aussi à Karine Lyachenko. Dès qu’elle arrive, assez tard dans la pièce, elle apporte aussitôt ce fameux grain de folie qui lui manquait. Totalement farfelue, grâce à son métier, elle évite de tomber dans l’écueil de la grosse farce. Elle fait rebondir le rythme jusque là un peu plan-plan. Ce qui permet à la pièce de finir sur une bonne note… La jeune Elisa Ménez, en dépit d’un petit rôle, tire agréablement son épingle du jeu. Elle offre à son personnage nunuche de Martine une gouaille toute parisienne qui lui sied à merveille. Elle fait déjà preuve d’une jolie présence.
Bref, nonobstant quelques facilités et quelques lourdeurs, la pièce se laisse voir sans déplaisir. D’autant que, ça et là, histoire de faire oublier qu’elle date de 1971, l’idée a été judicieuse de la saupoudrer de petits clins d’œil à l’actualité…