“Ce parti n’est pas aimable” Un responsable socialiste
On fourbit ses armes avant le moment fatidique. L’instant crucial de la votation. La gauche organise des primaires pour désigner le candidat qui la représentera lors de l’apothéose démocratique de la Ve République. Un spectacle avant le spectacle, un tour de chauffe autour de ce que les promoteurs de l’évènement considèrent comme un évènement démocratique. Même au-delà, de C. Barbier à I. Rioufol en passant par Y. Calvi toute la quincaillerie de la médiasphère évoque ce moment électoral, ce vote “a prime”, comme un projet louable. Mais de quelle démocratie parle-t-on ?
Et de substance finalement, il en manquera. Non pas parce que l’on se focalise sur la gestuelle, les postures et petites phrases de candidats. Sorte d’enduit médiatique, servant à coller les éléments disparates de séquences dont on doute de l’issue, et même du sens. Mais plutôt parce que le spectre politique présenté par le parti dominant à gauche (le PS) recoupe presque exactement l’offre politique hexagonale dans son ensemble. Soit il représente parfaitement la politique française, et dans ce cas caracolerait à la tête des institutions. Soit il s’agit d’un mimétisme sclérosant de la représentation de la société française. Il est intéressant de constater que l’offre politique multipolaire des primaires est constituée d’un noyau central composé de deux candidats majoritaires (F. Hollande et M. Aubry), à qui l’élection selon les commentateurs ne pourra échapper. Et dont les idées sur le fond ne se distinguent que par quelques nuances. Puis de chaque côté une offre minoritaire, un paravent pluraliste. A. Montebourg occupant symétriquement la position tribunitienne de J. -L. Mélenchon. Le reste des candidats se situant à la droite du binôme majoritaire. S. Royal étant loin et ailleurs…
La question ne tient pas dans l’assimilation du duo leader à l’acronyme “UMPS”. Quatre années d’UMP suffisent pour mesurer l’amplitude entre le décent et l’indécent, le compétent et l’aberrant. Mais s’interroger sur la capacité d’une formation politique progressiste à proposer quelque chose de différent. De penser autre chose qu’une société défaillante en tous points. Tous les candidats s’en remettent à la croissance quelle que soit sa forme. Une pensée magique largement partagée chez les experts (on ne sait qui influence qui). Or de croissance il n’y en a pas depuis 30 ans et compte tenu de l’organisation économique, elle ne reviendra pas. Aucun des candidats dits sérieux ne souhaite sortir des terrains balisés. La démondialisation, tentative de penser autrement, et même approximativement autre chose, reléguée au rang d’incongruité teintée de xénophobie. Le PS travaille, phosphore, mais surtout tourne en boucle sur des idées éculées, des grosses ficelles usées. Un peu plus ou un peu moins d’impôts, réorganisation de l’appareil de l’État, sécurité versus prévention (la nuance étant dans le dosage). De loin cela représente un consensus centriste. Le rêve des experts, commentateurs et politologues, psalmodiant une France apaisée, peu rétive aux réformes avec comme toile de fond un sempiternel pacte social. Un citoyen sommé de choisir entre des produits déclinés sans saveur et des élites en perpétuelles promesses de changement.
Le Spectacle Politique tient plus d’un régime de sevrage aux idées nouvelles, à la domestication électorale par réflexe démocratique, que d’une réelle participation à un changement. Se séparer de la clique actuellement aux affaires reste la raison à peine suffisante pour participer. Quoi que…
Vogelsong – 1er septembre 2011 – Paris
Nb : Dans le Nouvel Observateur du 1er septembre L. Joffrin commet un article qui vient conforter ce qui est dit plus haut.