Un bouge de la rue Galande : Le Château rouge.

Par Bernard Vassor
Par Bernard Vassor mise à jour le 1/09/2011 "Véritable réceptacle de débauche et de vice dans tout ce que le vice et la débauche ont de plus misérable" G.Macé, ancien préfet de police.   Les jardins intérieurs avaient été remplacés par des bâtiments vétustes où dans des chambrées, logeaient  des vitriers venus de Suisse.   Son nom, le Château Rouge, lui vient de la façade peinte en rouge "sang-de-boeuf "

57 rue Galande*

Certains historiographes prétendent que ce fut la demeure de Gabrielle d'Estrée, la favorite

d'Henri IV ??? Notons aussi, que le Château rouge à Montmartre bénéficie de la même fausse promotion !

Sur les gravures du XIX° siècle, nous voyons que le prédécesseur de Pierre Trolliet, était un nommé Cadiou. Une fois fortune faite, son successeur fut un nommé Martin.

Le Château-Rouge était le tapis-franc le plus infâme du quartier de la place Maubert. entre l'allée d'un  hôtel louche et la porte  d'un "assommoir" s'ouvrait sur un long couloir  étroit. L'entrée du cabaret, était une vaste et close chambrée, de sordides buveurs attablés, hommes en blouses et filles crottées, abrutis par l'alcool. L'arrière -boutique était réservée aux riches souteneurs en vestes de velours et casquettes à pont. Le raide, la verte et le gros-rouge étaient les seules boissons consommées dans ce lieu. C’était un asile de nuit pour vagabonds qui moyennant quelques centimes, étaient admis à « dormir à la corde», c’est-à-dire assis sur un banc, la tête appuyée contre une corde qu’on lâchait à deux heures du matin. Les pauvres bougres étaient alors jetés à la rue par le patron armé d’un nerf de bœuf, aidé dans sa triste besogne par des garçons qu’il avait recruté parmi des lutteurs de foire. 

  Cour intérieure du Château rouge  ...........  de J-K-Huysmans : 

"Rue Galande

--"L’on peut se demander vraiment pourquoi les galvaudeux, qui savent très bien que la maison Alexandre et que le Château-Rouge sont des traquenards les fréquentent ; la vérité est qu’ils ne savent où aller ; partout on les épie et on les vend ; les mastroquets et les logeurs dépendent de la^police et la secondent ; puis dans ce quartier Saint-Séverin, la plupart des marchands de vin les rebutent par crainte des ennuis ; ils sont donc bien forcés de se rabattre sur les tapis-francs qui leur concède, seul d’ailleurs, pendant une partie de la nuit un gîte, car l’hiver, il peuvent y dormir au chaud sous une table, jusqu’à deux heures du matin. A ce point de vue, le Château-Rouge, connu aussi sous le nom de Guillotine et situé 57 rue Galande* est le lieu le plus clément aux escarpes et surtout aux purotins. Son rez-de-chaussée se compose de trois pièces. La première, celle qui donne sur la cour, est immense ; elle est à peine éclairée, la seconde est grande et le gaz y brûle furieusement ; la troisième est minuscule et toute noire, des vagabonds somnolent dans la première ; des marlous et des scélerats jouent et boivent dans la seconde ; des gens ivres morts dorment dans la troisième.  (…)Une odeur fade à faire vomir, une odeur qui est un mélange d’une sorte de panade, d’eau de javelle et d’ipéca s’évade de ces corps serrés sous leurs guenilles dans des collants de crasse. (…) Le tenancier Pierre Trolliet, un géant habillé d’un tricot de laine, coiffé d’une calotte plantée de travers sur des cheveux qui frisent ; il mâche un cigare d’un sou, crache sec, hérisse une dure moustache sur une bouche piquée de bleupar des points de poudre...........(…)Trolliet marié à une géante au teint couperosé et aux cheveux couleur d’acajou, un type d’ogresse alsacienne. Certains soirs, des crises de joie soulèvent toujours sans que l’on sache pourquoi, ces miséreux ; alors le repaire se mue en un cabanon de fous ; on se range en cortège, l’on s’empare d’un seau vide et joue du tambour dessus ; un autre arbore au bout d’un balai un torchon en guise de drapeau, tout l’établissement défile en poussant des cris d’animaux, et cela finit par un chahut".........

Extrait de La Bièvre à Saint-Séverin.

Atget qui a photographié la maison avant sa démolition la situe au numéro 61  

 http://autourduperetanguy.blogspirit.com/archive/20...

En 1885, l'assassin Gamahut  :

qui fut arrêté au Château rouge, Jules Jouy lui avait dédié cette chanson au goût douteux : au Chat Noir après son exécution à "L'Abbbaye du-monte-à-regret" :

Gamahut, ecoutez-moi donc,

Est-ce qu'on souffre encor quand on a plus d'tête ?

Gamahut, écoutez moi donc,

Est-ce qu'on souffre encor quand on a plus d'tronc ?

......................

Auguste Vitu raconte que c'est dans ce cabaret qu'en 1887 :

"Trois hommes ont proposé, accepté et réalisé le pari de jeter une femme à la seine. La victime était une chiffonnière ivre. L'enjeu était de deux sous, prix d'un petit verre d'eau de vie"

Le propriétaire à la fin du XIX°, s'associa avec une agence de voyage, un contrat lui faisait obligation d'accueillir une clientèle désireuse de découvrir les bas-fonds parisiens. Il avait engagé des comédiens qu'il avait déguisé en truands, en gigolettes, en bagnards et chiffonnniers, avec des habitués, des ivrognes qu'il abreuvait gratuitement. L'illusion était parfaite. La maison disparue lors du prrolongement de la rue Dante (qui véécut un certain temps dans  le quartier) en 1897. L'immeuble qui le remplace aujourd'hui est en briques....rouges !